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Grand Angle

France : La retraite des chibanis soutenue par un projet de loi déposé au Parlement

La proposition de loi vise à rétablir au profit des retraités maghrébins les mêmes dispositions que celles dont jouissent leurs concitoyens français installés à l'étranger. Détails.  

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Une proposition de loi a été déposée le 27 janvier 2017 au Parlement français en faveur des chibanis. / Ph. Philippe Delacroix
Temps de lecture: 3'

Les chibanis et les associations qui les soutiennent crient à l'injustice. Aux retraités français venus couler des jours tranquilles au Maroc, qui bénéficient naturellement de la couverture de la sécurité sociale française, s’opposent les retraités maghrébins - marocains en l’occurrence - qui, après des décennies de labeur en France, se voient aujourd’hui privés de cette protection… s’ils restent plus de six mois dans leur pays natal. «Six mois et un jour», tient à préciser Salem Fkire, président de l’association de droit marocain Cap Sud MRE, joint par Yabiladi. Soit un retour exigé tous les 183 jours, quand d’aucuns des retraités français au Maroc ne sont soumis à cette contrainte.

Un même contribuable mais deux fiscalités différentes

«Les retraités marocains sont obligés de revenir en France tous les six mois s’ils veulent continuer à être pris en charge par le régime social français, alors même qu’ils ont cotisé autant que les autres», détaille Salem Fkire. «Ils ont épargné et cotisé toute leur vie pour pouvoir, justement, passer leur retraite dans leur pays natal. C’était leur objectif initial», soutient-il. Sauf que si leur protection sociale française saute, c’est tout un projet qui tombe à l’eau. «Les chibanis sont donc conditionnés à rester en France», insiste le Franco-marocain.

Pour pallier cette «distorsion de droit entre les Français et les non français», l’association Cap Sud MRE vient de donner un coup d’impulsion au dépôt, le 27 janvier, d’une proposition de loi au Parlement français en faveur des chibanis. L’objectif, inscrit à travers trois articles, est qu’ils bénéficient des mêmes dispositions du régime de retraite français, entre autres.

«Tout retraité de plus de 65 ans titulaire d’une carte de résident peut percevoir le droit à la pension de son régime de retraite et son allocation logement pour sa résidence principale sans contrainte d’obligation de durée de séjour sur le territoire français», stipule l’alinéa 1 de l’article 1. «La perception de l’allocation de solidarité aux personnes âgées n’est pas soumise à l’obligation de durée de séjour sur le territoire français», emboîte l’alinéa 2.

«Un retraité de nationalité française et exclusivement française peut, depuis le 01/01/2014 (L.311-9 du Code de la sécurité sociale), résider à l’étranger, hors Union européenne et Suisse, et bénéficier de la couverture de la sécurité sociale sans condition de résidence en France», rappelle d’ailleurs Cap Sud MRE.

Un arsenal législatif censé «réparer une injustice»

Des revendications se font entendre également sur le front du logement et du regroupement familial. «Les conditions de ressources et de logement adéquat concernant le regroupement familial sont abrogés, lorsque la situation de dépendance, perte d’autonomie d’une personne nécessite la présence d’un membre de sa famille pour l’assister», lit-on dans l’aliéna 1 de l’article 2.

C’est que les chibanis, pour pouvoir accueillir leurs proches, doivent disposer d’un logement décent. «On leur demande d’avoir un logement qui leur permette d’accueillir leur famille, sachant que les standards imposent dix à douze mètres carrés par personne. Sauf que leurs habitations, de neuf mètres carrés environ, ne sont évidemment pas assez grandes, sans compter l’insalubrité. Donc en gros, s’ils n’ont pas le logement adéquat, ils ne peuvent pas accueillir leur famille», explique Salem Fkire.

Hormis le combat mené sur le terrain en France, Cap Sud MRE est montée au créneau pour que les revendications des chibanis trouvent un écho favorable auprès des représentants marocains. Entre 2011 et 2015, quatre conventions bilatérales ont été signées entre l’association et quatre partis politiques (le PJD, le PAM, le PPS et l’Istiqlal) et la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM).

«On est pas partisans, mais apolitiques. Peu importe qu’ils soient de gauche ou de droite, progressistes ou conservateurs, on veut mobiliser le plus d’acteurs politiques en France et au Maroc», reprend Salem Fkire. Ce chef d’entreprise de tordre le coup à un poncif qu’il sent d’ores et déjà poindre : «Non, il ne s’agit pas d’une loi pour ‘les-immigrés-qui-profitent-du-système-français’», mais plutôt d’un arsenal législatif censé «réparer une injustice».

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