C’est le débat du moment, l’avortement clandestin au Maroc. Le professeur Chraïbi, fervent défenseur de la cause s’est confronté à une loi «audiovisuelle» pour laquelle il a été démis de ses fonctions. Face au ministre de la Santé El Ouardi, il a eu l’occasion de se défendre ce matin sur Radio 2M, dans l’émission Oui mais non.
Les questions de droits à l’image sont généralement traitées par la HACA (Haute autorité de la communication audiovisuelle). Et pourtant, c’est bien de droits audiovisuels dont parle le ministre de la Santé.
D’après ce dernier, il aurait reçu des plaintes, du médecin interviewé par téléphone et du mari de la femme qui accouche dans le reportage. Même si ces deux avaient donné leur accord- et les journalistes de France 2 en auraient la preuve selon Dr Chraïbi - il ne s’agirait pas d’accord écrits, donc irrecevables.
La journaliste demande alors à El Ouardi, si ces questions ne concernent pas plutôt la HACA et si ce n’était pas aux journalistes d’avoir ces autorisations. «Pourquoi suspendre un médecin ?» demande-t-elle. Le ministre répond qu’en tant que chef de la section, le professeur Chraïbi avait une responsabilité.
Face à l’insistance des journalistes, le ministre de la Santé finit par donner son point de vue. Il dit être d’accord avec l’action de l’AMLAC et de Mr Chraïbi. «Je suis pour la légalisation de l’avortement, mais il faut un débat national.» Débat pour lequel il n’a de date ni précise ni approximative.
«La femme est libre de son corps, mais avec certaines limites. Cela ne devrait concerner (l’avortement – ndlr) que certains cas de viols, d’inceste, de problèmes mentaux, etc.».
Pas qu’une question de droits
Dans le communiqué publié hier par le ministère de la Santé et relayé par la MAP, on apprend que «la commission a jugé que le Pr. Chraibi a commis des violations ayant affecté le bon déroulement du service de Maternité concernant les conditions de tournage du reportage (…)sans respecter le mode de fonctionnement des services hospitaliers, en violation de certains principes éthiques de la médecine, et sans que les parties concernées ne demandent l'autorisation ni de la direction de la Maternité ni du CHU Ibn Sina.»
Hier, le Dr Chraïbi avait justement relevé ce détail, en informant qu’à aucun moment la direction n’avait exprimé le désir de stopper le reportage qui se faisait pourtant devant tout le monde, en plein jour.
Quel avenir pour l’avortement au Maroc
A présent, il faut aller de l’avant et se demander si ce «scandale» servira en fin de compte à quelque chose. Profiter de la popularité du sujet, en ce moment, pour faire passer une loi légalisant l’avortement. A cela El Ouardi répond qu’une loi ne se fait pas ainsi.
«Pour la loi Amina Filali ça a été possible», rétorque le journaliste. «On ne peut pas faire vite et bien», conclut le ministre de la Santé.
Après ce débat, nous pouvons dire que nous n’avons ni promesse de loi, ni certification de débat national. La suspension du professeur Chraïbi servira-t-elle vraiment à faire avancer les choses ?