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Grand Angle

Pays-Bas : Une «immense perte» avec la disparition de Mohamed Rabbae, porte-parole des minorités  

La presse et le monde politique aux Pays-Bas ont déploré, ce mercredi, la disparition du Néerlando-marocain Mohamed Rabbae à l’âge de 81 ans. Parlementaire de 1994 à 2002 sous les couleurs de la Gauche verte, il a défendu pendant de longues années les droits des étrangers et a milité contre le racisme et les discriminations.

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Mohamed Rabbae est décédé, mardi aux Pays-Bas, à l'âge de 81 ans. / DR
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Le Conseil national des Marocains des Pays-Bas (LBM) a déploré, mardi, la disparition de son fondateur, le Néerlando-marocain Mohamed Rabbae. Ancien homme politique, ex-membre du Parti GroenLinks (Gauche verte) et militant néerlandais pour les droits des étrangers, il était le premier marocain à devenir député parlementaire aux Pays-Bas.

Le défunt est né le 8 mars 1941 à Berrechid, au Maroc. Dans son pays d’origine, il a été attaquant Tihad Athletic Sport (TAS), pendant un temps. Militant de la gauche et étudiant en philosophie, il avait fui le royaume vers les Pays-Bas en 1966. Si des sources avancent qu'il craignait son arrestation pour ses positions contre le régime du roi Hassan II, d’autres rapportent qu’il aurait quitté le pays après avoir été «appelé au service militaire».

Aux Pays-Bas, Mohamed Rabbae étudie l'économie à Amsterdam, après avoir travaillé dans une conserverie puis comme vendeur chez Vroom & Dreesmann (V&D), une chaîne de grands magasins néerlandaise. Au début des années 1980, son militantisme pour les droits des étrangers aux Pays-Bas lui vaut d’être nommé directeur de la Fondation des étrangers (Stichting Buitenlanders) à Brabant. En 1983, il devient directeur du Centre néerlandais pour les étrangers (NCB). Un poste qui lui permet de devenir «un important porte-parole des minorités».

Du militantisme pour les droits des étrangers au Parlement des Pays-Bas

Onze ans plus tard, il adhère au parti Groen Links. La même année, il devient le premier marocain à accéder au poste de député à la Chambre des représentants des Pays-Bas. Un poste qu’il occupera de 1994 à 2002. Durant ses mandats, le Néerlando-marocain était notamment membre de la commission d'enquête sur les méthodes non autorisées de la police hollandaise.

Mohamed Rabbae aimait s'impliquer dans le débat public, pas toujours à la satisfaction de son parti. Dans sa défense des étrangers et des musulmans aux Pays-Bas, il se heurtait régulièrement à l'aile libérale au sein de Groen Links. Ainsi, en 1994, il avait confié dans une interview qu'il comprenait les musulmans qui voulaient interdire le livre «The Satanic Verses» de Salman Rushdie, en expliquant que son interdiction aux Pays-Bas devait se faire par des moyens légaux et démocratiques.

De plus, après les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis, il a appelé les comédiens à ne pas utiliser le nom d'Oussama ben Laden et les organisations terroristes dans leurs shows, expliquant qu'ils pourraient encore alimenter la polarisation entre musulmans et Néerlandais de souche. Une réaction qui avait provoqué une polémique, notamment au sein de son parti.

En 2002, il se retire de la politique nationale, après avoir été placardé par sa formation politique. Il est alors élu échevin de Leiden pendant quelques années. Un poste duquel il démissionne, car se sentant «toujours politiquement responsable», pour des erreurs commises pourtant lors d’une période où il était absent.

Un «combattant infatigable contre le racisme et pour l'égalité»

En 2008, après la création du LBM, Mohamed Rabbae a porté plainte contre le court-métrage «Fitna» du leader du PVV. L'ancienne dirigeante de Groen Links, Femke Halsema, avait qualifié cette plainte contre Geert Wilders de «tentative de censure» poussant le Néerlando-marocain à rompre définitivement avec son parti. Deux ans plus tard, en plein polémique sur les propos de Geert Wilders sur les Marocains, Mohamed Rabbae dépose une deuxième plainte, suite à laquelle le dirigeant du PVV a finalement été reconnu coupable.

En 2014, Mohamed Rabbae avait soudainement disparu de la vie publique aux Pays-Bas, à la suite d'une hémorragie cérébrale qui le privera de marcher, de lire et d’écrire. En 2020, des sources avaient indiqué que l'ancien député vivait dans une maison de retraite de la ville de Bussum. 

Sa disparition a fait réagir plusieurs personnalités aux Pays-Bas. «Avec la mort de Mohamed Rabbae, les Pays-Bas perdent une icône», a indiqué sur Twitter l'actuel dirigeant de Groen Links, Jesse Klaver. «C'était un militant, un politicien, un dirigeant. Un combattant infatigable contre le racisme et pour l'égalité. C'est à nous tous de continuer son combat pour la justice», a-t-il ajouté. Le maire d'Arnhem Ahmed Marcouch a déploré le «départ d'un grand pionnier».

De son côté, Farid Azarkan a décrit «une personne forte et sociale qui a pratiqué la politique avec un dos droit». «Il a lutté contre le racisme, la discrimination et la xénophobie. Merci pour votre combat et votre inspiration», a-t-il ajouté, en déplorant une «immense perte».

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