Menu
Connexion Yabiladies Ramadan Radio Forum News
Poèmes-textes....
N
12 avril 2010 17:03
Sensation

Par les soirs bleus d'été, j'irai dans les sentiers,
Picoté par les blés, fouler l'herbe menue :
Rêveur, j'en sentirai la fraîcheur à mes pieds.
Je laisserai le vent baigner ma tête nue.

Je ne parlerai pas, je ne penserai rien :
Mais l'amour infini me montera dans l'âme,
Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la Nature, - heureux comme avec une femme.

(Rimbaud)
♪ ♥ ♫ ♪ ♥ ♫ ♪ ♥ ♫ ♪ ♥ ♫
o
18 avril 2010 20:06
HOMMAGE A LA VILLE DE TELEMCEN

Pour obtenir protection, Telemcen a tendu
ses deux mains et a crié à Dieu la formule
sacrée du Pèlerinage : << Me voici! >>
Telle fut la suprême beauté
de son appel!

Elle a dépouillé l'ample voile
qui la protégeait des regards indiscrets.
Ô Abd al Qâdir, prends en charge ce cri
et rafaîchis ton coeur avec l'eau pure
de sa présence charnelle.

Voici le jardin de ses deux joues:
vois comme ses fleurs se sont épanouies!
N'accepte pas de fréquenter d'autre séjour,
d'autre jardin, si chatoyant soit-il.

Combien d'amoureux ont désiré
ardemment cette beauté à tes yeux offerte!
Les ont repoussé loin d'elle son fier regard
et son insistant refus.

Combien ont cherché à effleurer des lèvres
le grain de beauté au sommet de sa joue jonchée de roses!
Elle fut avare et se détourna,
empressée de fuir leurs avances.

Combien de prétendants n'ont pas été reconnus
dignes d'elle, ne pouvant pas même lui offrir
de quoi garnir de broderies
un seul pan de son manteau!

Nul ne put lui faire accepter
le moindre engagement, et jamais
un séducteur ne sut arracher
son agrément.

La pucelle ne permettait aucune démonstration
de sentiments, et ses prétendants
n'ont pas eu accès
à sa très pure clarté.

Elle a serré au tour de sa taille
la ceinture du refus, afin de garder pour elle
sa perfection, et aucun n'a pu savourer
le doux effleurement de ses lèvres
carminées.

A tous, elle a manifesté des prodiges
de ruse, de résistance et sévérité,
murant aussitôt les portes qu'ils ouvraient
pour parvenir à leurs fins.

Elle a frustré l'attente des corrupteurs,
grands pourvoyeurs de rapports mensongers,
est ses ennemis - là-bas -
furent empêchés d'atteindre leur but.

A l'heure de trancher les liens qui entravaient
Tlemecen, preuve a été donnée,
substantielle, évidente,
que seul pouvait la délivrer

celui qui s'ouvrait aux idées de progrès
en son for intérieur aussi bien qu'au combat ...
seul à même en ce siècle
de défendre son intégrité!

C'est alors que j'ai appris sa décision :
son choix délibéré m'établirsur le siège
de l'autorité, de me désigner au service
de sa grandeur.

Ne connaissant en ce pays aucune âme
mieux dévouée que la mienne à sa noblesse,
mieux au fait de ses droits
et de son éclat,

J'ai couru vers elle d'un cœur résolu,
et la victoire fut à la mesure de mon élan.
Ainsi j"ai pu payer, par amour,
son douaire, et la guérir
de son mal.

Je suis devenu son époux, elle m'a été
accordée selon les règles: oui, elle fut ma conjointe,
mon domaine, et j'ai porté haut
son étendard.

je l'ai ornée d'une parure de gloire,
dont la trame est fastueuse.
Elle s'est levée, tout étonnée, étalant
sous le ciel les franges de sa robe.

Et elle s'est écriée : << Ô Abd al-Qâdir,
ô cœur libérateur impatient de secourir
les hommes livrés à l'océan
de leurs passions,

puisque tu as conquis de force
les clés de cette ville, et avec elle
la gloire, par toute l'Algérie,
augmente ma puissance,
et noue pour moi alliance avec les cités
de Wahrane et d'Al-Marsâte :

car je sais que l'une et l'autre,
et tous les habitants que contiennent leurs murs,
ont obtenu sous la protection de ton sabre
l'agrément de leurs souhaits!>>

L'ÉMIR ABD EL - KADER
o
18 avril 2010 20:07
LES AMANTS SACRIFIÉS

Aux amants passionnés, il faut l'acquiescement
aux décrets que l'amour a prononcés pour eux:
jetés à terre, piétinés par son mépris,
ils ne craignent ni mal ni dure maladie.

