Les poètes naissent-ils de la matrice du malheur ? Le poète n'est-il qu'un coup de poignard sans remède porté au cœur ? Ou bien suis-je le seul Dont les yeux résument l'histoire des pleurs ?
Je dirai au cours de l'instruction Comment ma biche fut tuée Par l'épée de Abu Lahab, Tous les bandits, du Golfe à l'Atlantique Détruisent, incendient, volent, Se corrompent, agressent les femmes Comme le veut Abu Lahab,
Tous les chiens sont des agents Ils mangent, se soûlent, Sur le compte de Abu Lahab, Aucun grain sous terre ne pousse Sans l'avis de Abu Lahab Pas un enfant qui naisse chez nous Sans que sa mère un jour N'ait visité la couche de Abu Lahab, Pas une tête n'est décapitée sans ordre de Abu Lahab
La mort de Balkis Est-elle la seule victoire Enregistrée dans toute l'Histoire des Arabes ?
Balkis, ô ma bien aimée, bue jusqu'à la lie !
Les faux prophètes sautillent Et montent sur le dos des peuples, Mais n'ont aucun message !
Si au moins, ils avaient apporté De cette triste Palestine Une étoile, Ou seulement une orange, S'ils nous avaient apporté des rivages de Ghaza Un petit caillou Ou un coquillage, Si depuis ce quart de siècle
Ils avaient libéré une olive Ou restitué une orange, Et effacé de l'Histoire la honte, J'aurais alors rendu grâce à ceux qui t'ont tuée O mon adorée jusqu'à la lie ! Mais ils ont laissé la Palestine à son sort Pour tuer une biche !
Balkis, que doivent dire les poètes de notre siècle ! Que doit dire le poème Au siècle des Arabes et non Arabes, Au temps des païens, Alors que le monde Arabe est écrasé Ecrasé et sous le joug, Et que sa langue est coupée.
Nous sommes le crime dans sa plus parfaite expression ; Alors écartez de nous nos œuvres de culture.
O ma bien aimée, ils t'ont arrachée de mes mains, Ils ont arraché le poème de ma bouche, Ils ont pris l'écriture, la lecture, L'enfance et l'espérance. Balkis, Balkis, ô larmes s'égouttant sur les cils du violon ! Balkis, ô bien aimée jusqu'à la lie ! J'ai appris les secrets de l'amour à ceux qui t'ont tuée, Mais avant la fin de la course, Ils ont tué mon poulain.
Balkis, je te demande pardon ; Peut être que ta vie a servi à racheter la mienne Je sais pertinemment Que ceux qui ont commis ce crime Voulaient en fait attenter à mes mots.
Belle, dors dans la bénédiction divine, Le poème après toi est impossible Et la féminité aussi est impossible.
Des générations d'enfants Continueront à s'interroger sur tes longues tresses, Des générations d'amants Continueront à lire ton histoire O parfaite enseignante ! Les Arabes sauront un jour Qu'ils ont tué une messagère QU'ILS…ON….TU…E…UNE….MES…SA…GERE
Avec le fleuve cet automne cette pierraille et ces faibles nuages J'ai consacré toute une matinée dans la morosité d'un arrière-goût de perte à scruter une immensité déferlant depuis les rochers Des légions d'air ont accouru Des foyers de sommeil successifs s'accumulèrent à mon genou Bruissement de feuilles Ton calme est le premier à m'avoir enseigné comment en toi s'apaisent les tempêtes Voici un semblant de brouhaha au passage furtif Des variétés de pierre à chaux parsemées au milieu des végétaux La ronde des oiseaux autour d'une chose qui tient de l'obscurité Le nuage qui modifie sa position Une langue que j'ai failli entendre balbutier La transparence qui s'éloigne
Mohammed Bennis
Modifié 1 fois. Dernière modification le 17/03/10 23:38 par oryct2010.
Badr Chakir Al-SayyabMes funérailles ont lieu dans la nouvelle chambre où j'ai pris mes quartiers. Un long cri est lancé :" Ecris le poème! " J'écris ce que charrie mon sang, je barre, je rature, jusqu'à ce que l'idée têtue acquière enfin la souplesse voulue. Ma nouvelle chambre est vaste, plus vaste en tout cas que ne sera mon tombeau. Si la fatigue me saisit en plein éveil,le sommeil n'en prend que plus de saveur. Il jaillit jusque des orbites creuses de la pierre, jusque de la cheminée solitaire en son angle rencognée . Le cri des obsèques arides, usées, rapiécées jaillit de la haute bouche et tombe joyeusement le long des murs, caressant avec allégresse le miroir, les bouteilles. Pourquoi tous ces recoins demeurent- ils dans l'ombre, comme la terre pour l'homme impatient de briser cette chaîne à force de vin et d'or et de beautés femelles, à force de mensonges en son coeur, sur sa langue, dans son désir de ramener tout excès à l'immobilité d'une eau dormante? Et la face du miroir, qu'a-t-elle à offrir sinon son désert, en l'absence d'une beauté aux lèvres de corail éclairées par deux yeux où danse l'attendrissement des soirs? Beauté aux seins pour moi dénudés! Comme ce miroir, la terre un matin se montrera sans vie. Et dans les nuits livrées à l'obscurité totale, à l'heure même du repos, seuls les vents lanceront leurs abois! Dieu alors, craignant l'ombre des défunts, tirera la mott à lui et s'y endormira, comme on s'enveloppe dans la couverture épaisse au long des nuits d'hiver. Le poète est ainsi à l'heure où jaillit le poème. Il ne le voit pas battre son rythme d'éternité. Il détruira ce qu'il aura bâti, il éparpillera les pierres de son édifice, puis les enfouira sous la cendre du silence et du repos. Lorsque lui viendra une idée nouvelle, il la tirera vers lui comme un voile où se perdront ses yeux. Si le passé doit faire retour sur nous, qu'il soit détruit : car les choses ne croissent et ne lèvent que sur leurs cendres consumées jetées à tous les vents de l'horizon... Ainsi naît le poème !
