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Grand Angle

Code de la famille : Pour une réforme incluant l’égalité dans l’héritage basée sur la volonté (research paper)

Des dispositions du mariage au droit successoral, en passant par le droit des enfants et le divorce, une publication du Policy centrer for the south met en avant les points clés du Code de la famille qui méritent réforme. Ce research paper met l’accent sur l’harmonisation avec les principes constitutionnels, universels et jurisprudentiels théologiques, y compris pour un régime de parité dans l’héritage, fondé sur l’autonomie de la volonté.

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Temps de lecture: 5'

Récemment publié en ce mois de mars, marqué par la Journée internationale des droits des femmes, un document du Policy centrer for the south analyse les axes sur lesquels la réforme du Code de la famille gagnerait à faire actualiser les lois. Proposé par Nouzha Chekrouni et Abdessalam Saad Jaldi, ce research paper intitulé «Le Code de la famille marocain (Moudawana) : réalités et perspectives de réformes» fait une lecture juridique et sociale des dysfonctionnements actuels. Il examine notamment la lente progression vers l’égalité dans le milieu familial, mais aussi les carences en matière de protection de l’enfance, notamment la filiation.

A travers une approche de droit comparé, les dispositions du Code de la famille sont ainsi décortiquées à la lumière des engagements internationaux du Maroc, mais aussi des propres contradictions du texte. A ce titre, les deux auteurs rappellent que la réforme de ce dispositif en 2004 a placé le mariage sous la responsabilité conjointe des deux époux. Par conséquent, le concept de l’homme comme chef de famille auquel la femme doit «obéissance et soumission» a été levé. De même, l’âge minimal du mariage a été fixé à 18 ans.

«Cependant, presque vingt ans depuis son adoption, des insuffisances subsistent. Celles-ci concernent essentiellement le mariage des mineurs, l’identification du mariage, les ambiguïtés juridiques relatives au divorce, l’absence à la fois de prestation compensatoire et de partage des biens acquis pendant le mariage sans oublier le mariage des Marocaines avec des non-musulmans», notent les auteurs.

Pour une criminalisation du mariage des mineures

Concernant le mariage des mineurs, l’article 19 du Code de la famille prévoit que la capacité matrimoniale s’acquiert à l’âge de 18 ans, autant pour les filles que les garçons. Pourtant, l’article 20 «prend le contrepied de cette disposition en permettant au juge de la famille chargé du mariage d’autoriser le mariage avant cet âge par décision motivée mais insusceptible de recours». «Or, le mutisme du Code sur les circonstances pouvant conduire le juge à autoriser de tels mariages, l’absence d’âge minimal en dessous duquel il peut les approuver, ainsi que l’impossibilité d’introduire un recours pour annuler la décision du juge autorisant le mariage de mineurs, ont porté préjudice à l’efficacité de l’article 19», souligne le document.

La même source rappelle qu’en 2018, «plus de 40 000 mineures ont été mariées sur la base de l’article 20 de la Moudawana, situation dont s’était alarmée Amina Bouayach, présidente du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH). Une décision prise souvent contre l’avis du parquet, qui a demandé en 2021 le refus de 20 200 demandes de mariage de mineurs, alors que les tribunaux avaient validé plus de 20 000 demandes sur un total de 28 930, soit un taux d’acceptation de 70%».

Se référant aux statistiques de la Banque mondiale (BM), le document rappelle aussi que «26 mineures marocaines sur 1000 âgées entre 15 ans et 18 ans ont accouché en 2021». D’où l’importance, selon les auteurs, de «s’interroger sur la réalité du consentement dans le cadre d’une telle union, et donc sa validité, puisque le mariage est considéré selon l’article 4 du Code de la famille comme un pacte fondé sur le consentement mutuel». Dans un registre lié, le document s’interroge, plus loin, sur la teneur du principe de l’intérêt supérieur de l’enfant, à l’aune de diverses questions liées notamment à la garde, à la filiation ou encore à la notion de la protection.

