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Grand Angle

Saisonnières marocaines en Espagne : Une nouvelle enquête fait état d’autres abus

Après que Buzzfeed News Germany a publié une enquête sur les abus sexuels présumés sur des travailleuses marocaines dans des exploitations de fraises en Espagne, le site El Español en a rencontré d’autres, qui font elles aussi état de chantages pour obtenir des faveurs sexuelles.

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Des saisonnières dans un champ de cueillette des fraises. / Photo d'illustration
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Après l’enquête publiée par deux journalistes pour le média Buzzfeed News Germany, c’est au tour du journal en ligne El Español de tenter de lever le voile sur les abus sexuels et viols présumés dont seraient victimes des saisonnières marocaines dans le sud de l’Espagne. Il rapporte ainsi les témoignages de sept femmes qui disent avoir été victimes de chantage, entre autres, de la part de leurs superviseurs dans les exploitations de fraises de la province de Huelva, en Andalousie.

Dans un article publié samedi 19 mai, El Español revient sur les expériences de ces travailleuses agricoles qui prétendent avoir été agressées par leurs chefs, exploitant ainsi leur vulnérabilité. Habiba*, 37 ans, est l’une d’elles. En avril 2017, alors qu’elle vient d’arriver à la ferme, son supérieur entre dans sa chambre et lui demande de se livrer à des rapports sexuels avec lui, confie-t-elle.

Fatima, 36 ans, a elle aussi son histoire à raconter. Arrivée en mars 2017, cette mère de famille originaire de Beni Mellal affirme que son chef l’a fait chanter après lui avoir confisqué son passeport pour obtenir d’elle des relations sexuelles. Fatima a toutefois réussi à s’échapper à l’aide d’un ami, en amadouant son superviseur et en lui faisant croire qu’ils devaient formaliser leur relation, avant de parvenir à récupérer son passeport.

Chania Rabia, 45 ans, la seule travailleuse à avoir accepté de témoigner à visage découvert, accuse un dénommé Mustapha d’avoir voulu abuser d'elle sexuellement. C’est un proche de son superviseur qui l’a menacée de la renvoyer si elle refusait de coucher avec lui, témoigne cette mère de trois enfants. «Il voulait me violer, c’est pourquoi j’ai quitté la ferme. Je vais le dénoncer», assure-t-elle. A ses côtés, trois autres Marocaines, toutes des mères de famille, âgées de 27 à 39 ans, soutiennent que leurs supérieurs leur ont réclamé des rapports sexuels. Face à leur refus, ils les auraient licenciées.

Rapport médical attestant de blessures

L’enquête du site El Español intervient alors qu’une investigation sur le même sujet a été publiée en avril dernier par Buzzfeed News Germany. Les travailleuses marocaines qu’il a rencontrées affirment avoir été agressées sexuellement, violées et soumises à un chantage. L’une d’elles, Kalima, employée dans une ferme près de la commune de Palos de la Frontera, a affirmé avoir été violée par son supérieur, précisant avoir déposé une plainte le 3 mai 2017.

En réponse à l’enquête publiée par Buzzfeed News Germany, le ministère de l’Emploi et de la formation professionnelle a envoyé une délégation dans la province de Huelva pour enquêter sur les conditions de travail auxquelles sont soumises ces femmes dans les fermes. Samedi 19 mai, il a démenti via un communiqué toute violation contre les ouvrières marocaines, indiquant qu’«aucun cas spécifique d’abus ou de violation à l’encontre des ouvrières marocaines n’a été constaté, ni à l’égard de leurs collègues dans les autres exploitations».

Le ministère a également expliqué que les conditions de travail des ouvrières marocaines «illustrent la conformité du contrat de travail conclu entre les deux parties aux législations nationales en vigueur, et à la convention collective signée entre le gouvernement et les professionnels du secteur de la fraise».

Contacté mardi par Yabiladi, l’une des auteures de l’enquête de BuzzFeed News Germany a fait savoir qu’elle détenait «une copie de la plainte déposée par Kalima auprès du procureur du tribunal de Moguer début mai 2017».

«Nous étions également présentes lorsque la plainte a été déposée et avons la copie du rapport médical faisant état des blessures qu’elle a subies suite à ce viol. Le rapport médical est signé par les médecins de l’hôpital de Huelva», ajoute-t-elle. La journaliste précise toutefois qu’elle n’a pas publié les documents afin que le vrai nom de Kalima ne soit pas divulgué.

(*) Les prénoms ont été modifiés

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