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Grand Angle

HACA : «Pour des médias libres de stéréotypes sexistes», le manuel de l’audiovisuel égalitaire

La Haute autorité de la communication audiovisuelle (HACA) a présenté, ce vendredi à Rabat, sa publication «Pour des médias libres de stéréotypes sexistes». L’ouvrage se veut un manuel de ressources référentielles, méthodologiques et pratiques en genre et médias, afin de sortir des clichés qui accompagnent le traitement médiatique relatif aux questions des femmes.

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Photo d'illustration / DR.
Temps de lecture: 4'

Face au défi de représentation des femmes dans les médias audiovisuels au Maroc et pour enrichir une perspective égalitaire sur la représentation dans l’espace public médiatique, la Haute autorité de la communication audiovisuelle (HACA) a publié «Pour des médias libres de stéréotypes sexistes». Il s’agit d’un manuel de ressources référentielles, méthodologiques et pratiques en genre et médias, afin de mieux faire connaître les bonnes pratiques du traitement journalistique de la question. Présenté ce vendredi à Rabat, l’ouvrage s’inscrit dans le cadre des réponses aux différentes demandes d’avancement dans le champ de l’égalité et de la parité, au niveau du segment des médias régulés.

Présidente de la HACA, Latifa Akharbach a insisté sur le fait que cette question soit «éminemment démocratique». «Tous les espaces de construction de la citoyenneté doivent être sensibles à la question du genre et de l’égalité. Les médias ont une responsabilité particulière, dans le cadre de la responsabilité sociale, mais aussi du potentiel d’influence», a-t-elle déclaré, soutenant ainsi l’importance de «commencer tôt à inscrire cette question dans l’agenda citoyen, puisque c’est l’affaire de tous, dans la logique d’une responsabilité partagée et dans une convergence des visions».

Un sensibilisation par la transmission des bons usages

Auteure de la publication présentée, Amina Lemrini Elouahabi a déclaré pour sa part que «toute entreprise, toute institution, se doit de contribuer à la mise en œuvre de l’article 19 de la Constitution marocaine, s’agissant de la consécration transversale de l’égalité hommes-femmes dans tous les domaines, selon les prérogatives de chaque institution, y compris dans les médias mais aussi au sein des médias». Selon l’experte, «il est important de légiférer, mais ce n’est pas suffisant». «Il est nécessaire qu’il y ait aujourd’hui une appropriation qui ne se décrète pas, autour de ce sujet ; il est nécessaire que cela passe même par la formation des professionnels des médias», a-t-elle ajouté.

Amina Lemrini Elouahabi a insisté sur les responsabilités partagées, en allant même jusqu’au champ de l’enseignement supérieur. «Il y a beaucoup de choses à faire dans les curricula des établissements de formation journalistique, dans cette logique», a-t-elle soutenu, indiquant ainsi que la question de l’égalité hommes-femmes est «transversale à toutes les autres traitées par les médias : la politique, l’environnement, le climat, l’accès à la santé, l’éducation, la justice, le développement durable…».

Evoquant l’intérêt de cette nouvelle publication de la HACA, la spécialiste a déclaré que la sensibilisation des professionnels était une clé de voûte, espérant que ce guide donnera «plus envie de s’impliquer auprès des collègues, des entreprises médiatiques, ou même auprès des publicitaires et des réalisateurs».

«On ne peut pas se limiter uniquement à reprendre les faits sociétaux, sans passer outre et remplir une fonction d’impact positif sur cette société, en évitant notamment de reproduire des perceptions stéréotypées pour la simple raison qu’elles existent au sein de la société et que les médias reflètent cette dernière. On peut aussi être dans le partage des bonnes pratiques et de la sensibilisation par l’exemple.»

Amina Lemrini Elouahabi

L’interdisciplinarité en réponse au traitement linéaire des inégalités

Dans ce sens, Latifa Akharbach a rappelé que l’espace audiovisuel régulé avait connu une évolution importante dans son traitement des questions relatives au genre et à l’égalité hommes-femmes, notamment dans les médias publics, avec l’apport des comités parité et diversité de Soread 2M et parité de la Société nationale de radiodiffusion et de télévision (SNRT).

Pour autant, «la question des femmes n’est pas encore considérée comme un domaine d’expertise» et l’on assiste donc encore à des traitements qui ne questionnent pas souvent les causes sociétales profondes des inégalités, à travers une approche structurelle. «La victimisation des femmes est une erreur de communication et d’approche. On reste dans des chiffres non contextualisés et non ramenés à la problématique de l’égalité en droits. Or, les conséquences de ces inégalités ne sont pas des faits divers, mais des dysfonctionnements au sein de la société qui méritent analyse et remise en question», a préconisé la présidente de la HACA.

«Dans les études internationales et dans le travail des régulateurs dans le monde, on questionne désormais le mal gaze, la perspective masculine de vision du monde. Afin de lutter contre cette vision réductrice des femmes, il est important de produire de l’information de qualité, que le journalisme de solution soit fort, de façon à aborder les inégalités hommes-femmes au-delà du prisme factuel ou occasionnel. Notre écosystème médiatique gagnera beaucoup de la volonté politique existante pour changer la situation des femmes, ainsi que des dynamiques associatives. Dans cette même logique, il est important aussi d’inscrire la formation académique dans le cadre de ce travail collectif.»

Latifa Akharbach

Amina Lemrini Elouahabi a rappelé, à ce titre, que «chacun a son rôle dans cette construction égalitaire ; une entreprise médiatique ne peut être interpellée uniquement sur ce qu’elle produit comme contenu médiatique qui doit être respectueux de ces valeurs et de ces principes égalitaires». «A travers une pédagogie par l’exemple, il faut qu’elle inscrive cet usage au sein même du fonctionnement de son entreprise, où les femmes n’ont pas à rester cantonnées dans une dynamique stéréotypée qui reproduit les mêmes stigmates que l’on retrouve ailleurs au sein de notre société», a plaidé l’auteure de la publication.

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