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Tribune

Maroc : Pour une véritable presse indépendante et balancée !

Mon papier se veut serein, loin des propos qui diaboliseraient l’autre, sur l’épreuve qu’endure une certaine presse. Une situation qui renvoie à une autre, historique et plus éprouvante, lorsque la gauche marocaine avait, par le passé, opté pour l’affrontement, comme voie pour faire valoir ses idéaux.

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La conséquence, devenue de l’histoire ancienne, nous la connaissons aujourd’hui - des années de plomb, des martyrs à titre posthume, des scissions partisanes. Aucune avancée démocratique n’a été enregistrée durant cette période de bras de fer, s’étalant de 1963 à 1973, avec une période " in between " en acuité dans les années 80. L’année 1992 représente un tournant historique dans le paysage politique marocain- les ardeurs révolutionnaires se sont atténuées et un certain apaisement installé, fruit d’une reconnaissance mutuelle et d’une cohabitation en bonne intelligence d’une légitimité " populaire " face à une autre, " historique ". Et c’est tout le Maroc qui en avait tiré profit, avec l’avènement d’un gouvernement de l’alternance en 1998.

La presse indépendante a tout intérêt à tirer les enseignements de l’histoire, en évitant la surenchère suicidaire et en faisant bon usage de l’espace de liberté, chèrement acquis.

Il ne sert à rien de se livrer à un combat " pot de terre contre pot de fer ", d’autant que le rapport de force est inégal et les dés pipés.

A quoi avancerait-t-il le Maroc que la presse "indépendante " soulève des sujets " tabous " que les politiques et les parlementaires- élus et mandataire de la nation- s’accordent à taire ? De plus, s’est-on jamais interrogé sur les sujets qui préoccupent en priorité le citoyen marocain ? Tous les sujets se sont-ils taris, hormis ceux qui fâchent les gouvernants ?

Le rôle de la presse indépendante n’est pas de se substituer aux partis politiques, ni de s’imposer en objecteur de conscience.

Qu’on ne se méprenne pas je suis contre toute exaction de quelque nature qu’elle soit, à l’endroit des journalistes, pourvu qu’ils ne ressentent pas eux-mêmes le besoin, je ne sais pour quelle raison, de se complaire dans une posture masochiste. Il y va de notre presse indépendante à laquelle nous tenons tant. Si l’on devait faire une radioscopie de la presse marocaine indépendante, l'on pourrait en situer la genèse, en gros, aux débuts des années 90, à l'exception de quelques titres francophones spécialisés.

La naissance de cette presse indépendante aura été encouragée par le pouvoir, en signe de velléités d'ouverture et - d'une pierre, deux coups – mettre mal à l'aise la presse partisane, notamment celle de l'USFP, qui avait les coudées franches et réalisait de grosses ventes.

La première vague des " indépendantistes " a donné naissance à " Al Ahdat Al Maghribia ". dont le directeur n'est autre que l'ex-directeur " consensuel " d'Al Ittihad Al Ichtiraki. Les actionnaires d'Al Ahdat sont des USFPéistes de ce que l'on pourrait appeler la première vague de l'aile sociale-démocrate ou participationniste de l'USFP. Et les premiers numéros d'Al Ahdat, n'étaient autre chose que des bulletins de dénigrement et de médisance à l'endroit des symboles d'un parti, supposé être le leur.

Avec Al Ahdat le coup d'envoi du foisonnement de titres a été donné, car trop facile de fonder un journal. Et si l’on devait catégoriser la presse indépendante, l'on obtiendrait trois types. La presse " prêche du sultan ", plus monarchiste que le Roi qui ne cesse, dans ses colonnes, de clamer haut et fort que le Maroc est dans la " normalité " démocratique et la bonne gouvernance ; que le Maroc est dans le meilleur des mondes possibles, n'en déplaise à certains. Cette même presse ne recule devant aucune insulte, aucune calomnie, en réaction à toute velléité d'opinion contraire. A ses yeux personne n'est en droit de porter un jugement critique à l'endroit notre " éclairé " gouvernement, tant sur le plan économique que social.

L'autre courant de la presse indépendante est constitué de quelques titres, dirigés par des trublions, qui font peu de cas de notion de mesure. Il s'agit de " révoltés" et de " puristes " qui n'ont pas encore dû parfaire leur affirmation du soi. Ayant appris le métier de journaliste sur le tas, Ils voient tout en noir et ne veulent créditer le pouvoir en place d'aucune percée, de quelque nature que ce soit. Cette frange de presse a été et continue d'être combattue, concomitamment par sa consœur " presse prêche " et à coups de procès judiciaires.

La troisième nomenclature de presse regorge de titres, les uns plus zélés que les autres, où la libido l'emporte sur la raison, la rumeur sur l'information, le délayage sur l'analyse et enfin le vice sur l'éthique.

Le Maroc n'a pas besoin ce cette presse là. Nous n’avons pas besoin de cette presse-là qui sème le mensonge et l'illusion ; qui attise le nihilisme et le désespoir ou qui érige en règle de conduite la stupidité et l'ignominie. Gare d'en arriver à la presse " poubelle " et au chantage journalistique.

A proprement parler, il n'y a pas de presse indépendante au Maroc. Elle est, soit d'obédience de puissants groupes financiers- cas de la presse économique- soit elle est "branchée" pour ce qui est de la presse de caniveau, soit enfin, il s’agit d’une presse "chien de garde" à la solde de quelques hommes du sérail. Et chacune de ces "presses" voit midi à sa porte et jette le dévolu, sur quiconque refuse de se rallier à sa "cause".

Tribune

Mostafa Melgou
Chercheur en économie
Mostafa Melgou
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