Menu

Grand Angle

France : Des écoles appelées à renseigner la police sur l’absentéisme du jour de l’Aïd el-Fitr

A Toulouse et ses régions, des directeurs d’écoles ont presque cru à un spam, mais il s’agit bien d’une correspondance où la police les invite à renseigner sur le taux d’absentéisme le jour de l’Aïd el-Fitr. Choqués, des cadres éducatifs fustigent «un fichage religieux» assignant tout élève absent à l’islam. Les interrogations demeurent sur l’intérêt de telles données.

Publié
Photo d'illustration / DR.
Temps de lecture: 3'

Une centaine d’école à Toulouse et ses environs se sont vus dans le devoir de renseigner la police sur le taux d’absentéisme des élèves, le 21 avril dernier, date de la fête musulmane de l’Aïd el-Fitr. en France En d’autres termes, la police a demandé à des professeurs à «compter» les élèves musulmans, selon des révélations de La Dépêche du Midi, vendredi. Auprès du journal local, des cadres éducatifs sont montés au créneau en dénonçant un «un fichage religieux». En effet, le média rapporte que deux agents d’un commissariat ont envoyé un mail aux écoles, surtout celles situées dans des zones d’éducation prioritaire. «A la demande des renseignements et pour effectuer un bilan sur cette journée, nous vous sollicitons pour connaître le taux d’absentéisme le vendredi 21 avril», indique la correspondance, selon la même source.

La demande a choqué, puisque les absences coïncidant avec la fête de la rupture du jeûne signifieraient que élèves concernés seraient potentiellement assignés à une religion, en tant que musulmans. «Quand bien même le courrier exigeait un ‘retour rapide’, l’essentiel des établissements contactés n’aurait pas accédé à la demande», ajoute le média. Le directeur académique des services de l’Education nationale, Arnaud Leclerc, aurait lui-même recommandé de ne pas y répondre. Cependant, des directeurs d’écoles du Mirail, quartier populaire à Toulous, «auraient cédé après avoir été invités à coopérer par une inspectrice de l’Education nationale».

Marie-Cécile Périllat, secrétaire générale de la FSU31, s’est insurgée auprès de La Dépêche du Midi. Elle souligne que «ce ciblage des familles musulmanes, en utilisant pour ce faire les services de l’Education nationale de surcroît, nous inquiète fortement». Des sources du journal indiquent que les auteurs du mail «auraient agi sur l’ordre du renseignement territorial». D’autres soulignent que «le ministère de l’Intérieur serait aux commandes». Toutefois, ni le ministère, ni la préfecture de la Haute-Garonne n’ont émis de commentaire.

Une «maladresse» qui s’est déjà reproduite ailleurs

Selon l’AFP, la demande aurait été formulée sans l’aval du rectorat de Toulouse. «En aucun cas nous ne menons des enquêtes de la sorte», a affirmé Mostafa Fourar, recteur de l’académie, joint par l’agence de presse. «Si quelqu’un a pris cette initiative, l’Education nationale n’y est absolument pas associée», a-t-il insisté. «Dès que les chefs d’établissements et directeurs d’écoles nous ont informés de cette requête, consigne a évidemment été donnée de ne pas y répondre», a ajouté le responsable. Selon une source citée par la même agence, il s’agirait plutôt d’«une maladresse».

«Les services du renseignement territorial sont passés par des policiers référents de l’Education nationale, leur message était mal formulé, mais demander un taux d’absentéisme, ce n’est pas du fichage ni des données nominatives», a souligné la même source. Pour sa part, le ministère de l’Education nationale rappelle qu’«en cas d’absence de leur enfant, les parents doivent sans délai faire connaître au directeur de l’établissement scolaire les motifs de leur absence, mais il ne revient pas aux services de demander s’ils vont être absents, conformément au respect de la confidentialité des croyances».

Les faits inquiètent surtout au vu de leur caractère répétitif. S’il ne s’agit que d’«une maladresse», celle-ci s’est bien reproduite depuis avril. La Dépêche du Midi rappelle que le 11 mai, des écoles de l’Hérault ont reçu un mail similaire concernant la période du Ramadan. Suscitant des réactions similaires qu’à Toulouse, auprès des cadres administratifs et pédagogiques, la requête aurait été largement ignorée, sous les consignes de l’académie de Montpellier. En France, les médias comme les administrateurs éducatifs s’interrogent surtout sur l’intérêt de recueillir de telles données.

Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com