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Grand Angle

Maroc : Le gouvernement pointé pour sa vision «patriarcale des droits des femmes»

Les procédures concrètes tant attendues pour une réelle autonomisation des femmes tardent à être lancées, elles sont même absentes du programme gouvernemental, selon les organisations féministes. Celui annoncé assoie plutôt le rôle familial et reproductif des citoyennes.

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Photo d'illustration / DR.
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Le programme du nouveau gouvernement cantonne la notion d’autonomisation des femmes au rôle de mère dans «la gestion des internats pour contribuer à réduire la déperdition scolaire». C’est ce qui ressort de la lecture de la feuille de route de l’exécutif, selon l’Association démocratique des femmes du Maroc (ADFM). Selon l’ONG, ces propositions manquent de mesures «concrètes pour une réelle autonomisation des femmes», tout en omettant de faire référence clairement à l’égalité comme «principe de base pour assurer l'accès aux droits humains des femmes, conformément à la Constitution et aux engagements internationaux du Maroc».

Dans son analyse du programme avec une approche égalitaire, l’ONG reproche au gouvernement de s’aligner sur une vision «patriarcale des droits des femmes, tel qu’énoncée dans le rapport relatif au Nouveau modèle de développement». Pour elle, cette approche menace d’être «un obstacle pour l’effectivité des droits des femmes» et une entrave à la mise en œuvre des droits, comme annoncé dans l’introduction du programme gouvernemental. Ainsi, ce dernier met en évidence «un décalage entre les droits économiques et sociaux d’une part et le droit d’accès à la justice, à l’information et aux libertés publiques d’autre part», déplore encore l’ADFM.

Un programme qui a fait passer les recommandations institutionnelles à la trappe

L’organisation a appelé à une «intégration transversale de l’égalité» et à «la redevabilité de genre dans le chantier de réforme qui découlera de la mise en œuvre du programme gouvernemental», en plus de «l’opérationnalisation de l’Autorité pour la parité et la lutte contre toutes les formes de discrimination, sur la base de la révision de la loi qui l’a instituée», sur la base des recommandations d’institutions comme le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH), le Conseil économique social et environnemental (CESE) ainsi que des associations féministes.

Cette démarche, selon l’ONG, devra être accompagnée de l’harmonisation de «toutes les lois et politiques publiques avec la lettre et l’esprit de la constitution et les conventions internationales», avec une priorité au Code de la famille, au Code pénal et au Code de procédure pénale. L’ADFM a appelé aussi à promulguer une «loi générale définissant l’égalité et la discrimination directe et indirecte», en plus de la mise en place d’une «stratégie nationale pour l’égalité de genre sur la base d’une vision globale, intersectorielle et concertée entre les différentes parties prenantes».

Afin d’atteindre les objectifs de développement durable, l’association a martelé qu’il était temps de «rompre avec les politiques et pratiques discriminatoires et de prendre toutes les mesures requises pour hisser notre pays dans le rang des nations où tous les citoyens et toutes les citoyennes vivent libres et égaux et jouissent pleinement de leurs droits».

Une violence politique persistante visant les femmes

Cet appel a été lancé quelques jours après que 64 organisations féministes et de droits humains se sont joint à la déclaration du Groupe d’action contre la violence politique faite aux femmes, qui s’est axée particulièrement sur les droits politiques des citoyennes. Dans le sillage des élections générales du 8 septembre dernier, cette mobilisation a été lancée au vu du constat du nombre de candidates et d’élues contraintes de céder la place aux élus hommes.

Dans leur déclaration issue d’une réunion sur le sujet, les structures ont relevé «l’exclusion systématique de la représentativité féminine au sein de nombreux conseils communaux, en porte-à-faux avec le principe des discours royaux et des exigences constitutionnelles qui ont renforcé la présence des femmes sur la scène politique», dans une logique de parité et d’égalité des chances entre les sexes.

Pour les signataires, la plupart des partis politiques ont essuyé un échec dans leur interaction avec les exigences constitutionnelles en la matière, en évinçant les femmes de la scène publique, voire en les incitant à abandonner leurs projets électoraux. Dans ce sens, la déclaration a reproché au ministère de l’Intérieur, dans le cadre de l’organisation du scrutin et de l’élection des membres des bureaux des conseils communaux de ne pas avoir «fait ses observations sur cette violation manifeste».

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