Concernant le mariage, le document souligne par ailleurs que le Code de la famille de 2004 «maintient les empêchements en raison de la différence de culte». «Pour pouvoir épouser un étranger ou un non-musulman converti à l’Islam, une marocaine doit, d’après les dispositions de l’article 65 du Code de la famille, obtenir l’autorisation préalable du procureur général du roi auprès de la Cour d’appel, comme au temps de l’ancienne Moudawana», indiquent les auteurs. Pour eux, ce dernier point constitue même une régression, vu que l’ancien texte ne prévoyait pas cette autorisation. Cette dernière n’était «imposée que par des circulaires du ministère de la Justice».

Le droit successoral doit être indissociable de la réforme

Dans le volet patrimonial du Code de la famille, les auteurs notent l’introduction du contrat dans la gestion des biens acquis durant le mariage. Il s’agit ici d’une rupture avec la conception classique du droit musulman, qui fait fi du régime de communauté des biens entre époux et les régimes matrimoniaux. Mais ce progrès juridique contraste avec les dispositions successorales restées quasiment statiques, hormis quelques jurisprudences théologiques intégrées. En droit musulman classique, ces écarts instaurent globalement «une inégalité structurelle entre les deux sexes».

«L’immutabilité du droit successoral marocain puise ses fondements dans le caractère extratemporel du régime successoral islamique, dans la mesure où la dévolution héréditaire fût définie par les principes sacro-saints des lois coraniques intangibles à toute forme de modification de la volonté humaine», constatent les auteurs. «Cette posture nous rappelle certaines conceptions naturalistes du droit suggérant que la règle juridique, apparue sous l’intervention d’une émission de valeurs et de sens, se situe au-delà de l’histoire humaine, autant qu’en dehors de celle-ci», ajoutent-ils.

«Dans cette perspective, le régime successoral islamique dispose qu’à égalité de degrés, une femme reçoit la moitié de la part qui revient à l’homme. Il en va que si les époux héritent l’un de l’autre, leur vocation successorale varie selon que le survivant est le mari ou l’épouse.»

Extrait du research paper

En l’espèce, les discriminations successorales dans le Code de la famille de 2004 «paraissent en décalage avec la Constitution de 2011, qui prône l’égalité entre les citoyens et récrimine donc les discriminations entre individus, sachant que plusieurs récits prophétiques attestent que les inégalités d’héritage sont principalement conséquentes à la configuration patriarcale de la famille arabo-musulmane et non pas à la nature propre de la femme», analyse le document.

Une parité successorale basée sur l’autonomie de la volonté

A ce titre, les auteurs recommandent une réforme globale qui ne fera pas exception des dispositions successorales. Ainsi, ils préconisent de «soumettre la parité successorale au régime de l’autonomie de la volonté». «Bien que certains considèrent ces prescriptions comme immuables, la réforme du Code de la famille en 2004 a démontré la capacité d’adaptation de la jurisprudence islamique aux réalités contemporaines, en introduisant le concept de testament/legs obligatoire pour les petits-enfants du côté maternel, une avancée notable bien que limitée», explique le document.

Autant dire que face à la persistance des inégalités entre filles et garçons dans l’héritage, «une révision plus profonde pour parvenir à une équité entière» serait salutaire, selon les auteurs. «La résistance à la réforme de l’héritage repose souvent sur l’interprétation des textes sacrés et le rôle traditionnellement attribué aux hommes comme pourvoyeurs», note encore la même source.

En phase avec les réalités sociétales actuelles, les auteurs soulignent à ce propos que «les statistiques du HCP mettent en évidence une augmentation significative des ménages dirigés par des femmes». Désormais, «les femmes actives participent sur un même pied d’égalité avec leurs époux dans la prise en charge de leurs foyers, ce qui vide en partie l’article 194 du Code de la famille de sa substance et interroge sur les finalités et les sagesses de la répartition de l’héritage en Islam», souligne le research paper.