La chambre a sa porte close, le silence est profond, les rideaux tirés de ma fenêtre tombent jusqu'au sol. Il se peut que la rue prête l'oreille pour m'écouter, pour me guetter derrière la fenêtre. Et mes habits, tels ceux d'un épouvantail planté en plein champ sont noirs. La porte close leur a donné une âme. Elle a enfoui en eux des lambeaux de sentiments; elle va les réveiller de cette mort qui les tient, et les voilà prêts à me chuchoter à l'oreille, dans le silence profond: " Il ne reste plus un seul ami, pour venir te visiter dans la nuit terne, et la chambre a sa porte close." J'ai revêtu mes habits comme en un rêve et je me suis faufilé dans la nuit : viendra certainement à ma rencontre ma mère dans cette terre des morts, là-bas,par ses enfants abandonnée. Et elle me dira: " Où cours-tu ainsi en cette nuit aveugle sans même un ami? Tu as faim? Veux-tu goûter avec moi les caroubes du champ des morts? L'eau, tu l'aspireras à brèves gorgées du sein de la terre. Ne vois-tu pas dans quel état sont tes habits? Prends donc ce bout de drap arraché à mon linceul! C'est une étoffe que le temps même ne saurait user. C'est `Azrîl, l'Ange de la Mort, qui l'a tissée, et viendrait-elle à se fatiguer qu'il la raccommoderait! Allons, viens-t'en chez moi dormir: j'ai préparé une place dans ce lit profond pour toi, qui m'es plus cher encore que le désir, ce désir que les morts conservent du soleil et de l'onde paresseuse... ce désir qui attend l'heure où le chant du coq viendra sonner à tous les horizons au Jour de la Résurrection! " Alors je m'en irai par les chemins du rêve alors je marcherai vers l'ultime rencontre et celle qui viendra sera encore ma mère!
et de l’autre côté la nuit foule déjà sous ses pieds
le Maroc.
Dante
I
L’aube
rien qu’une aurore pour l’apparition de ces dunes mal arrimées qu’une rétine vague avance à mon insu espace d’envol d’ultimes paraboles esquisse dans les fièvres de soleils rétrécis
c’est surgis d’entre les rêveries que m’émeuvent ici le feuillage et son écrit en ornement qui s’exténue rétention de passereaux sur les murs du délirium régions mortes d’autres périphéries
rien qu’une aurore extension de moi-même au hasard des nues au paroxysme de la nuit niée y compris celle dont je m’affranchis mes phalanges blêmes pour mesurer sa trace ont capturé des lieux que de jour le corps hallucine
Si j’avais la lampe de notre seigneur Aladin et j’avais invoqué un Djinn je lui demanderais trois vœux
1. le cheval du vent 2. le livre 3. le canon laser
Tu me répliqueras (sûrement !) j’ai compris ton cheval volant et les livres le malheur c’est les canons Le canon laser Comme si tu étais l’excellence général Tommy Franks
***
Les oiseaux ne tarderont pas à dormir. Au muraille, une pigeonne s’absentera aussi. L’herbe est devenu bleu. Aux entrelacements de l’horizon, le lac scintille, son eau crépusculaire est au couleur de plomb. Mon jardin s’apprête au sommeil ...les corolles délicates se replient. Les couleurs perdent leurs éclats.Le dernier cri des morillons. Mon miroir est opaque.
***
Jamais! Mon ami ne m’a dit quelque chose sur le cheval du vent. A-t-il associé les objets aux poètes ? c’est-â-dire à la vanité et à l’idiotie…peut-être. En revanche, je suis au comble de ma raison : le cheval volant =l’ultime échappatoire. Je ne t’ai jamais raconté ce que m’a fait les aéroports des capitales ? Ne t’ai-je jamais dit comment j’étais séquestré pendant des jours comment j’étais soumis à des interrogatoires dans un certain aéroport
***
Vient le soir… Mais le soir nous surprend ,instantanément, sombre comme s’il était une roche de basalte noire se jetant à notre cou pour nous étrangler et étouffer notre souffle dans un lendemain. Les rêves nous guideront ainsi qu’un chameau. Nous serons des morts ou des bergers… Dans le désert : les loups tentent les arbres. Peut-être, ils les grimperont. Où est notre salut ? Dans la nuit l’ombre de la nuit.
***
Jamais ! Mon ami n’a songé aux hypothèses du livre. Comme si le fait de citer le livre est le livre ou l’écriture… nous sommes une tribu nous n’avons rien fondé pour que nous soyons .Notre pays s’est érigé sur du sable et des fleurs de ce sable nous sommes venus. Des odeurs nous emporterons loin de nos origines et nous jetterons sur une terre sans terre et nous déroberons nos dernières feuilles vertes. Pauvres que nous sommes Sans le livre
***
A l’aube, fou parmi les oiseaux aventurant dans les premiers gazouillements je me suis éveillé ce matin pareil à tous les jours. Les bois étaient dormants, j’aperçois entre les branches du châtaignier les premiers bourgeons enfermés sur leurs secrets. Les pigeons regagneront leurs nids et l’écureuil sursaute du haut d’un grand cerisier. Là-bas, dans l’aéroport militaire atterrit un avion. Est-il venu des environs de Bassora ? L’olivier a surmonté les épreuves de l’hiver et a argenté ses feuillets. J’ai préparé la table à ceux qui ne méritent pas l’éloge.
