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Grand Angle

Maroc : Les élèves du privé sont-ils interdits de rejoindre des établissements publics ?

Après de fortes tensions entre parents d’élèves et groupes scolaires privés, nombre de familles ont décidé de transférer leurs enfants vers l’enseignement public. Mais le ministère de l'Education et les académies ne l'entendent pas de cette oreille.

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Photo d'illustration / DR.
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Depuis quelques jours, des internautes comme des parents s’interrogent sur le sort des élèves du privé, alors qu'ils ont décidé un transfert vers un établissement public, pour la rentrée prochaine. Ces mouvements sont en effet impactés par les tensions nées entre les tuteurs et certains groupes scolaires, pendant le confinement sanitaire. Dans ce contexte, les parents expriment leur incompréhension quant au blocage par les académies régionales. Certains affirment même que ce refus serait motivé par un écrit du ministre de l’Education nationale.

Une interdiction qui jusqu'à présent n'est pas formelle, rapporte le Syndicat national de l’enseignement (SNE) au sein de la Confédération démocratique du travail (CDT). Son secrétaire général, Abdelghani Raki a indiqué à Yabiladi, ce vendredi, qu’il n’y avait pas de «consigne écrite signifiant expressément le refus de ce transfert aux élèves». «Constitutionnellement et conformément à toutes les procédures administratives et légales en vigueur, un ministre de l’Education nationale ne peut interdire à des parents de choisir si leurs enfants continueront leurs études dans le privé ou dans le public», souligne le syndicaliste.

Transferts possibles mais découragés

Mais Abdelghani Raki reconnait que le ministre encourage les familles à garder leurs enfants dans les écoles privées. «Lors de sa récente intervention parlementaire, M. Amzazi a dit que si une importante partie des élèves venait à passer au public, cela pouvait accentuer le surnombre des classes des écoles. Cela constitue un appel aux familles et aux académies à ne pas transférer les élèves du privé vers le public», explique-t-il.

Au sein de la Chambre des conseillers, le groupe parlementaire de la CDT s’est d’ailleurs saisi de la problématique. «A la question écrite qui a été adressée à Amzazi, le ministre a répondu qu’il n’avait pas demandé aux académies régionales d'interdire aux élèves du privé de s’inscrire dans une école publique», souligne Abdelghani Raki. Cela dit, il existe des exigences administratives pour le transfert d’un établissement à l’autre, qui obéit «à la même procédure pour tous les écoliers», souligne le syndicaliste.

Consulté par notre rédaction, un document de la direction générale de l’Education nationale, au sein de l’Académie régionale de Fès-Meknès qui est concernée par un important mouvement des élèves, rappelle cette procédure. Elle obéit à la circulaire ministérielle n°12, du 18 janvier 1990.

Pour se réinscrire dans une école publique, les parents devront ainsi remplir une demande via Internet, sur les plateformes du ministère de tutelle, puis déposer un dossier au sein de l’école privée. Ce dernier est constitué d’une attestation de départ, une copie de l’acte de naissance, des bulletins des deux semestres passés, de la pièce d’identité du tuteur, ainsi que le reçu de demande d’inscription remplie sur Internet.

Le surnombre «ne doit pas devenir un alibi» de refus

Les écoles privées sont tenues de réunir les dossiers des demandeurs dans un délai convenu, puis les faire parvenir aux services de la direction générale de la province concernée. «Les requêtes sont triées et chaque élève est affecté à l’établissement public le plus proche de son lieu de résidence, ou dans le cas échéant celui où des places sont disponibles», explique Abdelghani Raki.

«Si le souci est le manque d’infrastructure, comme le sous-entend le ministre, cela ne doit pas devenir un alibi ou un argument de pression pour contraindre des enfants à rester dans le privé», tance le secrétaire général du SNE. 

«S’il n’y a pas assez de classes et d’enseignants, c’est au ministère de faire usage de ce que lui permet la loi l’obligeant constitutionnellement à répondre à toutes ces demandes, quitte à étatiser des groupes scolaires.»

Abdelghani Raki

Outre les considérations logistiques et de ressources humaines, ces transferts sont parfois mis à mal par les écoles privées elles-mêmes, ce qui accentue la pression sur certains parents. En juin dernier, un groupe scolaire à Fès a été vivement critiqué par des familles, pour avoir bloqué l’octroi des document nécessaires aux dossiers de transfert des enfants. Face à cette situation, un avocat désigné par les tuteurs légaux a saisi la direction générale de l’Education nationale de la province, pour ne pas menacer la prochaine rentrée scolaire.

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