«Une autre réalité omise est celle de l’entretien, par l’épouse, outre l’époux, des enfants et parfois même des personnes âgées ou des membres de la famille. Les tâches domestiques ainsi que l’éducation des enfants constituent des contributions substantielles mais n’étant ni reconnues comme activités productives ni valorisées par la loi. Elles maintiennent l’épouse dans un statut de subordination par rapport à l’époux.»

Extrait du research paper

La question du Ta’sib reste un autre point nécessaire dans cette réforme, avec une proposition d’«explorer d’autres courants juridiques outre que le malékisme, comme le Jaâfarisme, ou d’adopter des approches jurisprudentielles innovantes pour corriger les déséquilibres». D’ailleurs, «le Code de la famille fait référence à la jurisprudence malékite mais ouvre la porte à l’Ijtihad» plus largement, rappelle-t-on.

Article modifié le 17/03/2024 à 13h16

CHN-W
Date : le 12 mars 2024 à 13h17
Assalāmou 'alaykoum wa rahmatoullāh. Si Allah a prescrit une demi-part pour une fille, c'est peut-être qu'il n'y avait aucune part avant l'Islam ? Ou peut-être que la fille n'avait aucune charge. De même que si Allah parle des esclaves, c'est parce qu'il y avait, et non pas parce que l'esclavage était une bonne chose. Le Qour'an n'est pas un catalogue de règles mais de principes à appliquer selon les circonstances. Wassalāmou 'alaykoum water rahmatoullāh.
anakine01
Date : le 12 mars 2024 à 12h57
ca ne passera pas....
mousse111
Date : le 12 mars 2024 à 11h34
mon experience personelle on a divise l heritage par le nombre d enfants sans distinction de sexe ca a pose aucun probleme
Boujemaa73
Date : le 12 mars 2024 à 10h43
Je ne suis pas matérialiste mais concernant l'héritage, tout est écrit dans le Coran. Il n'y a aucune ambiguïté, et il faut donc s'y soumettre. Faire l'inverse serait un sacrilège mais également une offense à la société Marocaine qui ne renoncera jamais au Coran et à la Sunna de notre prophète SWS. Donc, un message à tous les féministes, laïcards et amateurs de Bid3a, passez votre chemin, le Maroc est une forteresse, vous allez vous casser les dents.
Wajda80
Date : le 12 mars 2024 à 05h36
Les verset sont clairs a ce sujet, il n'y a donc aucun lien a interpretation: Coran: 4/11 Voici ce qu’Allah vous enjoint au sujet de vos enfants : au fils, une part équivalente à celle de deux filles. S’il n’y a que des filles, même plus de deux, à elles alors deux tiers de ce que le défunt laisse. Et s’il n’y en a qu’une, à elle alors la moitié. Quant aux père et mère du défunt, à chacun d’eux le sixième de ce qu’il laisse, s’il a un enfant. S’il n’a pas d’enfant et que ses père et mère héritent de lui, à sa mère alors le tiers. Mais s’il a des frères, à la mère alors le sixième, après exécution du testament qu’il aurait fait ou paiement d’une dette. De vos ascendants ou descendants, vous ne savez pas qui est plus près de vous en utilité. Ceci est un ordre obligatoire de la part d’Allah, car Allah est, certes, Omniscient et Sage. Coran: 4/12 Et à vous la moitié de ce que laissent vos épouses, si elles n’ont pas d’enfants. Si elles ont un enfant, alors à vous le quart de ce qu’elles laissent, après exécution du testament qu’elles auraient fait ou paiement d’une dette. Et à elles un quart de ce que vous laissez, si vous n’avez pas d’enfant. Mais si vous avez un enfant, à elles alors le huitième de ce que vous laissez après exécution du testament que vous auriez fait ou paiement d’une dette. Et si un homme, ou une femme, meurt sans héritier direct, cependant qu’il laisse un frère ou une sœur, à chacun de ceux-ci alors, un sixième. S’ils sont plus de deux, tous alors participeront au tiers, après exécution du testament ou paiement d’une dette, sans préjudice à quiconque. (Telle est