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Grand Angle

Huelva Gate : La situation psychologique des saisonnières expliquées par une experte

Cette semaine, l’avocate des saisonnières a déposé une requête complémentaire suite au classement provisoire de la plainte relative aux agressions sexuelles présumées. De son côté, la psychologue ayant évalué la situation des saisonnières a affirmé qu’elles «sont toutes diagnostiqués d’un trouble de stress post-traumatique» alors que certaines «présentent des symptômes de phobie sociale».

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Six des saisonnières ayant déposé plainte contre leur employeur pour agressions sexuelles présumées. / Ph. DR
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L’avocate des saisonnières marocaines de l’affaire Huelva Gate, Belén Luján a déposé cette semaine une requête en complément, contre la décision du juge d’instruction de la Chambre n°3 de La Palma del Condado (province de Huelva). Cette juridiction a classé vendredi la plainte déposée par les saisonnières pour des agressions sexuelles présumées, sans suite, le deuxième après sa décision d’avril 2019.

Un document, adressé à la cour d’instruction, où elle dénonce le fait que le juge Serrano n'a ni admis ni évalué «des documents essentiels aux fins de [sa] demande visant à adopter des mesures de précaution et de protection afin de protéger l'identité de [ses] clientes». L'avocate déclare que de tels documents, telle qu'une vidéo dans laquelle un employeur menaçait les travailleuses d'envoyer des «enregistrements de contenu sexuel» à leur famille au Maroc, n'ont pas été correctement évalués ni pris en compte par le juge.

«Avec cette menace, elles étaient intimidées et obligées de rester dans leur situation d'esclavage et de ne pas le dénoncer aux autorités, à leurs familles», poursuit-elle. Elle ajoute que le rapport d'expert en psychologie, joint à la requête complémentaire, décrit «clairement les énormes dommages que cela leur causerait». Enfin, Belén Luján rappelle au magistrat de la Cour d'instruction n°3 de La Palma que «les quatre femmes ont été juridiquement reconnues comme victimes de la traite des êtres humains, par l'ordonnance du 2 octobre 2018, n° 56/2018 de la Cour centrale d'instruction numéro 1 de l’Audience nationale».

«La balle est encore une fois dans le camp du juge Serrano, bien que les avocats d’AUSAJ sont convaincus que les demandes justifiées qu'ils ont présentées au nom de leurs clientes devront être résolues devant la Cour provinciale ou devant des instances judiciaires supérieures», commente le média local La Mar de Onuba.

Que dit le rapport de la psychologue ?

Esther Sanguiao Olivares, psychologue à Albacete au sein de Caritas Internationalis est une confédération internationale d'organisations catholiques à but caritatif, et experte ayant présenté ses rapports sur l'évaluation psychologiques des saisonnières au tribunal social de Huelva, est revenue avec La Mar de Onuba sur cette question.

Dans une interview parue aussi cette semaine, elle affirme avoir adressé un rapport à la Cour d’instruction de la Chambre n°3 de La Palma del Condado où elle explique la situation psychologique des saisonnières devant témoigner en visioconférence. Pour elle, l'anxiété et le stress ont causé des complications les empêchant de se présenter au tribunal. 

Elle considère également qu’il «n’y a pas de récit de dix femmes, mais de dix femmes victimes d’événements similaires dans le même espace et aux mêmes dates». «Chacune d'elles a une histoire, et derrière chaque histoire, il y a un drame», confie-t-elle.

A propos des femmes qu’elle a évaluées psychologiquement, elle persiste et signe :

«Elles sont toutes diagnostiqués d’un trouble de stress post-traumatique, que chacune a développé de manière personnelle. Certaines présentent des symptômes de phobie sociale, l'une d'elles souffre de dépression avec des idées suicidaires. Le problème est qu'elles n'ont pas reçu de traitement psychologique ou psychiatrique depuis tout ce temps. Elles ne parlent pas entre elles, ce qu’elles n’ont pas pu supporter. À cela s’ajoute un sentiment de culpabilité d’avoir laissé leurs enfants au Maroc… Elles se trouvent vraiment dans une situation très compliquée.»

Esther Sanguiao Olivares, psychologue

Elle ajoute que ces saisonnières «veulent partir» chez elles. «Elles restent ici à attendre une phrase qui leur rende "l'honneur perdu" dans toutes ces circonstances. Mais elles veulent toutes partir», ajoute-t-elle. Elle évoque aussi le cas d’une saisonnière «qui a dû se prostituer pour manger», d’une «tentative de violer une femme enceinte de quatre mois» et d’une «violation avec pénétration vaginale» sur une troisième saisonnière, entre autres. «Les témoignages sont terribles et leurs arguments sont crédibles», précise-t-elle. Et de déclarer qu’elle n’a aucune doute, d’un point de vue professionnel, de ce qui est raconté par les saisonnières marocaines ayant dénoncé des agressions sexuelles présumées.

Pour rappel, les saisonnières marocaines ont essuyé la semaine dernière un autre échec après que leur plainte pour agression sexuelle présumé a été elle aussi classée sans suite par le juge d’instruction de la Chambre n°3 de La Palma del Condado (province de Huelva). Elles ont aussi été éboutées il y a quelques semaines par une cour d’instruction à Huelva sur la plainte pour atteinte aux droits des travailleurs. Mais leur avocate continue son recours auprès des juridictions provinciales.

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