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Grand Angle  

Belgique : Les sans-papiers inquiets de la réforme médicale

C’est une nouvelle qui n’enchantera pas les «sans-papiers» en Belgique. La Chambre belge a approuvé jeudi le projet de loi visant à réformer l’aide médicale urgente (AMU) pour les personnes en séjour irrégulier, a annoncé RTL.

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Ph. DR.
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En Belgique, une nouvelle réforme médicale veut contrecarrer les abus. Depuis janvier déjà, le ministre des Indépendants, des PME, de l’agriculture et de l’intégration sociale, Denis Ducarme, avertit que «les soins de confort gratuits pour les migrants, c’est fini».

Aujourd’hui, les actes suivent et le parlement a approuvé jeudi un projet de loi dans ce sens. Il vise ainsi à réformer l’aide médicale urgente (AMU) pour les personnes en séjour irrégulier. Ceci dit, il faut préciser que cette dernière n’est pas à confondre avec l’assistance médicale urgente.

En effet, l’AMU couvre tous les soins de santé préventifs et curatifs, délivrés en hôpital ou en ambulatoire. Les parlementaires affirment que ce système d’aide est en proie à plusieurs fraudes, enregistrées dans le rapport d’un médecin conseil de Mediprima fin 2016.

La réforme ne fait pas l’unanimité

DH Net, un site local qui a mis la main sur le document en question, dresse un tableau de la situation :

«Dans 52% des cas, il n’y a pas d’informations concernant le type de soins de santé (…) Certains hôpitaux refusent de fournir les rapports médicaux.Et enfin dans 2,7% des cas, soit 12 cas, il n’y a pas de critère correspondant à l’Aide médicale urgente.»

Par ailleurs, Médecins du Monde critique ces données, estimant que ce rapport définit mal ce qu’est l’AMU : «Le médecin de Mediprima a utilisé une définition restrictive, voire erronée de l’AMU, en employant une définition considérant que seuls les soins urgents sont couverts par l’AMU.»

Pour cette raison, Médecin du Monde a lancé une pétition. Parmi ses signataires, 85 médecins dénoncent ce projet et interpellent notamment sur le taux de couverture et les coûts par bénéficiaire, qui, selon eux, sont «nettement inférieurs en comparaison avec la population générale».

Dans la note officielle du gouvernement, qui date de 2015, le coût moyen annuel par bénéficiaire est de 2 539 € à charge des autorités publiques. La même note précise que 7% à 13% des ressortissants étrangers établis en Belgique sont en situation irrégulière, soit entre 85 000 et 160 000 personnes en 2014.

Médecins du Monde conclut en affirmant que «seule une vraie étude avec une méthodologie validée, et non le rapport d’un seul médecin ayant utilisé une définition restrictive de l’AMU, peut servir de base à une modification législative qui implique un droit aussi fondamental que le droit à la santé d’une population vulnérable et précarisée».

Le cas d’une famille Marocaine

La chaîne Euronews a suivi le cas de Sakina et Rachid, qui sont en détresse depuis des mois. D’origine marocaine, en situation irrégulière en Belgique et parents d’une petite fille de trois mois, ils doivent encore régler la facture de l’accouchement qui s’élève à plus de 5 000 euros.

Pourtant, Medimmigrant, une association à but non lucratif, explique bien qu’une mère peut bénéficier d’un engagement de paiement de la part d’un centre public d’action sociale (CPAS), qui réglera les frais d’accouchement et les soins médicaux.

Certes, la mère n’a pas droit à une aide financière du CPAS, mais une jurisprudence du tribunal du travail impose à ces centres d’aider financièrement une femme enceinte «au cours des deux derniers mois de sa grossesse et pendant les trois mois qui suivent l’accouchement». Si cette mesure n’est pas appliquée, la famille peut faire un recours, explique Medimmigrant.

Par ailleurs, un document du Centre fédéral d’expertise des soins de santé relevant du gouvernement belge rappelle que le pays «a ratifié plusieurs traités internationaux, spécifiant que toute personne se trouvant sur son territoire doit pouvoir bénéficier, sans discrimination, de soins de santé (…) L’article 57 §2 de la loi organique sur les Centres Publics d’Action Sociale (CPAS)6 et l’Arrêté Royal du 12 décembre 19965 traduisent cet engagement dans la loi belge».

En vertu de ces dispositions, Sakina et Rachid sont couverts par l’AMU. Si la réforme médicale vient à être appliquée, ce dispositif leur permettant une certaine sécurité sociale sera mis à mal.

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