Menu

Grand Angle  

France : Condamné à tort pour viol il y a 23 ans, Farid El Haïry veut sa réhabilitation

Issu d’une famille ouvrière franco-marocaine dans le Nord, en France, Farid El Haïry se bat depuis 1998 pour faire reconnaître son innocence. A 17 ans, il est condamné pour une agression sexuelle et un viol qu’il dit ne pas avoir commis, sur une adolescente de 15 ans. Le dossier prend un nouveau tournant, lorsque la plaignante avoue, en 2017, avoir menti pour cacher un inceste.

Publié
Farid El Haïry et son avocat Me Franck Berton / Ph. Lauriane Delanoë - Radio France
Temps de lecture: 3'

La Cour de révision à Paris a commencé à examiner le dossier de Farid El Haïry, jeudi 8 décembre, en vue d’une réhabilitation après sa condamnation pour viol, il y a 23 ans, sur la base de fausses accusations. A 41 ans aujourd’hui, issu d’une famille ouvrière franco-marocaine, il commence une série d’audiences, après que la plaignante a avoué, en 2017, avoir menti pour faire taire l’inceste dont elle dit avoir été victime du côté de son grand frère.

Défendu par l’avocat Frank Berton, Farid El Haïry a plaidé devant les 13 juges de la Cour de révision. L’audience devrait durer une semaine, dans le cadre d’une affaire en voie de devenir «la douzième erreur reconnue par la justice française, depuis 1945», rapporte France 3. Au moment des faits allégués, Farid, installé à Hazebrouck, dans le Nord, a 17 ans. Julie D., 15 ans à l’époque, a porté des accusations contre lui, auprès de la gendarmerie.

Dans le temps, elle mentionne que le viol se serait déroulé en 1998, derrière la piscine d’Hazebrouck. Le jeune homme a toujours plaidé non coupable, mais il a été condamné à cinq ans de prison, dont quatre ans et deux mois avec sursis. Il a déjà purgé sa peine de ferme en détention provisoire. En 2017, la justice décide de réexaminer le verdict, après une lettre de la plaignante au procureur de la république. Tenant son grand frère responsable d’inceste, elle reconnaît s’être enferrée dans son «propre mensonge» pour «protéger [sa] famille».

Sur le plateau de BFM TV, jeudi également, Farid El Haïry a exprimé son espoir que sa famille puisse voir le bout du tunnel, à la fin de cet examen. «C’est moi qui ai été condamné et qui ai fait la prison, mais mes frères et mes parents ont subi tout cela avec moi», a-t-il déclaré, d’autant que ses parents sont en soins palliatifs.

Un dimension de racisme lors des étapes du procès

Le réexamen du dossier est décidé en juillet dernier. «Toute ma vie a tourné autour de ce calvaire», dit Farid El Haïry, cité par France 3. Il est revenu sur les mois passés à la prison de Loos, dans la section des mineurs, en détention provisoire. «L’une des pires des prisons. J’ai souffert», a-t-il dit. «Les calvaires, la prison, les mitards, les tabassages, les bagarres en continu, le regard des gens, les insultes, ma famille détruite, moi détruit… J’avais deux possibilités : mourir et mourir ou mourir et continuer à avancer», dit-il encore.

Invités par ailleurs sur France 5, jeudi, sur le plateau de l’émission C à vous, Farid El Haïry et Me Berton ont évoqué aussi la dimension raciste que prend le procès, dans le temps.«A l’époque des faits, dans ce petit village, quand on parle de Farid, les gens disent 'l’arabe'. Il y a une vraie connotation raciste qui apparait dans l’enquête», a déclaré l’avocat.

Pour sa part, Farid El Haïry se souvient d’un cadre de vie ou se mêlent racisme et luttes d’influence, dans un petit village où tous les riverains se connaissent pourtant. Il cite également le père de famille de la plaignante, un homme influent et un entrepreneur connu localement, selon lui.

Depuis les faits, le nom de Farid El Haïry est inscrit au fichier judiciaire des auteurs d’infractions sexuelles et violentes (Fijais). Il doit ainsi pointer au commissariat tous les ans. «Mais le plus atroce, c’est d’être emprisonné dans sa tête, lâche-t-il. Je me demandais, pourquoi moi ?», indique-t-il. Aujourd’hui, il espère pouvoir «passer à autre chose», à l’issue de ce réexamen. Il souhaite surtout que ses parents «puissent profiter de cette bonne nouvelle», étant de surcroît «gravement malades».

Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com