Alors que Ben Ali et Moubarak venaient d'être unlikés par des millions de fans tunisiens et égyptiens de l'Intifada 2.0, au Maroc on préférait débattre du "R" manquant ou à supprimer dans le mot "Révolution". C'est là que réside, probablement, la fameuse exception marocaine : se chamailler sur le choix entre l'évolution et la révolution alors que nous n'avons vécu ni l'une, ni l'autre. Fromage ou dessert ? Aucun des deux, ça sera tournée de thé à la menthe pour tout le monde.
Il y a de la Nayda dans le Mouvement du 20 février. On peut en effet déceler de nombreuses similitudes entre les deux dynamiques. Toutes les deux ont donné naissances à une nouvelle génération de figures culturelles et/ou politiques dans la jeunesse marocaine. Qu'ils aient fait partie des initiateurs de ces mouvements, qu'ils les aient contestés, ou qu'ils soient arrivés après pour en profiter, des jeunes sont devenus les figures représentatives d'une jeunesse en quête de leaders.
Nouveaux leaders
Ainsi, de jeunes journalistes sont aujourd’hui connus plus parce que ex-militant du M20F que par leurs écrits. Des défenseurs autoproclamés du royaume sont soutenus virtuellement par les anti-anti-tout qui n'osent pas devenir de vrais baltajis. Puis sont venus les bouche-trous qui n'ont rien fait de remarquable et qu’on n’aurait jamais remarqués si ce n'était le besoin de placer quelques jeunes leaders à des postes officiels, ou de représentation politique. La nature ayant horreur du vide, autant placer ceux qui ont naturellement la tête vide.
Le plus admirable c'est l'éclosion d'un Mouvement du 20 février au sein même de la Nayda. Des piliers de cette mini-movida marocaine ont décidé de se "dénaydaïser". Le rap marocain pourtant défloré a décidé de prendre le chemin du Doc Gynéco. Mais pourquoi jeter la pierre à des artistes qui faisaient juste semblant d'avoir un discours politique ? N'oublions pas que des militants du M20F ont également renié les leurs. Pour eux, les slogans sur le régime ont eu l'effet inverse : prise de poids considérable et PAM, diabétiques insulinodépendants.
Abdelaziz chez les Bisounours
Phénomène spontané d'une jeunesse en quête de causes mobilisatrices, diront les plus optimistes. Ejaculation précoce de vieux ados en jean-casquette, cracheront les plus nihilistes. A posteriori, l'accusation de dangereux athée-islamiste-homosexuel-pro-polisario proférée à l'égard des militants du M20F parait quelque peu comique. Leur romantisme révolutionnaire les rapprochait tout de même plus des Bisounours que de Mohamed Abdelaziz.
Bilan des courses : une nouvelle constitution qui depuis 2011, attend toujours le vote de plusieurs lois organiques pour être appliquée en totalité; un gouvernement PJD où le parti majoritaire est minoritaire; un pays qui ronronne; des citoyens voyant dans les révoltes une polyo et désormais vaccinés pour 10 ans. Face aux nombreux changements dans les autres pays de la région passés en mode "Fail state", les Marocains ont décidé de rester pour très longtemps en mode Maroc 1.0.
L'ironie de l'histoire, c'est que le bilan du M20F est en contradiction avec les objectifs de départ. Si changer le mode de gouvernance était l'espérance, la contestation de 2011, a servi de vaccin pour renforcer l'organisme. Ceux qui ont diabolisé le M20F, voulant à tout prix qu'on le considère comme un virus, devront repasser.