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Grand Angle

Inégalités au Maroc : «Le gouvernement peut faire mieux»

Dans un article intitulé «Inequality in Morocco : An International Perspective» et publié le 23 août dernier par le Policy Center For The New South (PCNS), Uri Dadush et Hamza Saoudi se sont penchés sur les inégalités au Maroc. Les deux chercheurs proposent plusieurs mesures pour permettre au Maroc de «faire mieux» et réduire ces inégalités.

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Photo d'illustration. / Ph. DR
Temps de lecture: 3'

«Le gouvernement peut faire mieux pour réduire les inégalités au Maroc». C’est ce qui ressort d’un article des chercheurs Uri Dadush et Hamza Saoudi, intitulé «Inequality in Morocco : An International Perspective» et publié le 23 août dernier par le Policy Center For The New South (PCNS).

L’article reconnait que «la question est devenue plus pressante ces dernières années, alors que la croissance économique au Maroc a ralenti, passant de 4,3% en moyenne sur la période 2000-2013 à 2,8% au cours des cinq dernières années». Une faible croissance qui se produit malgré des taux d'investissement élevés et qui «reflète une combinaison de capital mal alloué (dépendance excessive à l'égard des investissements publics) et de compétences insuffisantes et mal adaptées», estiment les deux chercheurs.

Mais avant d’arriver aux conclusions, Uri Dadush et Hamza Saoudi estiment que «les inégalités dans les pays en développement comme le Maroc sont généralement plus élevées que dans les pays avancés». Rappelant que le fait que le Maroc soit en développement, l’article note que la croissance économique, lors de cette phase, s’accompagne d’une inégalité croissante alors que lorsque le pays atteint un niveau de développement élevé, les inégalités commencent à diminuer. De plus, «bien que les inégalités restent élevées et stables au Maroc, il est important de reconnaître d'emblée que, reflétant des taux de croissance économique soutenus et modérés, le Maroc a pu ces dernières années progresser de manière significative en matière de développement économique et social tout en réduisant de manière significative la pauvreté», écrivent-ils.

«Toutefois, malgré les progrès réalisés ces dernières années, les inégalités élevées et le faible niveau de vie de la population génèrent beaucoup de frustration. L'inégalité au Maroc est un phénomène particulièrement complexe, car elle reflète les inégalités régionales et entre les sexes ainsi que les inégalités sociales / de revenus.»

Uri Dadush et Hamza Saoudi

L'urgence du système éducatif

Pour mieux comprendre les causes des inégalités au Maroc, les deux chercheurs ont comparé le Maroc à quatre pays en développement plus inégalitaires, à savoir l’Argentine, le Brésil, l’Afrique du Sud et la Turquie et à deux pays plus égalitaires dans la région MENA, à savoir l’Égypte et le la Tunisie. La comparaison inclue aussi la Suède, «considérée comme un exemple de meilleure pratique».

Ils concluent que, «compte tenu du ralentissement de la croissance et des contraintes budgétaires auxquels le Maroc est confronté, les mesures visant à réduire les inégalités devraient, idéalement, favoriser à la fois la croissance et sans nuire au budget, ce qui est une tâche difficile». Néanmoins, ils considèrent que «toute mise en ordre des réformes nécessaires pour réduire les inégalités placerait sûrement une meilleure éducation et un meilleur accès à cette éducation (…) en haut de la liste».

«Les réformes nécessaires ne nécessitent pas nécessairement une augmentation des dépenses, même si cela aiderait, mais une répartition plus équitable de ces dépenses et, surtout, une plus grande efficacité de la gestion du système éducatif public.»

Uri Dadush et Hamza Saoudi

L’article insiste aussi sur «l’amélioration de l’accès au marché du travail de la population féminine, qui devrait être à la fois stimulant pour la croissance et positif sur le plan budgétaire».

Plusieurs mesures à entreprendre

«D'autres réformes peuvent figurer plus bas sur la liste mais pourraient également avoir des effets importants sur les inégalités et améliorer la croissance», suggèrent-ils, en citant notamment «les disparités régionales et sociales dans l'accès à des services de santé de qualité» qui «doivent être réduites». Et d’insister aussi sur l’utilité d’«une politique de décentralisation assortie d’une réallocation correspondante et équitable des dépenses de santé entre les régions du Maroc». 

Pour les deux chercheurs, «des réformes sont également nécessaires pour réduire l’incidence de la corruption qui contribue aux inégalités et à l’inefficacité due à diverses formes de traitement inégal», proposent-ils.

«Le Maroc doit rendre le système fiscal plus progressif en réduisant le recours aux impôts indirects et en augmentant celui des impôts sur le revenu. Cela nécessiterait, entre autres mesures, une amélioration de la perception de l'impôt sur les sociétés.»

Uri Dadush et Hamza Saoudi

Et de suggérer aussi de «veiller à ce que tous les secteurs de l’économie marocaine soient soumis à une forte concurrence», ce qui «contribuera également à faire baisser les prix pour tous les citoyens, à éliminer les excédents de profit, et améliorer l'efficacité et la croissance».  

«Un effort plus systématique pour limiter et réduire les inégalités au Maroc requiert également des données de meilleure qualité et un accès plus libre à celles-ci», concluent Uri Dadush et Hamza Saoudi.

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