Après les réticences suscitées par l'annonce du colloque sur l’islamophobie à l’université Lyon 2, c’est désormais sa censure qui fait grincer des dents. Parmi les réactions, pêle-mêle, l’historienne Laurence de Cock, «détricoteuse» chez Mediapart, déplore un «événement d’une extrême gravité et un précédent lourd pour la liberté académique», en référence à l’annulation d’une journée d’études intitulée «Lutter contre l'islamophobie, un enjeu d'égalité ?».
Dans une longue série de tweets, cette professeure agrégée d’histoire-géographie, docteure en sciences de l’éducation, réitère le «caractère scientifique» du colloque, reconnaissant toutefois qu’«on peut bien-sûr ne pas être d'accord avec une programmation, regretter les absences ou présences».
«Pitoyable souplesse»
Laurence de Cock fustige surtout la réaction de plusieurs organisations, notamment la Licra (Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme) et le Comité laïcité-république, qui ont tous deux dénoncé une rencontre «laïcophobe». Dans le viseur de l’historienne également, le mouvement Printemps républicain, classé à gauche et fervent défenseur de la laïcité, en guerre contre ce qu’il nomme «l’islamisme politique», et Céline Pina, essayiste et militante, ancienne élue locale, auteure d’une tribune dans le Figaro dans laquelle elle prend position contre ce colloque.
L’historienne regrette que «parmi ces censeurs, il y a des chercheurs… qui connaissent donc normalement parfaitement bien le monde académique et ses règles (…) Il arrive très souvent en sociologie que les colloques mêlent chercheurs et associations ou acteurs sociaux engagés. / C’est compliqué à mener car c’est souvent conflictuel mais le débat est toujours fructueux et il fait avancer tt le monde. C’était le cas ici».
J'aimerais revenir sur cet événement d'une extrême gravité et un précédent lourd pour la liberté académique https://t.co/mhZRmfLo6s
— Laurence De Cock (@laurencedecock1) 4 de octubre de 2017
François Burgat, islamologue et politologue, directeur de recherche à l’Institut de recherches et d’études sur le monde arabe et musulman (IREMAM), fustige quant à lui la «pitoyable souplesse de la colonne vertébrale éthique et scientifique de l'Université Lyon 2».
Pitoyable souplesse de la colonne vertébrale éthique et scientifique de l'Université Lyon 2, qui plie devant la facho-sphère :-( https://t.co/YZEjUGFbjr
— francois burgat (@frburgat) 4 de octubre de 2017
Vincent Geisser, politologue et enseignant à l'Institut d'études politiques d'Aix-en-Provence, s'inquiète du chemin pris par la démocratie et l'université françaises. «La démocratie française est bien mal en point. L'université française aussi... La présidence de l'université Lyon 2 annule un colloque sur l'islamophobie», déplore-t-il sur son compte Facebook.
Enfin, le directeur de publication de Mediapart, Edwy Plenel, s’inquiète d’une «démocratie [qui] recule».
Quand la censure idéologique s'attaque aux libertés académiques, c'est que la démocratie recule @MediapartLeClub https://t.co/91jgyQj3B7
— Edwy Plenel (@edwyplenel) 4 de octubre de 2017