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Grand Angle

Le Musée juif de Belgique veut tourner la page de la polémique sur Fatima Zibouh

Depuis l’annonce de sa participation à une conférence sur l’antiracisme et l’antisémitisme au Musée juif de Belgique, Fatima Zibouh s’est retrouvée au cœur d’une nouvelle polémique. Après des pressions, son intervention a été annulée, provoquant l’ire de l’UEJB qui organise l’évènement. La politologue a été réinvitée, lors d’une rencontre, le Musée voulant ainsi rectifier le tir.

Publié
Joanna Peczenik, co-présidente UEJB ; Philippe Blondin, président du Musée juif ; Fatima Zibouh, Brussels 2030 ; Sacha Guttman, co-président de l'UEJB et Barbara Cuglietta, directrice du Musée juif (g. à d.)
Temps de lecture: 3'

Le Musée juif de Belgique a organisé un ftour (rupture du jeûne du ramadan) en compagnie de la politologue Fatima Zibouh et de l’Union des étudiants juifs de Belgique (UEJB), jeudi dernier. La soirée a été marquée par la présence de nombreux responsables belges et étrangers de différentes confessions, y compris du Maroc. «En étant présents ici, c’est notre façon de dire non à ceux qui veulent nous diviser», a déclaré Fatima Zibouh, dans son allocution. Elle a par ailleurs rappelé ses souvenirs d’il y a vingt ans à l’Université libre de Bruxelles (ULB) où, étudiante, elle a participé à créer des espaces de dialogue, avec la contribution de l’UEJB.

Ce ftour constitue l’épilogue d’une longue polémique, dont l’origine a été l’invitation de Fatima Zibouh à intervenir lors d’une conférence sur l’antiracisme et l’antisémitisme, en mars dernier, au même musée et à l’initiative de l’UEJB. A la suite de pressions, sa participation a été annulée, provoquant l’ire de l’association organisatrice et des autres intervenants invités, la sociologue Illana Weizman et le militant progressiste Jonas Pardo, formateur à la lutte contre l’antisémitisme.

L’UEJB, qui a exprimé sa solidarité avec Fatima Zibouh, a fait part elle-même de ces pressions, sans pour autant en désigner l’origine. Président de l’association, Sacha Guttmann a qualifié ces manœuvres d’«inacceptables». «L’événement que nous organisions s’inscrivait dans la perspective du dialogue entre militants de la communauté juive et militants antiracistes», s'est-il indigné. Les pressions proviendraient surtout d’un membre du conseil d’administration du Musée juif de Belgique, qui se serait opposé vigoureusement à la participation de la politologue belgo-marocaine.

Président du musée, Philippe Blondin nie quant à lui toute pression interne. Auprès du site bruxellois BX1, il affirme lui-même avoir contacté la concernée, pour lui faire part également de sa solidarité. Le jour de la conférence, les participants au même panel ont exprimé leur consternation, face aux pressions ayant fait annuler la présence de la chercheuse et militante.

«On y répondra par la convergence», promet Fatima Zibouh

Spécialiste des discriminations, Fatima Zibouh est visée fréquemment pas des propos sexistes, racistes et islamophobes. Depuis l’annonce de sa désignation à la co-direction du projet pour faire de Bruxelles la capitale de la culture européenne en 2030, elle est attaquée dans plusieurs sphères. Le dernier fait en date a été la polémique provoquée par les propos racistes et haineux de Laurent Minguet, membre de l’Académie royale de Belgique, ce qui a fait réagir l’instance après avoir été interpellée par les médias belges. Le 1er mars dernier, Fatima Zibouh a pris officiellement ses fonctions à la tête du projet de Bruxelles 2030.

Sur les réseaux sociaux et dans l’espace de parole publique, Fatima Zibouh réagit peu aux attaques, en dehors des remerciements qu’elle adresse aux auteurs d’expressions de solidarité, notamment des acteurs politiques, associatifs, chercheurs et universitaires. Elle préconise plutôt une réponse par l’action. «On y répondra par la convergence à ceux et celles qui veulent nous diviser. Ensemble, on luttera contre l’antisémitisme et toutes les formes de racisme», a-t-elle écrit, après l’annulation de sa participation à la conférence de l’UEJB.

A la suite de la nouvelle polémique sur le sujet, une tribune d’Illana Weizman et de Jonas Pardo fait savoir notamment qu’ils ont réfléchi eux aussi à se retirer de la conférence, après avoir eu connaissance des pressions sur les organisateurs. Réagissant à la réinvitation de Fatima Zibouh par le Musée juif de Belgique pour le ftour multiculturel, les deux auteurs ont souligné que «ceux et celles qui rêvent d’un monde où les femmes portant un foulard restent cloîtrées chez elles, un monde où les juifs et les musulmans ne se côtoient pas, n’ont pas réussi à l’annuler cette fois-ci». «Nous ferons en sorte que cela dure», ont-ils insisté.

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