***
Et tu me demandera sans doute : et les canons ? -tu veux dire le canon laser ? -assurément -crois les informations ? Je veux dire penses-tu qu’un homme distrait et tremblant comme moi va porter un canon ? -mais c’est ce que dit ton poème … ……………………… ……………………… ………………………
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Oui ! Et puisque je n’excelle pas le tir, je vais bâtir la rampe de lancement dans les élévations du désert hadramawt D’où je donnerai les ordres aux djinns. Les champs de bataille (mille parmi tous les cordonnés) le huppe va me les apprendre. Les feux (Sorte de rayons bleus) Tourneront comme les abeilles… Prenez garde ! Quiconque a caché la vérité sera la cible… Prenez garde !
Viens pour rêver, le beau jour est là La tendresse de la nuit et les joues des étoiles Nous appellent. Viens pour chasser les visions, compter les files De la lumière, Et pour faire les dunes des sables, Des témoins de notre amour.
*
Nous allons marcher ensembles sur la poitrine de notre île Éveillé … Nous allons laisser sur le sable, les traces de nos pas vagabonds Le jour viendra, et jettera ses moites froides Et fera paraître où nous rêvé, au moins, une rose.
*
Nous allons rêver que nous sommes allés voir Les montagnes de la lune Et nous allons jouer Dans l’isolement de l’infini vide des hommes. Loin, loin, jusqu’où personne Ne pourra venir nous voir. Car nous serons derrière L’étendu des pensées
*
Nous allons rêver que nous sommes Devenus des enfants sur les dunes. Innocents, nous courons sur les roches Et guidons les chameaux. Des vagabonds, sans foyers sauf une hutte d’imagination Et quand nous dormirons, nous plongerons nos corps Sur les sables.
*
Nous allons rêver que nous marcherons vers Le passé, non vers l’avenir. Et nous avons arrivé à Babylone, Au lever du soleil très frais Deux amoureux, nous portons le pacte De notre amour jusqu’au temple Et un prêtre dont la main est propre, nous bénit.
Son absence sera longue, livrée au froid dont la morsure, là-bas, en Oécident, est de celles que nul ne supporte. O toi, la mère, rassemble donc toutes les couvertures de selle que tu pourras trouver et fais-lui tes adieux, ce gage déposé entre des bras amis : offre-lui, oui, ce châle par tes mains tissé le soir, entre l'attente du retour du cher petit et le conseil murrnuré par le chaudron sur le foyer. Oui, son absence sera longue, et la morsure du froid, là-bas, est de celles que nul ne supporte... O toi' la mère, ne sais-tu pas qu'il est pour lui temps de partir? Garde-toi d'oublier de joindre à son bagage ses bas de grosse laine, toute à la fièvre de l'étreinte... Allons, sois forte, le cher petit, tu le sais bien, ne supporte plus les plaintes.
C'est ainsi. Depuis la mort du père, les plaintes il ne les supporte plus. L'entrée du port est cette issue de la maison qui donne sur la rue: les mouchoirs agités à l'instant de l'adieu ne dépasseront pas le seuil. Et toi, la mère, tu chercheras refuge ensuite dans quelque coin de la maison et tu verseras tes larmes de ces larmes qui brûlent. Mais ta n'iras pas au port car ce n'est point là que guérit la peine attachée à la séparation. Nombreux seront là les voisins, les amis, tous ceux qu'il aime... Laisse-le, ô toi, la mère, et sache que bientôt, juste à l'heure de sa dernière foulée sur cette terre aveugle, le flux de son haleine sera tout entier aspiré par les deux poumons de son frère. Oui, de l'un à l'autre le souffle passera avec cette force que tu sais, que tu espères oui, cette haleine viendra s`insinuer au creux des poumons de son frère...
***
Depuis qu'il a dit " Je vais partir ", tu n'as trouvé de saveur à aucun aliment, anéantie par la tristesse. Tu as pleuré au long des nuits, pleuré en silence, les yeux grands ouverts sur la fosse des ténèbres. O comme ton fier visage a cédé à présent à la lente approche des rides ! Chaque heure depuis lors te fut comme une année, et ton corps fatigué en accuse la trace.
Les ruisseaux de ton coeur, aucune eau vive ne les vient plus irriguer et tes lèvres se sont desséchées. " O Seigneur mien, pour qui l'ai-je donc élevé au long de ces vingt ans? Entends-tu, ô Seigneur mien : pour qui, au long de ces vingt ans? " Tu n'as jamais compris au nom de quoi Il assène de tels coups sur nos pauvres murs. Tu n'as jamais compris au nom de quoi encore Il jette ces noires clameurs... O mère, tu le sais, ce serait pour nous un suicide que de rester sur cette terre ! Les vers rongeurs se sont emparés de mes livres, et la mort toujours plane à l'horizon de mon coeur. Mère! j'ai passé le plus clair de mon temps à moudre de l'eau au fond des cafés, a essuyer les tables de tous les lieux voués au plaisir des autres. J'ai été chassé de toutes les portes l'une après l'autre; et mes semelles et mes haillons sont partis en lambeaux. On m'a injurié, on m'a crié partout que j'étais inutile. On a fait guerre à mon honneur et j'ai bu jusqu'à la noire ivresse, soutenu par les épaules de mes compagnons, et j'ai pleuré dans ma triste fange, et j'ai pleuré sur mu honte. Et au bureau d'embauche on n'avait que ces mots: Attendre... attendre.. attendre... Ah, le regard de ce fumeur de cigare écorchant mon nom du haut de son mépris!... Mère, je vais partir : tourner en rond me fend la tête. Oui, je vais partir!
