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Grand Angle

Les étudiants marocains à l’étranger, les oubliés de la crise sanitaire

Coincés à l'étranger, sans pouvoir continuer leurs études ni revenir au pays pour retrouver leur famille, les étudiants marocains souffrent d'isolement. Leurs familles angoissent de ne pas pouvoir rapatrier leurs enfants.

Publié
Photo d'illustration / Ph. Freepik
Temps de lecture: 3'

Revenir in extremis avant la fermeture des frontières marocaines ou rester sur place par peur de rater la prochaine rentrée universitaire ? C’est le grand dilemme qui s’est posé à certains étudiants, en mars dernier. Aujourd’hui, ils sont dans la même situation que leurs familles qui vivent de plus en plus mal cet éloignement en temps de crise sanitaire.

«On dit à nos enfants que s’ils rentrent, ils risquent de pas pouvoir ressortir du pays en septembre prochain, alors qu'ils auraient pu suivre leurs cours à distance depuis le Maroc. C’est une véritable épée de Damoclès», conteste Meryame Laraqi Housseini auprès de Yabiladi. Mère de deux filles, elle se dit en effet consternée par le flou qui entoure la situation des étudiants marocains dans le monde, dans le contexte de la pandémie du nouveau coronavirus.

«Certains consulats ont été efficaces en apportant de l’aide aux étudiants restés sur place, mais tous n’ont pas eu cette chance. Concernant le rapatriement, la réponse est partout la même : ils pourront l'être en dernier et rien ne garantit leur retour pour la reprise de la rentrée», souligne-t-elle.

Impacts économiques et psychologiques

«Ma première fille étudiante est confinée en Californie et n’a personne pour l'aider : la situation sanitaire est délicate et il est difficile de lui envoyer l’argent suffisant pour qu’elle ne manque de rien en cette période de pandémie», s’inquiète encore Meryame. En effet, celle-ci affirme que «l’Office des changes ne permet pas de transferts dépassant le plafond prévu par mois» et qu’«aucune dérogation spéciale n’a été prévue».

Mère d’un étudiant à Strasbourg, Fatima Ezzohra Skalli est préoccupée elle aussi des conséquences de ces contraintes sur son fils.

«Il travaillait en alternance avec ses études, mais tout est encore suspendu. Il est en mode survie, puisque ce que nous lui envoyons ne suffit pas pour les sortir de la précarité accentuée par la crise sanitaire.»

Fatima Ezzohra Skalli

Meryame Laraki Housseini n'a eu de cesse d'interpeller les sevices consulaires sur la situation des étudiants : «Nous aimerions tout simplement savoir si nos enfants resteront abandonnés jusqu’à la fin de l’année, ou si au moins une aide peut leur être proposée sur place.»

Future bachelière, la seconde fille de Meryame doit passer son BAC cet été, afin de parachever l’inscription à son université au Royaume-Uni. Mais face à l’éventuelle impossibilité d'accompagner sa fille, mesures sanitaires obligent, elle a du mal à se projeter et faire les choix cruciaux pour sa fille bachelière. Un dilemme qui confine à l'angoisse.

Sur ce point, Fatima Ezzohra Skalli décrit un «poids psychologique de plus en plus difficile à encaisser, pour les enfants autant que pour les parents». «Depuis le déconfinement du 11 mai en France, mon fils n’a plus eu la capacité de sortir de son appartement, à cause du stress qu'il a encaissé durant toute cette période», déplore la maman.

Une déprime vécue en silence

C’est en effet à une grande déprime que les enfants de ces familles sont confrontés, faute de pouvoir se projeter sur les prochaines semaines ou prochains mois. Cette souffrance est souvent vécue en solitaire, ce qui en accentue l’impact sur les jeunes étudiants. Vivant à Saint-Etienne et étudiante en deuxième année de biologie, Yasmine témoigne de cette situation auprès de Yabiladi.

«Les trois quarts du temps, je déprime toute seule chez moi, surtout que je termine le 25 mai et que je reste dans l’incertitude de pouvoir retrouver mes proches ou non avant la prochaine rentrée», nous raconte Yasmine. «Le consulat le plus proche de moi est celui de Lyon, je l’ai appelé à plusieurs reprises mais je n’ai jamais eu de réponses», assure-t-elle.

Selon Yasmine, l’impact psychologique de cet isolement est aggravé par les commentaires stigmatisants sur les réseaux sociaux. «Peu de personnes mesurent ce qu’elles disent sur les réseaux sociaux mais c’est très blessant. On nous somme de rester là où nous sommes, au risque d'imoorter le virus au Maroc», déplore encore l’étudiante.

«Lorsque nous sommes arrivés à avoir un retour du consulat, on nous a expliqué que nous n’étions pas prioritaires et que s’il 'restait' des places vides à la fin du rapatriement, nous pourrons à ce moment-là en bénéficier», se désole encore Yasmine.

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