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Grand Angle

Histoire : L’ex-basilique Sainte-Sophie de Constantinople décrite par Ibn Battuta

Dans son carnet de voyage devenu un chef-d’œuvre du genre, intitulé «Les Voyages», Ibn Battuta a décrit l’ex-basilique de Sainte-Sophie, devenue depuis un musée. La bâtisse est rattrapée par l’actualité avec sa conversion en mosquée. Bien des siècles avant, ce voyageur a imagé le lieux somptueux, qu’il a appelé «la Grande église».

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Partie intérieure de l'ex-basilique Sainte-Sophie à Istanbul / DR.
Temps de lecture: 3'

La décision du président turc Recep Tayyip Erdoğan de transformer en mosquée l’ex-basilique Sainte-Sophie, érigée aujourd’hui en musée, a créé une controverse qui a rapidement dépassé les frontières de la Turquie.

L’idée a essuyé de vives critiques, tandis que d’autres l’ont accueillie positivement, invoquant une décision souveraine. Avec son immense dôme et ses quatre minarets, Sainte-Sophie aura connu des vies multiples depuis 1 500 ans, assoyant ainsi sa valeur de monument de référence, jusqu’à son classement au patrimoine mondial de l’UNESCO en 1985.

Si le débat sur cette conversion est remis en avant dans l’actualité, l’histoire rappelle qu’il est ancien. Après avoir pris le contrôle sur Constantinople en 1453 déjà, les Ottomans ont en effet décidé de transformer cette somptueuse basilique en mosquée. C’est en 1934 que le fondateur de l’Etat turc moderne, Mustafa Kemal Ataturk, a ordonné par décret que Sainte-Sophie soit convertie en musée. Le 10 juillet 2020, la Cour suprême turque a annulé la valeur juridique de ce texte, ouvrant ainsi la voie à une nouvelle transformation du bâtiment pour en faire à nouveau une mosquée.

Ibn Battuta s’invite à Istanbul

Depuis l’antiquité, Sainte-Sophie a fait l’objet d’une attention particulière. Sa symbolique est restée centrale pour les habitants de Constantinople, connue aujourd’hui sous le nom d’Istanbul, capitale de l’Empire romain entre 335 et 395 (ap. J.-C.) et chef-lieu de Byzance entre 395 et 1453.

Avant la conquête ottomane, Sainte-Sophie a fait partie des églises les plus distinguées au monde par sa beauté saisissante, son architecture unique et ses matériaux de choix, marquant tous les visiteurs et fidèles s’y étant rendus.

Le grand voyageur Ibn Battuta l’aura décrite avec une grande précision, comme il s’est appliqué à le faire en se rendant à chaque région du monde. En effet, l’écrivain intemporel est connu pour s’intéresser particulièrement aux aspects religieux et anthropologiques des territoires où il a séjourné ; ce qui a enrichi son carnet «Les Voyages», édité en plusieurs volumes.

Ibn Battuta a évoqué l’ex-basilique dans une partie de son récit, lorsqu'il a relaté sa conversation avec le roi «Takfur», le quatrième jour de son arrivée à Constantinople en l'an 1332. Le voyageur décrit ainsi la cité en deux parties : «Elles sont séparées par un grand fleuve, ressemblant à celui de Salé au pays du Maghreb.» Une première section de la ville est appelée «Galata» et la deuxième «Istanbul», qui inclut la «Grande église» appelée Sainte-Sophie, bâtie par «le cousin de Salomon».

Ibn Battuta et «la Grande église»

L’église a suscité un intérêt évident de la part d’Ibn Battuta, bien qu’il ait été interdit d’y entrer, l’accès étant limité aux chrétiens à l'époque. Ayant pu traverser sa cour extérieure, il décrit ainsi la bâtisse comme étant «la plus grande église romaine», entourée d’une muraille, exactement comme une petite ville «comportant 13 portes d’entrée». Devant ces accès, le voyageur décrit des gardes qui «ne permettent à personne d’entrer avant de se prosterner devant la croix, qu’ils prétendent être une partie du bois sur lequel Jésus a été crucifié».

Selon les descriptions de l'intérieur de l'église qu’il a recueilli, le personnel est constitué de milliers de prêtres, dont certains descendent des Disciples du Christ, et en son sein existe une structure exclusivement féminine. La coutume royale exige qu’une visite de l’église soit faite chaque matin, tandis le pape est accueilli une fois par an sur les lieux. Loin de porter un regard méprisant sur les rituels des chrétiens, Ibn Battuta les a mentionnés avec une nette appréciation et a salué la révérence et la piété que les visiteurs de l’église expriment en se rendant sur place.

En plus de la basilique, un monastère à l’extérieur de cette enceinte a été décrit par le grand voyageur. Ce lieu est lui aussi divisé en deux parties, une pour les hommes et une autre pour les femmes.

Une description d'un voyageur musulman qui était précieuse pour l'époque où Byzance était sous domination chrétienne. Ibn Battuta a quitté Constantinople après y avoir passé un mois et six jours, au cours desquels il rappelle avoir été généreusement traité par le roi byzantin. 

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