Que la phtisie, que le déluge s'installent ici et avec eux l'incendie! Mais cela, non, je ne puis plus le supporter davantage!
L' Emigré a chargé sur son dos ce qu'il a pu prendre et il est parti. Gloire à Celui qui nous accorde d'avoir des enfants et qui les rappelle à Lui! Tu as pleuré au long des nuits, pleuré en silence, les yeux grands ouverts sur la fosse des ténèbres. Tu ne comprenais pas... et ton petit non plus ne savait pas que sa chemise râpée, tant qu'elle battrait au vent de la peine et de la détresse, avec elle battrait aussi le drapeau du retour. Alors explique à son frère qu'il n'est pas pire souillure que d'en être réduit à vendre la terre humide où gît son père. Mais dis-lui aussi que la force qui pousse la vie à sortir de la graine semée est plus dure que le roc; dis-lui que nos racines plongent loin dans le sein de cette terre... et que notre chemise râpée, tant qu'elle battra au vent de la peine et de la dérresse, avec elle battra aussi le drapeau du retour, avec elle battra aussi le drapeau du retour ....
1 Je n'ai pas conquis le trône par le tranchant de l'épée Je l'ai hérité de mon vingt-septième ancêtre (si toutefois l'adultère ne s'en est pas mêlé Mais je ressemble au portrait de Cet ancêtre exécuté par son peintre son peintre qui fut l'amant de la reine)
2
Le palais de mon père est dans la forêt du draqon Il regorge d'hypocrites, de guerners et de précepteurs Parmi eux il y a les précepteurs du fidèle Georgias sodomite chrétien
3
«L'eau du fleuve est-elle tout le fleuve? E tait-il dans le vrai, Socrate, lorsqu'il a bu le poison sans faiblir? Le mort entend-il les prières de ses proches quand on le met dans la tombe? La femme est un pièg tendu, n'oublie pas mon conseil quand tu l'approches
Ne lui fais pas confiance, mêrne quand ses seins et ses cuisses te servent dg couche».
4
Malgré ses consignes, les femmes concubines de mon père - lorsque ce dernier devenait fou au cours de la nuit - venaient me rejoindre, me faisaient l'amour jouaient avec moi
Elles me révélaient les secrets que mon père leur confiait
lorsque son sang bouillonnait, puis se calmait dans la mêrne soif
et qu'il retirait ses habits Ou lorsque les devins lui prescrivaient des remèdes et qu'il remerciait son dieu car son désir avait été couronné par une pollution bienfaisante Un soir, la médecine se révéla impuissante Malqré l'art extraordinaire des devins mon père est mort et les larmes coulaient, coulaient sur ses joues Dans sa main il tenait le bout d'une étoffe de soie
5
Le roi conquérant est mort g Le roi pieux est mort g s'ègosillèrent les crieurs de notre ville Les poètes se mirent en rang devant la porte et les vers tombèrent par mille pleurant le roi pur jusque dans la mort et glonfiant les qualités de son successeur le roi juste Il y eut une teUe variété de tons g Voix désemparée: «Hommages ayant effacé les récentes condoléances» Voix réjouie « ? peine l'affligé s'est-il renfrogné qu'il a soung» Voix allègre: « Tu es un croissant éclatant aux couleurs des fleurs» Voix affiigée: «Ton père, telle la lune, resplendissait dans les cieux» Voix furieuse: «Tu es comme le lion des forêts partageant ses soucis» Voix entrecoupée de larmes «Le roi défunt était encore un lion» Voix remplie de joie «Tu es le nuag dispensant le bien en tout temps» Voix débordant de tristesse «Ton père était la lune répandant la prospérité »
Voix ô l'aise jusqu'au moment oû elle en arriva à la rime en «ment» «Longue vie à toi, fils d'une lignée valeureuse vertueuse, donnant généreusernent Béni celui qui a grandi... etcg» (Comme elle est pénible, cette rime Ce poète ne se taira pas avant d'avoir épuisé tous les «ment»)
6
Si j'étalais tous mes doutes vous diriez que je suis fou «Le roi est fou » Mais je cherche la certitude ? l'audience du matin, je suis couronne et sceptre froncement de sourcils et sourire avare ou plutôt sourire relayé par deux gnmaces chaque chose en son temps Mais dans mon alcôve je suis un homme J'ai si peur quand la nuit montre sa tête j'ai Si peur du désarroi de mes idées vagabondes Je te cherche dans tous les replis, ô mon aimée voilée ô poignée perdue de pureté Te caches-tu dans le corps ? Je le tords pour qu'il se dresse et quand il arrose il se met à l'écart et ne répond plus Une heure aprés, la soif le reprend comme Si tout ce dont il s'était abreuvé n'était que mirage et écume Te caches-tu aux confins de la coupe du haschisch et de l'opium? Comme dit le poète paria
