L’inspection générale du ministère de la Justice devra interroger le procureur du roi près le tribunal de première instance de Kenitra, indique un communiqué du département Mustapha Ramid, parvenu à Yabiladi. La cause : le magistrat a refusé de satisfaire une demande de détenus alléguant qu’ils auraient été victimes d’actes de torture dans les locaux de la police. Pour appuyer leurs dires, ils ont réclamé d’être présentés devant une expertise médicale.
La norme au Maroc
Si la décision de Ramid est, sans la moindre équivoque, une nouveauté, la réaction du procureur de ne donner aucune suite à la requête des prisonniers ne constitue guère une surprise. En réalité, elle constituerait plutôt la règle. Preuve en est, les chiffres révélés par le propre ministre de la Justice, lors du conseil du gouvernement du 13 mars dernier, au cours duquel le cabinet Benkirane s’était engagé à respecter les droits de l’Homme.
Ils sont à cet égard, très éloquents et en quelque sorte apportent un soutien au magistrat de Kenitra. Le ministre assurait alors que les services de son département avaient reçu, rien que dans les provinces du Sud, presque 900 sollicitudes d’expertises médicales, mais dont seulement 11 ont été acceptées. Un chiffre révélateur du chemin qui reste à parcourir sur cette question.
Le facteur forum mondial du droit de l’Homme de Marrakech ?
Depuis le 13 mai date de la publication d’un rapport d’Amnesty international dénonçant la pratique de la torture au Maroc, toutes les allégations de ce genre conduisaient automatiquement leurs auteurs en prison. Les cas de Wafaâ Charaf et d’Oussama Hasni, condamnés respectivement à deux ans et trois ans de prison pour «allégations mensongères de torture», sont deux exemples attestant de cette tendance.
Par ailleurs, le timing de la décision de Mustapha Ramid n’est guère fortuit. Elle intervient trois semaines avant la tenue à Marrakech, du 27 au 30 novembre, de la 2ème édition du Forum mondial des droits de l’Homme. Un rendez-vous très important pour le Maroc.
A l’approche de cette échéance, l'Etat multiplie les gestes apaisant à l’adresse des ONG nationales, dont certaines ont menacé de boycotter le Forum. C'est ainsi qu'on peut expliquer le report de l’adoption prévue en conseil de gouvernement, d’un projet de décret ministériel sur les financements internationaux des associations. Un ajournement qui fait suite à une réunion entre le ministre de l’Intérieur et certaines ONG marocaines.