Menu

Archive

Ramadan dans l'histoire #7 : Les Marocains sous l'Etat de Berghouatas jeûnaient le mois de Rajab

L'Emirat de Berghouatas, qui s'est établi au Maroc en 739, avait imposé à ses sujets de jeûner pendant le mois de Rajab et de manger durant le mois de Ramadan, après qu’un «Prophète» ait écrit un nouveau Coran. Récit d'histoire.

Publié
Photo d'illustration. / DR
Temps de lecture: 3'

Entre les années 739 et 742, les Amazighs du Maroc se sont révoltés contre le règne des Omeyyades au Orient à cause de leurs mauvais traitements et de l'injustice qui leur a été imposée. Ils confient à Maysara al-Matghari, un célère dirigeant amazigh de l’époque, la gestion de leurs affaires. C'est ainsi que l'Emirat de Berghouatas est né sur la côte atlantique du Maroc actuel.

Après une courte période, Maysara est assassiné par ses partisans à Tanger. Son compagnon, Tarif Ibn Malik alias Al Berghouati décide alors de se rendre au pays de Tamesna, d'abandonner l'islam et d'établir une nouvelle religion amazighe.

Abd al-Aziz al-Tha'alabi raconte dans son livre «Histoire de l'Afrique du Nord de la conquête islamique à la fin de l'État majoritaire» que Tarif Ibn Malik (Tarif Al Berghouati) est allé au pays de Tamesna pour «établir la religion et organiser ses croyances et ses règles». «Quand il a fini d’écrire (son Coran Amazigh, ndlr), il l'a remis à son fils Sahel Ben Tarif et a ordonné que les Berbères le portent».

Selon ce que confirme le livre «Le Maroc à la mémoire des pays d’Afriquiya et du Maroc» d'Abu Ubaid al-Bakri, les Amazighs de la région de Tamesna ont alors confié la gestion de leurs affaires à Tarif. Abd al-Aziz al-Tha'alabi indique dans son livre que Saleh a confié «à son fils Iliass sa religion, lui a enseigné ses lois et la jurisprudence dans ses décisions, et lui a ordonné de ne pas montrer cela à moins qu'il ne soit fort et en sécurité».

Jeûner Rajab et manger pendant Ramadan

Iliass succède ainsi à son père, qui a décidé de quitter le pays vers l'Est. Il avait l'habitude de se montrer en tant que musulman et de cacher la religion que son père lui avait confiée «par crainte et piété». Son règne dure cinquante ans et son fils, Younes, qui prend le relais après lui, fini par «proclamer leur religion, appeler à la suivre en tuant au passage de nombreuses personnes afin de la répandre».

Les sources historiques qui parlent de la religion de Berghouatas sont rares, certains les décrivant comme des Majous, tandis que d'autres font remonter leurs origines aux Juifs. Abu Ubaid Allah al-Bakri raconte dans son livre «Al Massalik Wal Mamalik» que les transactions se faisaient dans l'Etat de Berghouatas en langue amazighe, tout comme la prière, soulignant qu'ils avaient l'habitude de dire, «Abisman Yakush» par exemple pour signifier au nom de Dieu et «Makour Yakush» qui signifie «Dieu est grand». Ils «récitaient aussi la moitié de leur Coran debout et l'autre moitié assis», poursuit-il.

Abd al-Aziz al-Tha'alabi confirme dans son livre que cette religion était «basée sur la reconnaissance des prophéties, celle de Saleh Ben Tarif et la prophétie de tous ceux qui ont pris le commandement après lui». Ils croyaient aussi que le livre que Saleh a produit «était une révélation de Dieu Tout-Puissant dont ils ne doutent pas».

La même source a confirmé qu'il leur était imposé de «jeûner Rajab et de manger durant le Ramadan». De plus, ils devaient «prier cinq fois le jour et cinq autres la nuit, et de sacrifier (du bétail, ndlr) le jour coïncidant avec le 11 Dou Al Hijja». Les Marocains devaient aussi «jeûner chaque vendredi alors que leurs prières ne comportaient ni appel à la prière ni préludes».

Une religion à part entière

Dans «Al Istiqsa fi Akhbar Al Maghrib Al Aqsa» d’Ahmed Ben Khalid Naciri, ce dernier pointe «l'égarement qui a été légiféré pour eux», notant que les Marocains de cet état reconnaissaient la prophétie de Saleh, «jeûnaient le mois de Rajab et mangeaient le mois de Ramadan».

Selon le livre «Histoire de l'État d'Andalousie» d'Inas Muhammad Al-Bahiji, Saleh Ben Tarif avait légitimé «pour ses partisans de jeûner Rajab et de manger le Ramadan». Il leur a aussi permis d'épouser «plus de quatre femmes» et de divorcer et leur a «interdit d'épouser des cousines et les femmes musulmanes». Saleh Ben Tarif a également légitimé de tuer le voleur et de lapider ceux qui commettent l'adultère.

Le Coran des Berghouatas, que Saleh Ben Tarif a appelé à suivre, comprenait 80 «sourates» dont la plupart portaient des noms des prophètes connus depuis Adam, dont la première était «sourate Ayyub» et la dernière «sourate Younes». Il comprenait aussi des sourates portant des noms d’animaux». Dans son «Coran», Saleh a également interdit de manger des œufs et des coqs, car le coq était considéré comme leur muezzin. De nombreux Marocains considèrent encore le coq comme un muezzin à notre époque.

Après la création de l'État almoravide, ayant adopté le malikisme, son fondateur Abdellah Ben Yassine a cherché à éliminer les adeptes d'autres religions et sectes au Maroc. Il essuya toutefois un échec face au Royaume des Berghouatas. Son successeur, Abu Bakr Al-Lamtouni, continua l’extension et réussira à éliminer une partie de l’Etat de Barghoutas.

Hassan al-Wazzan alias Léon l’Africain souligne que les victimes de la campagne almoravide avaient dépassé les 2 millions de morts. La conquête, ayant permis de détruire «40 villes» pour reprendre son chiffre, avait marqué le début de la fin d’un royaume au Maroc qui disposait, depuis plus de trois siècles, de sa propre religion.

Soyez le premier à donner votre avis...
Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com