« S'il n'y avait pas le haschisch et l'habitude de l'o... (il veut dire l'opium) je serais submergé par le malheur et l'ennui » J'ai mêlangé tant de coupes avec d'autres coupes j'ai mis du vert avec du noir avec du feu j'ai respiré le mélange de condiments et j'ai plongé dans la mer lorsque j `ai vu de mes propres yeux un oiseau avec une tête de sing Et quand il a voulu prononcer un mot c'est un broiement qu'il a émis JI avait une queue d'âne J'ai n ô me faire mal aux côtes puis je me suis assoupi Je me suis vu en réve, conduisant un char tiré par quatre pouliches qui me faisaient parcourir des vallées et des déserts Brusquement, elles se transformèrent en chats
qui marchaient à reculons et me regardaient de travers Leurs yeux devinrent étoiles
Comment s'appelle-t-elle, cette étoile... L'étoile Polaire l'ours polaire blanc Mes chats se transformèrent en ours
Des fantômes Comme le nombre Du sable Fatigués par le sens Et le non-sens Dans la fièvre de la recherche Et l’étourdissement du refus Quelques uns d’eux Descendent ou montent Du ventre de la terre En espérant de la résurrection Quelques uns d’eux : Celui qui pleure/vacille /rit Hurle comme un loup Et cache par son journal Une figure lasse En disant au revoir À la lumière du jour qui passe Change la mémoire d’hier Avec une autre Et parle à un homme inconnu Dans l’obscurité. Celui qui délire/pâtir par la faim /prend Des livres jamais lus. Celui qui joue de la musique/ mendie Récite de la poésie et regarde l’infini Celui qui veut une chose Qui ne se réalise pas Et les fantômes terrestres restent Descendent ou montent Dans le tunnel noir
Qu'il en soit ainsi... Que faire d'autre sinon réprouver la mort, consumer les larmes des chansons en sang et en pleurs et dénuder l'olivier de toutes ses fausses branches.
Si je chante la joie enfouie sous les paupières des yeux qui ont peur, c'est que la tempête m'a promis du vin, de nouveaux verres à trinquer et des arcs-en-ciel. . C'est aussi parce que la tempête a balayé sur les troncs des augustes arbres, la voix des oiseaux indolents et les branches mensongères.
Qu'il en soit ainsi... Que faire d'autre sinon te magnifier, Ô plaie de la ville Ô toile d'éclairs illuminant nos tristes nuits. Quand la rue m'agresse, tu me protèges des ténèbres et des regards hargneux.
Je continuerai de chanter la joie enfouie sous les paupières des yeux qui ont peur car le jour où la tempête s'est déchaînée sur mon pays, elle m'a promis du vin et des arcs-en-ciel.
Alors al-Mitra dit : Parle-nous de l'Amour. Il leva la tête et regarda la foule sur laquelle un grand silence s'était abattu. D'une voix assurée, il dit: Quand l'amour vous fait signe, suivez-le, Bien que ses chemins soient raides et ardus. Et quand il vous enveloppe de ses ailes, cédez-lui, Même si l'épée cachée dans ses pennes vous blesse, Et quand il vous parle, croyez en lui, Même si sa voix brise vos rêves comme le vent du nord dévastant un jardin. Car si l'amour vous couronne, il vous crucifie aussi. Et s'il est pour votre croissance, il est aussi pour votre élagage. De même qu'il s'élève à votre hauteur pour caresser vos plus tendres branches frémissant dans le soleil, Il descend jusqu'à vos racines et les secoue de leur adhérence à la terre. Telles des gerbes de blé, il vous ramasse et vous serre contre lui. Il vous vanne pour vous dénuder. Il vous tamise pour vous libérer de votre enveloppe. Il vous pile jusqu'à la blancheur. Il vous pétrit jusqu'à vous rendre malléables; Puis il vous assigne à son feu sacré afin que vous deveniez pain sacré au festin sacré de Dieu. Tout cela, l'amour vous le fait subir afin que vous connaissiez les secrets de votre coeur et, au travers de cette connaissance, deveniez fragment du coeur de la Vie. Mais si, pusillanimes, vous ne recherchiez que la paix de l'amour et sa volupté, Mieux vaudrait pour vous couvrir votre nudité et sortir de l'aire de l'amour, Pour pénétrer dans le monde sans saisons en lequel vous rirez, mais pas de tout votre rire, et pleurerez, mais pas de toutes vos larmes. L'amour ne donne que de lui même et ne prend que de lui-même. L'amour ne possède pas et ne saurait être possédé. Car l'amour suffit à l'amour. Lorsque vous aimez, vous ne devriez pas dire : "Dieu est dans mon coeur", mais plutôt : "Je suis dans le coeur de Dieu." Et ne croyez pas qu'il vous appartienne de diriger le cours de l'amour, car c'est l'amour, s'il vous en juge dignes, qui dirigera le vôtre. L'amour n'a d'autre désir que de s'accomplir. Mais si vous aimez et ne pouvez échapper aux désirs, qu'ils soient ceux-ci: Vous dissoudre et être comme l'eau vive d'un ruisseau chantant sa melopée à la nuit, Connaître la douleur d'une tendresse excessive, Recevoir la blessure de votre conception de l'amour, Perdre votre sang volontiers et avec joie, Vous réveiller aux aurores, le coeur ailé, et rendre grâces pour une nouvelle journée d'amour, Vous reposer à l'heure du méridien et méditer l'extase de l'amour, Revenir à votre foyer le soir, avec gratitude, Puis vous endormir avec au coeur une prière pour l'être aimé et sur vos lèvres un chant de louange.
