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Interview

Redouane Mfadel : «L’immobilier a un effet d’entrainement sur le reste de l’économie»

Redouane Mfadel, vice-président du groupe Mfadel

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Redouane Mfadel, vise président du groupe Mfadel / DR
Temps de lecture: 4'

«Quand l’immobilier va, tout va», a-t-on l’habitude de dire. Depuis 2 mois rien ne va plus ? Quelle est la situation de votre secteur ?

La crise sanitaire et le confinement lié ont conduit partout dans le monde a un arrêt brutal et total de nombreuses activités commerciales et industrielles. Les activités de construction et de promotion immobilière n’ont bien entendu pas échappé à ce tsunami auquel personne ne s’attendait. Les bureaux de vente étaient fermés. Difficile dans ces conditions d’organiser les activités commerciales à distance et en particulier les visites. 

Par définition, les achats durables et engageant sur le long terme pour les ménages ou les professionnels sont des achats réfléchis qui nécessitent visites et contre visites. Les climats d’anxiété et d’incertitude ne sont pas favorable à l’investissement. L’esprit est en général ailleurs.

Le déconfinement permettra une reprise significative des transactions comme observé en France ou en Espagne. Les contacts sont là et les équipes sont mobilisées. Nous ne nous inquiétons pas trop. Les effectifs sont maintenus et ils sont déjà sur le pont pour préparer la reprise. La demande est là et le Groupe Mfadel possède des produits bien étudiés et adaptés tant en terme de positionnement prix très compétitif que de qualité avec des emplacements systématiquement premium.

Sur le stand du groupe Mfadel lors du SMAP Immo Paris / DRSur le stand du groupe Mfadel lors du SMAP Immo Paris / DR

La crise immobilière ne date pourtant pas de mars. La crise sanitaire va-t-elle avoir un effet malthusianiste en provoquant la faillite des promoteurs les plus fragiles, et peut être une concentration entre groupes pour une consolidation du secteur ?

D’une manière générale, il est trop tôt pour faire des prévisions quant à l’évolution générale du secteur. Tout dépend de la manière et de la percussion avec laquelle réagiront les autorités gouvernementales mais aussi bancaires face à cette crise inédite.

Ce qui est certain, c’est que le secteur immobilier a un effet d’entrainement important sur l’ensemble de l’activité économique au Maroc drainant près d’un million d’emplois, des dizaines de corps de métiers et concentrant près du tiers des engagements bancaires. La préservation de l'écosystème immobilier doit être mis au centre des plans de relance car il est l’un des poumons de notre système financier, économique mais aussi social.

L’immobilier reste une valeur refuge partout dans le monde, surtout en période de crise. La demande immobilière reste forte au Maroc, surtout sur l’axe Casablanca-Rabat. Les besoins sont importants en raison notamment de la pression démographique et du gap antérieurement cumulé. Toutefois, il convient de soutenir la demande et les ménages par les actes.

Au regard de la demande potentielle et de l’état des lieux, je ne vois pas de concentration pour l’heure dans le secteur. Elle n’est de toute façon pas souhaitable car elle serait négative pour le consommateur, pour les banques mais aussi pour l’emploi. Le secteur s’est déjà largement restructuré ces dernières années avec une professionnalisation remarquable des intervenants. 

Dans l’acte de bâtir, les produits sont déjà bien cadrés et normés autour d’entreprises de construction, de laboratoires, de bureaux d’études, d’architectes, et d’organismes de contrôle qui jouent parfaitement leur rôle.

Par contre, les acquéreurs pointent régulièrement  la cherté du crédit bancaire et des assurances lors du montage du dossier d'emprunt. Au niveau de la fiscalité, les frais liés à l’acte d’achat, notamment droits d’enregistrement et de conservation foncière ont littéralement explosé ces dernières années. L'immobilier ayant largement était considéré comme une vache à lait, au détriment de nos concitoyens et de leur pouvoir d’achat. De même le foncier utile et libre est rare et cher au Maroc. Au final, c’est l’acquéreur qui en supporte injustement le coût.

Où se situe la priorité aujourd’hui ? Vendre le stock disponible ? Revendre une partie du foncier ? Débloquer des financements via les banques ?

La priorité est aujourd’hui de garantir la sécurité sanitaire du personnel de bureau et du personnel de chantier. Nous avons dès le mois de mars 2020 engagé des mesures de prévention et d’hygiène avec fourniture de masques, gels et désinfection des parties communes et des abords de nos résidences et des chantiers.

Les stocks fonciers dans les grands centres urbains étant stratégiques et rares, nul promoteur n’entend bien évidemment les céder. Les promoteurs avec lesquels je suis en contact restent optimistes et revendiquent une baisse des taux d’intérêt significative en faveur des ménages. Les banques doivent consentir un effort pour les ménages marocains qui doivent être soutenus en priorité. Elles ne le feront pas sans pression des autorités de tutelle.

A ma connaissance, les autorités de tutelle préparent des mesures de soutien interessantes. En l’absence de données précises, il est difficile de les commenter pour l'instant. Ce qui est certain c’est qu’il ne faut pas jouer petits bras.

Le groupe Mfadel est devenu récemment un acteur du secteur du tourisme. Cette diversification tombe avec la plus grande crise qu’ait connu ce secteur au Maroc. Quelle est la situation ?

Le Maroc a un potentiel touristique incroyable avec une géographie et une culture riche et diversifiée. La marque Maroc est sur les radars du tourisme mondial depuis quelques années. Le tourisme pèse près de 10% du PIB. Il représente 2 millions d’emplois au total et 125 milliards de dirhams de recettes dont 80 pour le tourisme étranger. Ce secteur doit être soutenu car il nourrit de nombreuses petits emplois allant du taxi, au guide en passant par l’artisan et le serveur... Les hôteliers ne sont pas les seuls concernés.

Dans un souci de solidarité nationale, nous avons mis nos actifs hôteliers à disposition des autorités dans le cadre de la lutte sanitaire et médicale. Nous sommes confiants que le tourisme au Maroc possède des fondamentaux solides. La vie de toute entreprise comme de tout individu est faite de hauts et de bas. Les épreuves grandissent les Hommes et les entités.

Le groupe Mfadel a signé un partenariat avec le groupe Accor pour un hôtel Novotel et un hôtel Ibis à Mohammedia / DRLe groupe Mfadel a signé un partenariat avec le groupe Accor pour un hôtel Novotel et un hôtel Ibis à Mohammedia / DR

Quelles sont les perspectives pour vous et plus largement pour les acteurs du secteur touristique ? 

L’arrêt du trafic aérien annonce une saison estivale difficile mais il y a fort à faire avec le tourisme local et national. Il faut faire le dos rond et faire preuve de créativité et d’audace pour mettre en œuvre des stratégies gagnantes. Tous les acteurs du tourisme espèrent une reprise rapide des vols. Nous préparons d’ores et déjà des offres compétitives et des packages inédits pour les familles. 

Certes, les mesures réelles de soutien tardent à se dessiner, mais si elles sont à la hauteur de cette crise, le Maroc pourrait rapidement et dès 2021 retrouver sa vitesse de croisière à la faveur notamment du retour de la cible business et des Marocains du monde.

Le Maroc a marqué des points pendant cette pandémie... Partout, les Marocains sont fiers de leur pays et l’Europe a pu mesurer les progrès accomplis par notre pays dans bien des domaines.

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