«Au Maroc, les salles de cinéma peuvent fermées pendant 10 ou 15 ans sans qu’il y ait de projet de destruction ou de reconversion», s’étonne Stéphan Zaubitzer. Le photographe français présente Exposition CinéMaroc au Salon du Panthéon, l’espace d’exposition du cinéma du Panthéon, à Paris, du 29 janvier au 28 avril. Ces images seront exposées dans les mois qui suivront à la Fondation Slaoui, à Casablanca, avant, vraisemblablement de faire le tour du royaume dans les Instituts français.
Stephan Zaubitzer a déjà parcouru une partie du monde pour photographier les salles de cinémas. Burkina Faso, Roumanie, Egypte, Cuba… et puis 23 jours au Maroc. Il utilise une technique photographique ancienne avec une chambre photographique «particulièrement adaptée à l’architecture», assure-t-il et qui lui permet de procéder à des agrandissements importants.
«Moi qui ait été en Egypte, j’ai été surpris par le foisonnement, la qualité, la diversité des salles, au Maroc. Mêmes si elles sont fermées, elles existent, elles sont là. Ce patrimoine est menacé, mais il existe encore alors que dans la plupart des pays que j’ai visités dans le cadre de mon travail, les salles fermées sont rapidement détruites ou transformées, de telle sorte qu’il est parfois difficile d’en reconnaître les éléments. A Paris, beaucoup de salles de cinémas ont fermé et certaines ont été transformées en supermarchés», raconte le photographe.
Au Maroc, 30 salles sont encore en activité, selon l’association Save Cinema in Morocco, pour 120 salles fermées – abandonnées, chaque jour un peu plus délabrées mais restées intactes. «Ces dernières années, c’est 4 ou 5 salles qui fermaient par an. Une dizaine, en une dizaine d’années ont été effectivement détruites», révèle Tarik Mounim, président de l’association.
«Nous sommes parvenus à faire inscrire 20 salles dans la liste des sites et des monuments inscrits. Ce classement offre une protection, mais elle n’est pas totale», indique Tarik Mounim. La liste pose une interdiction de détruire et de réaménager au-delà d’une certaine mesure les sites qu’elle mentionne, mais dans les faits, aucune intervention policière ne vient jamais bloquer une tentative de destruction. «Par exemple à Kénitra une salle a été détruite en un week-end, en toute illégalité», précise-t-il.
«Un dahir de 56 interdit que les salles de cinémas servent à autre chose, soient reconverties. C’est surtout ça qui protège les salles fermées et classées de la destruction, si ce n’est quelques destructions issues de cas de corruption, ou d’actes individuels totalement illégaux», ajoute le président de l’association.
Architecture monumentale
«Je trouve extraordinaire cette architecture, souvent monumentale, ces décorations qui cherchent à interpeller le passant dans la rue pour qu’il devienne spectateur. Les décorations intérieures qui font appellent au rêve», analyse Stephan Zaubitzer. Cette quête du spectateur et du rêve a fait des salles de cinémas des éléments de patrimoine à part entière.
«Nous sommes très heureux de ce travail photographique qui nous aide à sensibiliser le public à la richesse patrimoniale que représentent nos salles de cinémas. Il va contribuer à faire prendre conscience des problèmes», estime Tarik Mounim.