Les musulmans lui furent redevables à jamais dans l’établissement d’un califat à Al Andalus. Tariq ibn Ziyad, éminents chef militaire et bras droit du gouverneur de l’Ifriqiya Mūsā ibn Nuṣayr (698 – 717), permit en effet aux Omeyyades (661 – 750) de rallier les territoires andalous à leur empire, sous le règne du calife omeyyade ʾAbū Al-ʿAbbās Al-Walīd ibn ʿAbd Al-Malik (705 – 715), dit Al-Walīd Ie.
Les historiens rapportèrent qu’il était né en 675 et mort en 720. «C’était un homme grand de taille et blond, de quoi on reconnaissait typiquement les Berbères à l’époque», nota Ibn Idhari en le décrivant dans son ouvrage «Al-Bayan al-Mughrib». Ines Mohamed El Bahiji rappela par ailleurs qu’il était issu des «premières tribus Berbères d’Afrique du Nord» qui furent islamisée.
Tout commença lorsqu’Ibn Nuṣayr obtint la permission des Omeyyades de partir à la conquête d’Al Andalous, envoyer ainsi des commissions d’expéditions pour effectuer les premiers repérages et mieux connaître le terrain, la nature de cette contrée outre-méditerranéenne et de ses habitants, ainsi que les lieux où l’armée pourrait descendre.
Dans le plus grand des secrets, Ibn Nuṣayr envoya en 710 cinq cents hommes avec à leur tête Tarif ibn Malik, qui devint commandant sous les ordres d’Ibn Ziyad. Dans «Histoire d’Al-Andalus», Ragheb Al Sarhani rapporta que Tarif «étudiait la région du sud de l’Andalousie où l’armée musulmane jeta l’ancre (d’où l’appellation de Tarifa qui fut donnée à cette région), avant de revenir auprès d’Ibn Nuṣayr et lui rapporter ce qu’il avait vu».
Un an après, le gouverneur omeyyade envoya Tariq ibn Ziyad qui dirigea sept mille soldats pour Al Andalous. Il donna son nom à Gibraltar et mena une guerre sans merci contre les Wisigoths (418 – 720) ibériques.
Deux récits autour d’un discours devant les soldats
Les sources historiques s’accordèrent sur le rôle central d’ibn Ziyad dans la prise d’Al Andalus par les musulmans. Mais elles furent moins unanimes sur des épisodes rattachés à cette histoire.
Certains soulignent qu’il avait fait un discours historique devant ses soldats avant de lancer l’offensive sur les ennemis, en appelant son armée à se munir de courage, de pugnacité et à ne pas baisser sa garde.
«Ibn Khalkan rapporta que lorsqu’une armée de Rodéric s’approcha les soldats musulmans, Tariq Ibn Ziyad exhorta ses hommes à combattre avec conviction en s’adressant à eux ainsi : "La mer est derrière vous, et l’ennemi devant vous, et vous n’avez par Dieu que la sincérité et la patience".»
Dans l’édition 107 de la revue Daouat Alhaq, publiée par le ministère des Habous et des affaires islamiques, les historiens nuancèrent ce récit, notant qu’Ibn Ziyad ne s’était pas converti à l’islam assez longtemps avant cette conquête pour maîtriser l’arabe de manière aussi parfaite. «Il ne connut Mūsā ibn Nuṣayr que lorsque ce dernier prit le pouvoir dans le Maghreb en 89 de l’Hégire», soutient la même source.
«Tandis que certains affirmèrent qu’il ne pouvait apprendre cette langue avec une telle perfection en peu de temps, d’autres n’évoquèrent aucunement son célèbre discours devant ses guerriers. Il ne fut relayé que tardivement à travers des ouvrages historiques récents.»
Les historiens ne s’accordèrent pas non plus sur les ordres qu’il aurait donnés de mettre le feu aux navires une fois arrivé à Al Andalus, dans l’idée de couper tout espoir de désertion à ses hommes.
Une victoire historique sur Rodéric
L’arrivée de Tariq ibn Ziyad à la péninsule ibérique se confronta à peu de résistance. En effet, Ibn Nuṣayr mettait à la disposition de son chef de guerre tous les moyens humains, logistiques et financiers pour le réconforter dans sa victoire inéluctable face au roi Rodéric (710 – 711). «Mūsā ibn Nuṣayr vint avec dix-huit mille hommes et l’armée islamique compta ainsi vingt-quatre mille combattants, répartis sur toutes les régions d’Al Andalus et dans certaines régions du sud de la France», selon Ines Mohamed El Bahiji.
Le 19 juillet 711 à l’embouchure de la rivière Barbate (río Barbate), dans la région de Cadix, la défaite de Rodéric face à l’armée musulmane fut cuisante, au cours d’une bataille qui dura huit jours. «La plupart des historiens rapportèrent que ce duel fut décisif pour la région d’Al Andalus. Il fut sans merci à tel point que tout le monde crut à une apocalypse», nota Ines Mohamed El Bahiji dans son ouvrage.
Selon le chercheur, cette bataille fut historique et inédite à plus d’un titre, puisqu’elle permit aux musulmans de prendre les rênes et de maintenir leur pouvoir sur la péninsule pendant hui siècles.
«Les musulmans réussirent à étendre leur Etat sur Al Andalus lorsque Tariq ibn Ziyad, guerrier de Mūsā ibn Nuṣayr qui fut souverain omeyyade, traversa l’Ifriqiya avec 7 000 combattants, qui furent renforcés par 5 000 autres grâce à Mūsā ibn Nuṣayr, reportant ainsi la Bataille de Guadalete qui les opposa aux Wisigoths. Au bout de deux ans, les musulmans prirent le contrôle sur la péninsule ibérique et s’étendirent vers l’est, jusqu’à la ville actuelle de Lyon.»
Après ces réalisations glorieuses, Tariq Ibn Ziyad revient à Damas avec Mūsā ibn Nuṣayr. Les deux hommes étaient convoqués par le calife Abd Al-Malik, probablement à cause de différends qui firent surface, alors que les deux hommes incarnaient le tandem infaillible du pouvoir omeyyade en Afrique du Nord et à Al Andalus. Par conséquent et à la suite des divergences, ils furent démis de leurs fonctions.
Les récits historiques étaient tout autant différents les uns des autres sur la fin de vie d’Ibn Ziyad, ainsi que les conditions où il mena ses dernières années d’existence. La certitude demeura sur son considérable leg qui contribua à maintenir le pouvoir entre les mains des musulmans à Al Andalus et à faire l’âge d’or de la gouvernance politique des califats qui se succédèrent sur la région.
En hommage à tout ceci, son nom fut donné à plusieurs lieux dans différents pays du pourtour méditerranéen. En 2012, la Banque centrale britannique du gouvernement de Gibraltar avait même émis un billet de 5£ avec le portrait du guerrier amazigh.