l’) Injonction d’Allah ! Et Allah est Omniscient et Indulgent. Coran: 4/176 Ils te demandent ce qui a été décrété. Dis : « Au sujet du défunt qui n’a pas de père ni de mère ni d’enfant, Allah vous donne Son décret : si quelqu’un meurt sans enfant, mais a une sœur, à celle-ci revient la moitié de ce qu’il laisse. Et lui, il héritera d’elle en totalité si elle n’a pas d’enfant. Mais s’il a deux sœurs (ou plus), à elles alors les deux tiers de ce qu’il laisse; et s’il a des frères et des sœurs, à un frère alors revient une portion égale à celle de deux sœurs. Allah vous donne des explicationls pour que vous ne vous égariez pas. Et Allah est Omniscient.
Yazs
Date : le 12 mars 2024 à 00h25
Les juges posent leurs décisions au regard de la religion d’État et des principes jurisprudentiels islamiques du courant malékite depuis maintenant plus d'un millénaire et c'est décrit ici par un think thank soit disant "marocain", financé par on ne sait qui dont la majorité des experts ont été idéologiquement colonisé par le Dar al Kufr, comme une tare... Il appartient à ceux qui se sont engagés sur la voie de la science religieuse de protéger la religion en apportant un discours de vérité et argumenté démontrant la mécréance qui se cache derrière ces avant-postes idéologiques tout en répondant aux problématiques pertinentes soulevées par ces derniers plutôt que de nous casser les bonbons sur la longueur de nos pantalons ou celle de nos barbes...
Yazs
Date : le 12 mars 2024 à 00h25
Beaucoup de blabla pour dire que ces gens veulent abolir le droit musulman au profit du droit occidental. J'ai jeté un œil sur les membres de ce think thank. Aucun d'entre eux n'a le moindre bagage religieux. Ce ne sont que des expert en économie, en linguistique, en sciences sociales formé à l'étranger notamment aux Etats Unis et en Europe qui jugent et évaluent l'état du droit marocain avec une lentille...occidentale. Il y a un manque de crédibilité académique de ces personnes au regard de leurs compréhension du droit islamique. Abdessalam Saad Jaldi est un jeune docteur en droit international formé en France. Nouzha Chekrouni est une politique (?), docteur en...linguistique formé en France. En lisant l'article et le rapport, on comprends vite que ce qui y est recherché c'est une abrogation du droit islamique marocain à l'ombre de l'idéologie woke qui se répand dans les pays occidentaux sécularisé. A titre d'exemple, je vous cite ici un passages du dit rapport qui m'a particulièrement choqué. Je vous laisse juger par vous même du ton employé pour juger notre religion : "Néanmoins, l’omniprésence de l’influence islamique reconduit le débat sur la place que doivent occuper dans l’appréciation des juges les autres sources de droit et d’interprétation juridique, particulièrement les conventions internationales dument ratifiées par le Maroc. Si certains magistrats font preuve d’ouverture d’esprit, d’autres ne se contentent pas de se référer aux dispositions du Code pour asseoir leurs décisions et éprouvent le besoin d’y adjoindre d’autres références, notamment le texte coranique et les traditions jurisprudentielles prophétiques à caractère religieux." Dans ce passage répugnant, l'auteur ou l'autrice se plaint du fait que les juges du Maroc, pays islamique, pose leurs jugements en priorité en fonction des...principes islamiques à défaut des "convention internationales"... Pire encore, ceux qui s'en éloignent sont qualifié d' d'esprit... et l'auteur va jusqu'à dire que certains juges "éprouvent" (mot idéologiquement connoté, il véhicule un jugement) le besoin d'adjoindre du "texte coranique et des traditions jurisprudentielles prophétiques à caractères religieux"...
Dernière modification le 12/03/2024 13:17
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