Menu

Interview

«L’accord israélo-émirati est une normalisation entre services de renseignements»

Le jeudi 13 août, les Emirats arabes unis et Israël ont scellé officiellement leur alliance par un accord portant sur l’établissement de relations diplomatiques. Une normalisation que le président de l’Association marocaine de soutien à la lutte du peuple palestinien, Mohamed Benjelloun Anadaloussi, voit plus comme une normalisation entre services de renseignements plutôt qu'un pas en faveur d'un processus de paix.

Publié
DR
Temps de lecture: 2'

Comment avez-vous accueilli, au sein de l’Association marocaine de soutien à la lutte du peuple palestinien, l'établissement des relations diplomatiques entre les Emirats arabes unis et Israël ?

Auparavant le pouvoir aux Emirats recrutait, en catimini, des éléments arabes qui défendaient les politiques des Etats-Unis de Donald Trump et d’Israël de Benjamin Netanyahu. Désormais avec la signature, hier, de cet accord, Abou Dhabi va jouer ouvertement et officiellement ce rôle.

Certaines voix prétendent que cet accord va servir les intérêts des Emirats et des Palestiniens. Partagez-vous cet avis ?

Je ne le crois pas. Cette normalisation ne va servir en aucun cas les intérêts du peuple des Emirats arabes unis. J'en suis parfaitement convaincu. En revanche, le grand bénéficiaire est le mouvement sioniste sous le leadership de Benjamin Netanyahu.

L’accord n’apportera rien non plus pour les Palestiniens. Netanyahu est décidé à poursuivre ses plans visant à annexer des terres en Cisjordanie. Il l’a d’ailleurs clairement signifié hier lors de sa conférence de presse, apportant ainsi un sérieux démenti aux déclarations faites par le prince héritier émirati Mohamed Ben Zayed et par le président américain Donald Trump.

Cet accord est loin d’être un pas vers la paix mais juste une normalisation qui profite aux services de renseignements des deux pays. Les Emirats arabes unis ont grandement besoin de la technologie israélienne en la matière pour surveiller ses opposants qu’ils soient à l’intérieur de son territoire ou à l’extérieur.

Et qu’en est-il des propres intérêts de Ben Zayed ?  

Cette normalisation constitue une dangereuse rupture avec la traditionnelle politique suivie par ce pays sur le dossier palestinien. Je ne crois pas qu’elle sera dans l’intérêt du prince héritier qui veut jouer un rôle politique plus grand que lui et plus grands que son pays, comme on a pu l'entrevoir récemment au Yémen et en Libye ; sans oublier son double jeu avec l’Iran.  

Et même Donald Trump ne devrait pas bénéficier de cet accord pour sa réélection le 3 novembre prochain, car d’une part le vote juif est traditionnellement pro-Démocrate et d’autre part les indicateurs économiques aux Etats-Unis sont dans le rouge à cause de sa mauvaise gestion de la pandémie du coronavirus.

Cet accord signé hier ne serait pas le prélude à une prochaine normalisation des relations entre Israël et l’Arabie saoudite, sachant que Riyad et Abou Dhabi ont la même position sur le «Deal du siècle» ?

Il est difficile pour le royaume wahhabite d’emboîter le pas aux Emirats. Certes le prince héritier, Mohamed Ben Salman, a commencé à se rapprocher d’Israël mais le roi Salman a toujours affirmé dans ses discours l’engagement de son pays à respecter les résolutions de la Ligue arabe à propos de la cause palestinienne.  

Allez-vous réagir à cet accord au sein de l’Association marocaine de soutien au combat du peuple palestinien ?

Nous allons publier un communiqué de condamnation et ensuite coordonner nos prochains actes de protestations avec les partis politiques et les syndicats ainsi que les autres mouvements, y compris Al Adl wal Ihssane, en vue d’organiser une action commune.

Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com