DU MARIAGE
Al-Mitra reprit la parole. Elle demanda : Maître, que dire du Mariage? Il répondit: Ensemble êtes-vous nés et ensemble resterez-vous pour toujours. Quand les blanches ailes de la mort éparpilleront vos jours, vous serez ensemble. Oui, vous serez ensemble dans la mémoire silencieuse de Dieu. Mais qu'il y ait des espaces dans votre entente. Que les vents des cieux puissent danser entre vous. Aimez-vous, l'un l'autre, mais ne faites pas de l'amour un carcan: Qu'il soit plutôt mer mouvante entre les rives de vos âmes. Remplissez, chacun, la coupe de l'autre, mais ne buvez pas à la même. Donnez-vous l'un à l'autre de votre pain, mais ne partagez pas le même morceau. Chantez et dansez ensemble, et soyez joyeux, mais que chacun demeure isolé, Comme sont isolées les cordes du luth, bien que frémissantes de la même musique. Donnez vos coeurs, mais pas à la garde de l'autre, Car vos coeurs, seule la main de Dieu peut les contenir. Et dressez-vous ensemble, mais pas trop près l'un de l'autre: Car les piliers du temple se dressent séparément, Et le chêne et le cyprès ne peuvent croître dans leur ombre mutuelle.
DES ENFANTS
Et une femme qui portait un enfant dans les bras dit: Parlez-nous des Enfants. Et il dit : Vos enfants ne sont pas vos enfants. Ils sont les fils et les filles de l'appel de la Vie à elle-même, Ils viennent à travers vous mais non de vous. Et bien qu'ils soient avec vous, ils ne vous appartiennent pas. Vous pouvez leur donner votre amour mais non point vos pensées, Car ils ont leurs propres pensées. Vous pouvez accueillir leurs corps mais pas leurs âmes, Car leurs âmes habitent la maison de demain, que vous ne pouvez visiter, pas même dans vos rêves. Vous pouvez vous efforcer d'être comme eux, mais ne tentez pas de les faire comme vous. Car la vie ne va pas en arrière, ni ne s'attarde avec hier. Vous êtes les arcs par qui vos enfants, comme des flèches vivantes, sont projetés. L'Archer voit le but sur le chemin de l'infini, et Il vous tend de Sa puissance pour que Ses flèches puissent voler vite et loin. Que votre tension par la main de l'Archer soit pour la joie; Car de même qu'Il aime la flèche qui vole, Il aime l'arc qui est stable.
La Vie est comme une île perdue dans l'océan de la solitude, une île dont les rochers seraient nos espérances, et les arbres nos rêves, dont les fleurs seraient notre solitude et les ruisseaux nos aspirations.
3Votre Vie, ami, est une île séparée de toutes les autres îles et régions. 3 Quel que soit le nombre de bateaux qui quittent vos rivages pour d'autres pays, quel que soit le nombre de flottes qui y accostent, 3vous serez à jamais une île séparée, souffrant les affres de la solitude et aspirant au bonheur. 3 Les autres hommes ne vous connaissent point et ils sont loin de compatir à votre solitude ou de vous comprendre.
Je t'ai aperçu mon frère quand, assis sur ton monticule d'or, tu te réjouissais de tes richesses.
Tu étais fier de tes trésors et ancré dans la conviction que chaque poignée d'or amassée tisserait un lien invisible entre les désirs et les pensées d'autrui et les tiens propres.
Dans mon imagination tu apparaissais en grand conquérant, conduisant ses troupes à l'assaut des forteresses de l'ennemi.
Mais quand à nouveau je regardai, je ne vis plus qu'un coeur solitaire se languissant derrière ses coffres d'or, qu'un oiseau affamé dans une cage dorée à la mangeoire vide.
Mon frère, je t'ai vu alors que tu étais assis sur le trône de la gloire.
Tout autour, le peuple t'acclamait comme sa majesté.
Il chantait les louanges de tes actes et magnifiait ta sagesse.
Les yeux étaient fixés sur toi comme sur un prophète et les chants des esprits réjouis montaient jusqu'à la voûte céleste.
Lorsque tu regardais tes sujets, je distinguais dans ton regard les signes du bonheur, de la puissance et du triomphe, tu paraissais être l'âme de leur corps.
Mais, quand à nouveau je regardai, tu étais seul dans ta solitude.
Debout près de ton trône, tu te tournais dans toutes les directions, les bras tendus, comme un exilé qui demanderait grâce et miséricorde à d'invisibles fantômes ou qui mendierait un abri, ne serait-ce que celui pouvant offrir chaleur et amitié.
Mon frère, je t'ai vu aimer une femme merveilleusement belle et poser ton coeur sur l'autel de sa beauté.
Quand je la vis te regarder, les yeux empreints de tendresse et d'amour maternel, je me dis: « Puisse vivre longtemps l'amour qui a chassé la solitude du coeur de cet homme et l'a uni à un autre coeur. »
Hélas, quand à nouveau je regardai, dans ton coeur aimant la solitude était enclose !
Il révélait tout haut ses secrets à la femme aimée, en vain.
Car, derrière ton âme pleine d'amour, je distinguai une autre âme solitaire.
Elle ressemblait à un nuage errant que tu eusses voulu transformer en larmes coulant dans les yeux de ta bien-aimée...
Mon frère, ta vie est comme une maison isolée, loin de toute demeure humaine.