Le blâme des censeurs, ils ne l'entendent point,
et restent sourds aux meilleurs conseils;
si donc tu ne crains pas d'affronter le danger,
du moins n'affecte pas l'ignorance, jeune homme.

Mon âme est la rançon de tous ceux que l'amour
a rapprochés de moi, même si le regard
n'a passé que furtif: voilà l'engagement,
alors que pour certains, amour n'est que bluette.

Ils ont pris le départ, mais n'ont point persisté
dans la course glorieuse où triomphe l'amour:
ils ont rompu le pacte avec l'unique Amant,
qui reste malgré tout fidèle à son serment.

Arrête et reçois la confidence plaintive
qui raconte la mort d'un jeune adolescent.

Ils l'ont tué et lui-même s'était forgé
une obligation de mourir par l'amour.

La flèche d'un coup d'œil, lancée à l'improviste,
s'est plantée en son cœur sans qu'il s'en apperçût,
il languit et mourut, consumé par l'amour,
sans être parvenu au but tant souhaité.

Un regard. Il aima de toute son ardeur.
Il demanda l'étreinte, on la lui refusa.
Dans la passion mortelle, il voulut demeurer,
sans accepter d'échange et sans consolation.

MARYANA MARRACHE
o
18 avril 2010 20:08
Je vais vous dire ma palette
cri Noir d'alerte saccadant l'inaudible
Blanc solennel dardant l'éphémère
Jaune miel reclus dans ma lutte
Bleu blême transperçant la transparence
Vert irradiant les marches nocturnes
Rouge taraudant la pacotille des idées
Gris déposant sur l'horizon
l'œuf vibrant de l'aurore
Rose des vents alliés
soufflant les rides du monde
Des mots
de pauvres mots
pour dompter le taureau invisible des nuées

Abdellatif Laâbi
o
18 avril 2010 20:09
La solitude n'es pas une tare
qu'il faille cacher
avec la feuille de vigne
des discours cupides
Quand je me sens seul
c'est de compassion
pour toutes les solitudes

Abdellatif Laâbi
o
18 avril 2010 20:09
Il trouve le temps pour chanter :
En t'attendant, je ne parviens pas à t'attendre,
je ne peux lire Dostoïevski,
Écouter Oum Kalsoum ou la Callas
Ou d'autres encore. En t'attendant, les aiguilles
De ma montre tournent à rebours,
vers un temps sans espace.
En t'attendant, je ne t'ai pas attendue,
J'ai attendu l'éternité.

Mahmoud Darwich
o
18 avril 2010 20:10
Il lui demande : Quelle fleur aimes-tu?
Elle répond: j'aime les œillets... s'ils sont noirs.
Il dit : où m'emportes-tu
Quand les œillets sont noirs?
Elle dit : Au foyer de la lumière en moi,
Et dit : Et plus loin... plus loin... plus loin... plus loin...

Mahmoud Darwich
o
18 avril 2010 20:11
AU - DELÀ DE L'AMOUR

Dis-moi, au-delà de l'amour,
dont j'ai parcouru le chemin,
connais-tu la nouvelle étape
qui conduirait en un lieu
propice à l'heureuse rencontre?
Car l'amour en ce cœur meurtri
n'a fait que prolonger l'exil

BACHAR IBN BOURD (mort en 783)
o
18 avril 2010 20:11
ALARMES

Oui, par Dieu,
je souhaite d'être ensorcelé
par la magie
de tes yeux,
et pourtant,
je crains de descendre dans l'arène

des amoureux,
prêts à la lutte.

BACHAR IBN BOURD
o
18 avril 2010 20:12
JEUX CRUELS

Je pleure sur ceux
qui m'ont fait goûter la saveur
de leur affection,
puis, dès qu'ils m'eurent
éveillé au désir, se sont
assoupis.

Ils m'ont engagé à me tenir
debout,
et lorsque je fus levé,
portant avec courage le fardeau
que leur affection
m'a imposé,
ils se sont empressés
de s'asseoir.
Je sortirai donc de ce monde,
et votre amour
toujours vivant, dans cette poitrine,
sous mes côtes décharnés,
personne jamais
n'en sentira la présence.

Entre la tristesse
et moi-même,
j'ai noué de longues relations,
qui ne cesseront plus jamais,
à moins que ne cesse un jour
l'éternité.

