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Grand Angle

Chronique littéraire : Qu'est-ce qu'une maman ?

La maternité apparaît tel un aspect marquant et inéluctable de la vie d’une femme. De ce fait, ce thème demeure très récurent dans la littérature féminine marocaine. Nous avons choisi de réfléchir sur cette thématique à travers la nouvelle de Iman Naciri intitulée «Pardon», en vue de dégager les allures les plus saillantes que revêt ce concept de maternité chez la jeune écrivaine.

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Photo d'illustration. DR
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«Je les ai entendus clouer ton cercueil. L’écho de la chambre vide où ils t’ont donné ton dernier bain intensifiait ma douleur. Je sursautais à chaque coup et les comptait bêtement. Six. Six clous qui me séparent de toi. J’avais l’impression qu’ils s’étaient vissés dans mon cœur.» C’est ainsi que l’écrivaine relate la scène de la préparation de cercueil de son fils. Un adolescent tué dans un accident de route au petit matin «du premier jour du printemps». Quelques fractions de secondes ont largement suffi pour mettre fin à la vie de l’enfant et chambarder celle de la mère.

Une mère c’est la protection, avant tout

«Je me dis que j’ai dû être une mère terrible qui n’a pas su protéger son enfant.» C’est de la sorte que l’écrivaine exprime ce profond sentiment de culpabilité qui la ronge et lui pèse lourdement sur la conscience. Elle se juge responsable de la mort de son fils, alors qu’en réalité elle n’y était pour rien. En fait, au moment du drame, elle n’était pas présente : «Ton père est venu m’annoncer qu’un camion t’avait écrasé alors que tu te dirigeais vers ton collège.» Le devoir de protéger ses enfants, qui colle à la peau de toute mère, fait d’elle une protectrice à part entière de sa progéniture. Et si un malheur vient s’abattre sur sa descendance, c’est que la mère a échoué dans sa mission d’ange gardien. C’est en tout cas ce que ressent l’auteure : «Ton cœur a rejoint celui de ta grand- mère et celui de ta tante. J’espère qu’elles (..) te protégeront car moi j’ai échoué.»

Une mère, c’est le sacrifice !

«J’aurais aimé mourir avant toi. J’aurais préféré que cent camions m’écrasent plutôt qu’un seul ne touche à un cheveu de ta tête», assure l’écrivaine. Qui, hormis une mère, souhaiterait mourir à la place de son fils ? Sacrifier sa vie pour celle de son fils ? Un fils est, d’après l’auteure, le prolongement «du cœur et du corps» de la mère. Le lien qui lie un enfant à sa mère est si fort qu’il finit par dissoudre les deux âmes en un seul corps. Pour l’écrivaine, la vie s’est arrêtée depuis qu’on lui a annoncé la mort de son fils. Désormais, elle est une morte-vivante qui n’existe qu’à travers les souvenirs de son enfant : «Ta chambre est restée comme tu l’as laissée, avec tes cahiers sur ton bureau, le brouillon du dernier exercice de maths, ton pyjama plié sur ton lit, les posters de ton héros sur le mur. Je n’ai jamais voulu y toucher. Je m’y blottis pour sentir ton odeur.»

Une mère, c’est l’amour éternel !

«Je ne trouverai pas le courage de poursuivre sans toi à mes côtés.» Pour la nouvelliste, la vie ne vaut pas la peine d’être vécue maintenant que son fils est parti. «Je respirerai de plus en plus lentement (..) Je me laisserai mourir», songe-t-elle, pour pouvoir rejoindre son enfant chéri. L’usage du futur simple dans tous ces énoncés souligne l’efficacité convaincante de la modalité aléthique qui prouve que la mère ne veut plus vivre. Finalement, seule la mort peut faire revivre l’amour, et le rendre éternel. «Bientôt mon chéri je serai à tes côtés», conclut l’écrivaine.

Nombre de textes considèrent la maternité comme une nécessité infligée à toute femme pour qu’elle soit qualifiée en tant que telle. La maternité se présente alors comme une sorte de légitimation de l’identité sociale féminine. Seul le statut de femme-mère fait d’une femme, une femme accomplie et socialement reconnue. Mais ce n’est pas ça ce qui intéresse Naciri dans sa nouvelle. C’est tout bonnement le vrai amour mère-fils.

Article modifié le 2018/02/22 à 11h37

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