Une maison où aucun regard étranger ne peut pénétrer.
Si elle était privée de lumière, la lampe e ton voisin ne pourrait l'éclairer.
Si elle était sans vivres, les garde-manger de tes voisins ne pourraient lui en procurer.
Si elle s'élevait dans le désert, tu ne pourrais la transporter dans le jardin d'autres hommes, labouré et cultivé par d'autres mains.
Si elle était construite au sommet d'une montagne, tu ne pourrais la descendre dans la vallée, parcourue par le pas d'autres hommes.
Mon frère, la vie de l'esprit s'écoule dans la solitude, et n'y aurait-il cette solitude et cet isolement, tu ne serais point ce que tu es, ni moi ce que je suis.
Sans cet isolement et cette solitude, j'arriverais à croire en entendant ta voix que c'est ma voix qui parle, ou en voyant ton visage que c'est le reflet de moi-même dans un miroir.
Khalil Gibran
Modifié 1 fois. Dernière modification le 18/03/10 11:53 par oryct2010.
Vous serez vraiment libres non pas lorsque vos jours seront sans soucis et vos nuits sans désir ni peine,
Mais plutôt lorsque votre vie sera enrobée de toutes ces choses
et que vous vous élèverez au-dessus d'elles, nus et sans entraves.
Et comment vous élèverez-vous au-dessus de vos jours et de vos nuits sinon en brisant les chaînes qu'à l'aube de votre intelligence vous avez nouées autour de votre heure de midi ?
En vérité, ce que vous appelez liberté est la plus solide de ces chaînes, même si ses maillons brillent au soleil et vous aveuglent.
Et qu'est-ce sinon des fragments de votre propre moi que vous voudriez écarter pour devenir libres ?
Si c'est une loi injuste que vous voulez abolir, cette loi a été écrite de votre propre main sur votre propre front.
Vous ne pourrez pas l'effacer en brûlant vos livres de lois ni en lavant les fronts de vos juges, quand bien même vous y déverseriez la mer.
Et si c'est un despote que vous voulez détrôner, veillez d'abord à ce que son trône érigé en vous soit détruit.
Car comment le tyran pourrait-il dominer l'homme libre et fier si dans sa liberté ne se trouvait une tyrannie et dans sa fierté, un déshonneur ?
Et si c'est une inquiétude dont vous voulez vous délivrer, cette inquiétude a été choisie par vous plutôt qu'imposée à vous.
Et si c'est une crainte que vous voulez dissiper, le siège de cette crainte est dans votre coeur, et non pas dans la main que vous craignez.
En vérité, toutes ces choses se meuvent en votre être dans une perpétuelle et demi-étreinte, ce que vous craignez et ce que vous désirez, ce qui vous répugne et ce que vous aimez, ce que vous recherchez et ce que vous voudriez fuir.
Ces choses se meuvent en vous comme des lumières et des ombres attachées deux à deux.
Et quand une ombre faiblit et disparaît, la lumière qui subsiste devient l'ombre d'une autre lumière.
Ainsi en est-il de votre liberté qui, quand elle perd ses chaînes, devient elle-même les chaînes d'une liberté plus grande encore.
Et un jeune dit, Parle-nous de l'Amitié. Et il répondit, disant: Votre ami est votre besoin qui a trouvé une réponse. Il est le champ que vous semez avec amour et moissonnez avec reconnaissance. Il est votre table et votre foyer. Car vous venez à lui avec votre faim, et vous cherchez en lui la paix. Lorsque votre ami parle de ses pensées vous ne craignez pas le "non" de votre esprit, ni ne refusez le "oui". Et quand il est silencieux votre coeur ne cesse d'écouter son coeur; Car en amitié, toutes les pensées, tous les désirs, toutes les attentes naissent et sont partagés sans mots, dans une joie muette. Quand vous vous séparez de votre ami, ne vous désolez pas ; Car ce que vous aimez en lui peut être plus clair en son absence, comme la montagne pour le randonneur est plus visible vue de la plaine. Et qu'il n'y ait d'autre intention dans l'amitié que l'approfondissement de l'esprit. Car l'amour qui cherche autre chose que la révélation de son propre mystère n'est pas l'amour, mais un filet jeté au loin : et ce que vous prenez est vain. Et donnez à votre ami le meilleur de vous-même. Et s'il doit connaître le reflux de votre marée, laissez le connaître aussi son flux. Car qu'est-ce que votre ami si vous venez le voir avec pour tout présent des heures à tuer ? Venez toujours le voir avec des heures à faire vivre. Car il est là pour remplir vos besoins, et non votre néant. Et dans la tendresse de l'amitié qu'il y ait le rire et le partage des plaisirs. Car dans la rosée de menues choses le cœur trouve son matin et sa fraîcheur.
Apollinaire - Le bestiaire ou Cortège d'Orphée (1911)
Orphée
Admirez le pouvoir insigne Et la noblesse de la ligne : Elle est la voix que la lumière fit entendre Et dont parle Hermès Trismégiste en son Pimandre.
La tortue
Du Thrace magique, ô délire ! Mes doigts sûrs font sonner la lyre. Les animaux passent aux sons De ma tortue, de mes chansons.
Le cheval
Mes durs rêves formels sauront te chevaucher, Mon destin au char d'or sera ton beau cocher Qui pour rênes tiendra tendus à frénésie, Mes vers, les parangons de toute poésie.
La chèvre du Thibet
Les poils de cette chèvre et même Ceux d'or pour qui prit tant de peine Jason, ne valent rien au prix Des cheveux dont je suis épris.