BACHAR IBN BOURD
o
24 avril 2010 20:36
PASSION ILLICITE

Plut-il à Dieu que je fusse un beau pommier
qu'aurait produit, telle une terre,
son corps, ou une fleur bien parfumée
droite éclose dessus sa tige.

Pourquoi donc ces reproches à ma personne?
Oui, à si fort penser à elle,
je suis comme étourdi de trop de vin.
Mais ceux qui ignorent l'ivresse,
quel droit jugement peuvent-ils prononcer
à l'encontre de qui est saoul?

BACHAR IBN BOURD
o
24 avril 2010 20:37
LE PREMIER AMOUR

La séparation m'a fait boire
à petites gorgées
l'infusion de coloquinte;
la séparation
m'a rendu orphelin
bien que je n'eusse perdu
aucun être cher
de ma famille.

Il s'en faut de peu que je ne meure!
Mais ce n'est point là
ma désolation.
L'angoisse de mon âme est née
de ce que la mort
ne soit pas déjà venue.

En combien de maisons
l'homme arrive à s'attarder
au cours de sa vie!
Et pourtant
son long gémissement
s'attache toujours
à sa première demeure.

Déménage d'un lieu vers un autre
ton pauvre cœur
tourmenté par le désir;
le véritable Amour
est toujours celui
qui, le premier,
s'y est établi.

ABOU - TAMMAM (804/846)
o
24 avril 2010 20:38
M'AS-TU DONC OUBLIÉE ...

Elle s'est détournée
de lui,
et la séparation,
comme une corde perverse,
a tiré vers elle le faix
d'une lourde épreuve.
Alors le facile et souriant
<< au revoir >> a fait place
au dur << adieu >>.

Elle a pleuré
son absence
autant de jours qu'a renfermés
la vie en sa poitrine,
solitaire
de tout embrassement,
alors que le désir n'a cessé
d'y habiter
sans désemparer.

Le disque brillant
de la lune,
l'as-tu oublié? Dit-elle?
Froidement j'ai répondu :
Si le soleil se consent
à disparaitre,
la lune n'apparaît point.

Elle déroula
un collier de tendresse,
des larmes, perles
égrenées sur les joues,
dont un orfèvre
avait disposé l'ordre
savant dessous sa paupière.

Non, le ruissellement
des pleurs
ne fera point plier
ma constance,
même si toute source jaillissante
eût disposé des larmes
de toute paupière
sur ses joues.

ABOU - TAMMAM
o
24 avril 2010 20:39
Tandis que la poésie agonise
dans les convulsions du dernier
fou amour
et que le règne de barbarie enveloppe
les derniers monuments de notre fragilité
Tandis que les dinosauriens
percent la coquille de l'atavique somnolence
et se répandent parmi les ruines de nos mains
Tandis que le refroidissement de la planète
atteint grièvement le cœur de l'homme
et que les rares survivants émigrent
paniquement
vers une hypothétique équateur
Tandis que des larmes de pierre
brouillent ma vue ...
Non
je ne veux pas y croire

Abdellatif Laâbi
o
24 avril 2010 20:40
j'ouvre toutes grandes les fenêtres
j'accueille
le silence épique
la terrible rumeur
vrille mon crâne
traverse
je titube dans le tourbillon
du vent ricanant
m'accroche aux livres
à la guitare de l'Aimée
aux miroirs sans tain
où je plonge la tête
au rayon de soleil qui réfracte
dans ma tasse de café
et je me relève
ayant empoigné par les cornes
le minotaure du silence

