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Grand Angle

Petite histoire de l'architecture arabe

L’architecture arabe se caractérise par le recours à des matériaux précieux qui ont longtemps fait la fierté des souverains, folie des grandeurs oblige. L’architecture islamique, quant à elle, est aujourd’hui quelque peu en déperdition en raison de l’absence de politique de préservation du patrimoine.

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Un moucharabieh, typique de l'architecture arabe. / Ph. Pinterest
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Parler de l’architecture arabe, c’est revenir sur l’apport de la civilisation arabe au monde ; des mathématiques aux sciences, de la géographie à la médecine, des arts à la littérature. Si la construction de bâtiments monumentaux par les Arabes a démarré bien avant la période islamique, ces derniers se sont toutefois multipliés grâce à l’expansion de l’islam et des Arabes dans un monde jusque-là dominé par l’empire romain. C’est ce qu’explique Dominique Misigaro, spécialiste des arts de l’islam et diplômée de l’Ecole du Louvre.

«Les villes antiques d’Arabie et du Proche-Orient témoignent de pratiques architecturales complexes, que ce soit dans les temples ou dans les monuments civils», écrit-elle dans un article publié sur le site de l’Institut du monde arabe (IMA). Cette expansion de l’islam et des Arabes «entraîne la multiplication des grandes constructions, notamment à partir du VIIIe siècle. Celles-ci peuvent être religieuses, mais aussi civiles ou funéraires», ajoute-t-elle.

Une architecture arabe typique. | DRUne architecture arabe typique. | DR

Si une grande partie des constructions ont été balayées par «le temps, la nature ou les hommes», leurs vestiges témoignent d’un savoir-faire riche et élaboré. Ainsi, les recherches menées sur le terrain montrent que les palais «s’organisent en plusieurs cours et pavillons, avec une progression depuis les espaces les plus accessibles jusqu’aux espaces les plus privés», souligne Dominique Misigaro.

Ces palais comprennent aussi des salles d’audience, des appartements privés, un hammam, une mosquée… Dans le monde islamique, les souverains ont également la folie des grandeurs : ils font sortir de terre de véritables cités palatiales, comme Samarra en Irak, Madinat al-Zahra en Espagne ou Le Caire en Egypte.

Des matériaux précieux qui font la fierté des souverains

La ville du Caire peut d’ailleurs se targuer d’avoir abrité l’une des époques les plus brillantes de l’architecture arabe, notamment sous les Mamelouks, ces membres de milices formées d’esclaves affranchis au service de différents souverains musulmans, explique l’encyclopédie en ligne Imago Mundi. L’Espagne n’est pas en reste : sur la grande mosquée de Séville, bâtie en 1195 par Yacoub El Mansour, trône «un des plus beaux morceaux d'architecture arabe qui existent encore (…) célèbre dans le monde entier sous le nom de "la Giralda"».

Sur la rive sud de la Méditerranée, les minarets des mosquées Zaïtoûna et de la Kasbah, à Tunis ; de la mosquée de Mansoûra, de la mosquée Sidi-boû-Madîn et Djama-Kabira, à Tlemcen, en Algérie ; des mosquées de Fès, Marrakech et Tanger, au Maroc, sont également des exemples attestant de la richesse de l’architecture arabe, et en l’occurrence islamique.

La Giralda, ancien minaret de la grande mosquée almohade de Séville. | DRLa Giralda, ancien minaret de la grande mosquée almohade de Séville. | DR

De plus, les architectures les plus prestigieuses sont dotées de matériaux précieux que les souverains font venir de pays lointains : bois rares, marbres colorés, mosaïques byzantines à fonds d’or, ainsi que l’énumère Dominique Misigaro. «Si le bois a été peu conservé en architecture, il était probablement largement utilisé en structure et en charpente. Les autres matériaux les plus répandus sont le pisé, principalement pour les habitations, la brique crue, la brique cuite, le moellon et la pierre», précise-t-elle.

Les couleurs sont aussi un moyen de faire ressortir, par un jeu de contraste, la beauté et la finesse des constructions issues de l’architecture arabe. «L’utilisation de matériaux aux couleurs contrastantes, pour les colonnes d’une salle de prière ou pour former un arc, est très fréquente, car elle permet d’intégrer la décoration à la structure architecturale», décrit-on aussi sur le site de l’IMA.

Très présents, les mosaïques, les stucs moulés et sculptés, ou encore les dalles de marbre ont souvent plus une fonction ornementale. «La sculpture et la peinture sont également présentes, mais l’architecture du monde islamique est surtout connue pour ses nombreux décors de céramique qui occupent murs et sols, intérieurs et extérieurs. Les carreaux de revêtement présentent des formes, des couleurs et des motifs extrêmement variés», conclut Dominique Misigaro.

Une architecture islamique en péril

Quant à l’art islamique, les grands principes qui la régissent, notamment la séparation des sexes, sont déclinés de plusieurs façons. L’une d’elles désigne «l’organisation d’un grand nombre d’habitations autour d’une cour intérieure couverte ou non, élément qui se retrouve dans l’ensemble du monde musulman», lit-on dans Les Cahiers de l’Islam.  

Mais ces grands principes ont décliné avec le déclin lui-même de l’art islamique. Le recours à des techniques de construction moderne, l’exode rural et la croissance importante des communautés urbaines ont suscité chez les architectes urbains un désintérêt pour les principes de l’architecture islamique traditionnelle, «au profit d’ensembles moins coûteux à construire et plus économes en espace».

Exemple ? «La conception ''familiale'' des bâtiments selon laquelle une maison constitue le lieu de résidence d’une famille, commune à de nombreuses habitations du monde musulman, a été évincée dans les années 1930 au profit d’immeubles plus modernes d’influence occidentale rassemblant un grand nombre de foyers», explique la même source.

Clin d’œil à nos articles sur la déperdition du patrimoine au Maroc : l’urbanisation crescendo et le manque de politiques publiques pour préserver le patrimoine a malheureusement happé les maisons traditionnelles, dont une bonne partie ont été détruites.

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