Le serpent
Tu t'acharnes sur la beauté. Et quelles femmes ont été Victimes de ta cruauté ! Eve, Eurydice, Cléopâtre ; J'en connais encor trois ou quatre.
(mon passage prefere)
Le chat
Je souhaite dans ma maison : Une femme ayant sa raison, Un chat passant parmi les livres, Des amis en toute saison Sans lesquels je ne peux pas vivre.
Le lion
O lion, malheureuse image Des rois chus lamentablement, Tu ne sais maintenant qu'en cage A Hambourg, chez les Allemands.
Le lièvre
Ne soit pas lascif et peureux Comme le lièvre et l'amoureux. Mais que toujours ton cerveau soit La hase pleine qui conçoit.
Le lapin
Je connais un autre connin Que tout vivant je voudrais prendre. Sa garenne est parmi le thym Des vallons du pays de Tendre.
Le dromadaire
Avec ses quatre dromadaires Don Pedro d'Alfaroubeira Courut le monde et l'admira. Il fit ce que je voudrais faire Si j'avais quatre dromadaires.
La souris
Belles journées, souris du temps, Vous rongez peu à peu ma vie. Dieu ! Je vais avoir vingt-huit ans, Et mal vécus, à mon envie. (j'adore ce passage aussi)
L'éléphant
Comme un éléphant son ivoire, J'ai en bouche un bien précieux. Pourpre mort !.. J'achète ma gloire Au prix des mots mélodieux.
Orphée
Regardez cette troupe infecte Aux mille pattes, au cent yeux : Rotifères, cirons, insectes Et microbes plus merveilleux Que les sept merveilles du monde Et le palais de Rosemonde !
La chenille
Le travail mène à la richesse. Pauvres poètes, travaillons ! La chenille en peinant sans cesse Devient le riche papillon.
La mouche
Nos mouches savent des chansons Que leur apprirent en Norvège Les mouches ganiques qui sont Les divinités de la neige.
La puce
Puces, amis, amantes même, Qu'ils sont cruels ceux qui nous aiment ! Tout notre sang coule pour eux. Les bien-aimés sont malheureux.
La sauterelle
Voici la fine sauterelle, La nourriture de saint Jean. Puissent mes vers être comme elle, Le régal des meilleures gens.
Orphée
Que ton coeur soit l'appât et le ciel, la piscine ! Car, pêcheur, quel poisson d'eau douce ou bien marine Egale-t-il, et par la forme et la saveur, Ce beau poisson divin qu'est JESUS, Mon sauveur ?
Le dauphin
Dauphins, vous jouez dans la mer, Mais le flot est toujours amer. Parfois, ma joie éclate-t-elle ? La vie est encore cruelle.
Le poulpe
Jetant son encre vers les cieux, Suçant le sang de ce qu'il aime Et le trouvant délicieux, Ce monstre inhumain, c'est moi-même.
La méduse
Méduses, malheureuses têtes Aux chevelures violettes Vous vous plaisez dans les tempêtes, Et je m'y plais comme vous faites.
L'écrevisse
Incertitude, ô mes délices Vous et moi nous nous en allons Comme s'en vont les écrevisses, A reculons, à reculons.
La carpe
Dans vos viviers, dans vos étangs, Carpes, que vous vivez longtemps ! Est-ce que la mort vous oublie, Poissons de la mélancolie.
Orphée
La femelle de l'alcyon, L'Amour, les volantes Sirènes, Savent de mortelles chansons Dangereuses et inhumaines. N'oyez pas ces oiseaux maudits, Mais les Anges du paradis.
Les sirènes
Saché-je d'où provient, Sirènes, votre ennui Quand vous vous lamentez, au large, dans la nuit ? Mer, je suis comme toi, plein de voix machinées Et mes vaisseaux chantants se nomment les années.
La colombe
Colombe, l'amour et l'esprit Qui engendrâtes Jésus-Christ, Comme vous j'aime une Marie. Qu'avec elle je me marie.
Le paon
En faisant la roue, cet oiseau, Dont le pennage traîne à terre, Apparaît encore plus beau, Mais se découvre le derrière.
Le hibou
Mon pauvre coeur est un hibou Qu'on cloue, qu'on décloue, qu'on recloue. De sang, d'ardeur, il est à bout. Tous ceux qui m'aiment, je les loue.
Ibis
Oui, j'irai dans l'ombre terreuse O mort certaine, ainsi soit-il ! Latin mortel, parole affreuse, Ibis, oiseau des bords du Nil.
Le boeuf
Ce chérubin dit la louange Du paradis, où, près des anges, Nous revivrons, mes chers amis, Quand le bon Dieu l'aura permis.
De tous les astres le plus beau Vesper, ramenant tout ce qui avait dispersé l'Aurore lumineuse Tu amènes la brebis, tu amènes la chèvre mais tu emmènes loin de sa mère l'enfant!
J'écris mes vers avec de l'air et on les aime J'ai servi la beauté Était-il en effet pour moi quelque chose de plus grand? Même dans l'avenir je le dis on gardera de moi le souvenir
J'ai vu cueillant des fleurs une enfant joyeuse au corps tendre
Une fille à la voix douce plus doucement chantant qu'une harpe et plus que l'or dorée
plus blanche que le lait plus souple que l'eau plus harmonieuse que les harpes plus fière qu'une cavale plus délicate que les roses plus douce qu'un moelleux manteau plus précieuse que l'or