Abdellatif Laâbi
o
7 mai 2010 16:18
L'effort humain

n'est pas ce beau jeune homme souriant
debout sur sa jambe de plâtre
ou de pierre
et donnant grâce aux puérils artifices du statutaire
l'imbécile illusion
de la joie de la danse et de la jubilation
évoquant avec l'autre jambe en l'air
la douceur du retour à la maison
Non
l'effort humain ne porte pas un petit enfant sur l'épaule droite
un autre sur la tête
et un troisième sur l'épaule gauche
avec les outils en bandoulière
et la jeune femme heureuse accrochée à son bras
L'effort humain porte un bandage herniaire
et les cicatrices des combats
livrés par la classe ouvrière
contre un monde absurde et sans lois
L'effort humain n'a pas de vraie maison
il sent l'odeur de son travail
et il est touché aux poumons
son salaire est maigre
ses enfants aussi
il travaille comme un nègre
et le nègre travaille comme lui
L'effort humain n'a pas de savoir-vivre
l'effort humain n'a pas l'âge de raison
l'effort humain a l'âge des casernes
l'âge des bagnes et des prisons
l'âge des églises et des usines
l'âge des canons
et lui qui a planté partout toutes les vignes
et accordé tous les violons
il se nourrit de mauvais rêves
et il se saoule avec le mauvais vin de la résignation
et comme un grand écureuil ivre
sans arrêt il tourne en rond
dans un univers hostile
poussiéreux et bas de plafond
et il forge sans cesse la chaîne
la terrifiante chaîne où tout s'enchaîne
la misère le profit le travail la tuerie
la tristesse le malheur l'insomnie et l'ennui
la terrifiante chaîne d'or
de charbon de fer et d'acier
de mâchefer et de poussier
passe autour du cou
d'un monde désemparé
la misérable chaîne
où viennent s'accrocher
les breloques divines
les reliques sacrées
les croix d'honneur les croix gammées
les ouistitis porte-bonheur
les médailles des vieux serviteurs
les colifichets du malheur
et la grande pièce de musée
le grand portrait équestre
le grand portrait en pied
le grand portrait de face de profil à cloche-pied
le grand portrait doré
le grand portrait du grand divinateur
le grand portrait du grand empereur
le grand portrait du grand penseur
du grand sauteur
du grand moralisateur
du digne et triste farceur
la tête du grand emmerdeur
la tête de l'agressif pacificateur
la tête policière du grand libérateur
la tête d'Adolf Hitler
la tête de monsieur Thiers
la tête du dictateur
la tête du fusilleur
de n'importe quel pays
de n'importe quelle couleur
la tête odieuse
La tête malheureuse
la tête à claques
la tête à massacre
la tête de la peur.

Jacques Prévert (recueil Paroles)

[labouquinerie.groups.vox.com]
o
7 mai 2010 16:27
Le premier matin après ce siège,
Une jeune fille s'en ira vers son amour
Vêtue d'une chemise bariolée et d'un pantalon gris,
Le moral transparent comme les abricotiers en mars :
Toute cette journée nous appartient,
Toute, mon amour, ne m'attarde pas,
Un corbeau pourrait se poser sur mon épaule ...
Et tu croqueras la pomme en attendant l'espoir,
En attendant ton aimé qui,
Peut-être n'arrivera pas.

Mahmoud Darwich
o
7 mai 2010 16:27
"Lui ou Moi"
Ainsi débute la guerre. Mais
Elle s'achève par une rencontre embarrassante,
"Lui et Moi".


**

"Je suis elle pour l'éternité",
Ainsi débute l'amour. Mais
Il s'achève par un adieu embarrassant :
"Moi et elle"


Mahmoud Darwich
o
7 mai 2010 16:28
Je ne t'aime pas ; je ne te hais pas,
Dit le prisonnier à l'enquêteur. Mon cœur est plein
De ce qui ne te regarde pas. Il déborde de parfum de
la sauge.
Mon cœur est innocent, lumineux, plein,
Et par le temps dans le cœur pour la mise à l'épreuve.
Oui,
Je ne t'aime pas. Qui es-tu pour moi pour que je t'aime?
Es-tu quelque partie de mon moi, un rendez-vous pour
le thé,
La raucité d'une flûte, une chanson, pour que je t'aime?
Mais je hais la captivité et ne te hais pas,
Ainsi parla le prisonnier à l'enquêteur :
Mes sentiments ne te regardent pas,
Mes sentiments sont ma nuit privée ...
Ma nuit qui se meut sous les draps, libre
De métrique et de rimes!


Mahmoud Darwich
o
7 mai 2010 16:29
APRÈS LE GOLGOTHA

J'ai vécu avec le Messie
avec lui je suis mort et ressuscité
Ma voix vibrait partout
une voix qui semblait ne pas être la mienne
allumant un feu que j'ignorais
et pourquoi le feu? Pour qui
Donne-moi une ombre, de l'eau fraîche
que j'accroche mes souvenirs à
un mur dans une chambre abandonnée
La foule s'est dispersée, les invités sont partis
et la voix vibre en vain
comme si elle était celle d'avant la mort et le Golgotha
Sur mes lèvres, un reste de miel
un reste de coloquinte
Suis-je venu après la mort pour écouter ma voix
me rattacher au vide que j'ai quitté?
Donne-moi une ombre, et toi
mets dans ton eau un morceau de glace
Le soleil est brûlant. La vie après la mort
est un fardeau. Ma voix aime le feu
Pour qui? Pour qui?
J'ai fermé mes paupières, et sur mes lèvres
un reste de miel, un reste de coloquinte

Jabra Ibrahim Jabra
Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com
Facebook