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Grand Angle

Coronavirus : Des Belgo-marocains fustigent la chaotique organisation de rapatriement

Plusieurs cafouillages ont émaillé la préparation du rapatriement des Belgo-marocains bloqués au Maroc. Certains n'hésitent pas à qualifier de «fiasco» l'opération qui vient de reprendre cette semaine.

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Aéroport Mohammed V de Casablanca / DR.
Temps de lecture: 3'

«Plusieurs situations kafkaïennes» ont entaché la procédure de rapatriement spécial des Belgo-marocains, bloqués au Maroc après la suspension des vols à cause de la pandémie de coronavirus. A la veille d’un vol spécial organisé en collaboration entre les autorités du Maroc et de la Belgique, la plate-forme des Belgo-marocains bloqués dans le pays dénonce une gestion qui tourne au «fiasco», particulièrement «à cause des bugs de la partie belge», selon Mohsin Mouedden, contacté vendredi par Yabiladi.

«Des Belges ont été envoyés à la wilaya de Tanger pour tamponner une attestation des autorités belges, sans que l’ambassade n’ait prévenu la mairie, et donc refus logique des fonctionnaires marocains», fustige la plateforme. Le coordinateur relate une scène chaotique : «Les autorités locales se sont retrouvées à gérer l’arrivée massive de personnes, la veille d’un premier mai dont le lendemain est un week-end, sans ne rien comprendre.» C’est à 17h30 le jour même que l’ambassade de Belgique au Maroc a expliqué «laconiquement via Messenger» la non-obligation de tamponner ces permissions.

Un bébé de cinq mois en séparation familiale forcée

Les défauts de gestion les plus criants se situent au niveau humanitaire, notamment à travers le cas de Lamia Harrak. Cadre bancaire à Bruxelles où elle est en ce moment, son bébé de cinq mois est resté bloqué au Maroc depuis la suspension des voyages. Pourtant, la maman jure n’avoir aucunement abandonné son enfant. «Des membres du personnel de l’ambassade de Belgique au Maroc m’ont signifié que je n’étais pas une bonne mère, en me disant comment ça se fait qu’on laisse un enfant en si bas âge, alors que mon départ était précipité seulement par ma reprise après mon congé de maternité, puis mon fils devait me rejoindre avec son père», nous explique-t-elle. Face à sa détresse et n’ayant pas eu de visibilité sur la date des vols, la maman a été invitée par l’ambassade à «ne pas dramatiser».

«Cela fait un mois et demi que les autorités belges me promettent que mon fils serait rapatrié. Après leur avoir désigné des accompagnateurs parmi la famille, qui doivent également être rapatriés, on m’a informé qu’il ne figurait plus sur la liste des voyageurs, avant qu’il ne soit réinclus ce vendredi grâce aux efforts de la partie marocaine», raconte-t-elle en évoquant un ascenseur émotionnel ayant nécessité un suivi médical de la cellule mise en place par le Maroc.

«L’ambassade me disait encore qu’il serait rapatrié ‘s’il remplit les critères’, mais il est entièrement éligible par le fait qu’il soit mineur séparé d’un de ses parents», fustige encore la mère. «Ils nous ont envoyé des mails à 4h du matin, un jour férié pour confirmer que ma cousine serait parmi les passagers mais pas le bébé, dont le nom a fini par être retenu ce vendredi après-midi après que nous ayons saisi urgemment le ministère délégué chargé des MRE», raconte encore Lamia. Elle assure que le père de l’enfant fait également partie du voyage.

Selon elle, «le ministre Philippe Goffin a mis en œuvre ses critères mais laisse entendre que le blocage vient du Maroc alors que c’est l’inverse». C’est ce que confirme de son côté Mohsin Mouedden, assurant que «la représentation belge prend des décisions et leur contraire, en informant les premiers concernés à la dernière minute et parfois même sans avertir ses partenaires marocains».

Un couple âgé séparé et non-inclus aux navettes spéciales

Ce défaut de coordination fait que certaines villes ont fini par ne pas être incluses aux circuits des navettes devant conduire les rapatriés de là où ils se trouvent à l’aéroport international de Casablanca. Par conséquent, un couple de personnes âgées et souffrant de maladies chroniques est livré à son sort à Nador. «Ma mère a été informée qu’elle devait être à l’aéroport samedi, mon père voyageant pourtant avec elle ayant été exclu de la liste», dénonce Asma Asadi, fille des deux concernés.

«Premièrement, il est impossible que ma mère laisse mon père seul à Nador et deuxièmement, même si elle fait partie des voyageurs et qu’elle aurait voulu partir, aucun transport n’a été prévu pour elle.»

Asma Asadi

Pour cause, ce couple serait le seul identifié à Nador dans le cadre des rapatriements d’urgence et «les autorités belges n’ont pas fait le nécessaire pour que la ville soit intégrée au circuit, sachant qu’un taxi ne peut pas faire le trajet jusqu’à Casablanca à lui seul, qu’il sera difficile de lui avoir une autorisation et que pour être sur place à midi, il faut faire un départ à trois heures du matin au moins», fustige la Belgo-marocaine.

«J’ai envoyé les certificats médicaux de mes parents, expliqué qu’ils étaient au Maroc pour les funérailles de mon oncle, lui-même MRE dont la dépouille a été rapatriée d’Espagne, qu’ils devaient rentrer mi-mars et qu’ils ont été pris de court. J'attendais une réponse mais en vain», déplore-t-elle. «Ce n’est que vendredi que l’ambassade m’a redemandé les numéros de registre national belge pour examiner leur cas. S’ils avaient réellement des listes centralisées, ils n’en auraient pas eu besoin puisque j’avais déjà tout envoyé», s´agace Asma Asadi.

En plus de la longue attente d'un vol de rapatriement, les «heureux élus» qui prendront le vol ce samedi se souviendront des conditions chaotiques de ce retour. Pour les autres, ils devront prendre encore leur mal en patience et espérer que le prochain vol souffrira de moins d'approximations.

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