Dès aujourd'hui, jeudi 1er mars, les produits industriels finis, en provenance de l’Europe, sont totalement exonérés de droits à l’importation. L’impôt à l’importation passera d’un maximum de 3% de la valeur déclarée des marchandises à 0%. L TVA marocaine, elle, continue à s'appliquer sur les produits importés. Aujourd'hui, s'achève le processus de démentèlement douanier prévu par l’accord d’association entre le Maroc et l’UE, signé en février 1996.
L’accord prévoyait la mise en place progressive d’une zone de libre-échange dans un délai de 12 ans, à compter de la date de son entrée en vigueur, le 1er mars 2000. «C’est l’aboutissement d’un processus qui a donné ses fruits», souligne Eneko Landaburu, chef de la délégation de l’Union européenne au Maroc, lors d’une conférence organisée à l’Institut royal des études stratégiques (Ires), rapportée par l'Economiste.
Baisse des prix
«Théoriquement, une baisse de droits de douane engendre toujours une baisse des prix. Toutefois, comme nous sommes dans un processus de démantèlement tarifaire progressif, l’impact ne sera pas notable. Plusieurs concessionnaires ont déjà procédé à d’importantes réductions fin 2011», explique à l’Economiste Abdelouahed Rahal, directeur de la Division des industries automobiles, électroniques et aéronautiques au ministère du Commerce.
Les concessionnaires ont anticipé le démentèlement douanier en réduisant leurs prix depuis janvier 2012, comme l’a confirmé le nouveau président de la Fédération automobile, Mohamed Amine Guédira. «Les prix de départs des véhicules neufs, c’est-à-dire sans tenir compte des options, sont maintenant alignés sur ceux pratiqués en Europe. […] Avec le démantèlement tarifaire, il n’est plus intéressant d’acheter un véhicule d’occasion car l’achat d’un véhicule neuf permet de bénéficier de prix attractifs sans oublier la garantie», estime-t-il.
L'UE premier bénéficiaire
Depuis le 1er mars 2000, la coopération maroco-européenne a connu des temps forts. Il y a eu la signature en mars 2007 de l'accord de pêche. Reconduit plusieurs fois, puis arrivé à son terme sans être renouvelé, en décembre, il à nouveau en cours de négociation.
L’accord agricole approuvé en février par le parlement européen prévoit, sur la question douanière, l'exonération des produits agricoles et des produits de la pêche en provenance de l'UE de 55% des droits de douane sur les produits. Les mêmes produits, en provenance du Maroc, sont exonérés de 70% des droits de douane sur une période de dix ans. Parallèlement, les deux parties sont en pleines négociations sur l’accord des services.
La Commission européenne prévoit d’augmenter le budget destiné à la politique européenne de voisinage de 50% à partir de 2014. De manière générale, les relations entre le Maroc et l’UE s’inscrivent dans une logique de libéralisation des échanges des biens et services.
Quels bénéfices ?
Actuellement, les importations marocaines en provenance de la zone euro s’élèvent à 167 milliards de DH contre seulement 93 milliards d’exportations. M. Landaburu préconise un changement de stratégie pour «résoudre» le déséquilibre des échanges, mais l’économiste Mohamed Chiguer pense que l’accord de libre-échange tel que présenté actuellement avec le démantèlement tarifaire n’est pas bénéfique pour l’économie marocaine.
Dans la finalisation du démentèlement douanier, «il y a des points forts et des points faibles. La baisse des prix constitue un avantage pour le consommateur. Les entreprises aussi vont pouvoir acheter les matières premières à bon prix, déclare Mohamed Chiguer, mais c’est un danger pour l’économie nationale. Nous avons une économie qui est [seulement] en train de s’industrialiser», ajoute-t-il. Selon lui, le démentèlement est donc préjudiciable à l’économie nationale. «L’industrie marocaine n’est pas compétitive. En plus, la part de l’industrie au niveau du PIB ne fait que régresser au fil des années», justifie-t-il.
L'accès libre au marché européen pourrait être un facteur de dynamisation pour la qualité de la production nationale, mais, «le gouvernement aurait dû préparer ce dynamisme pour profiter de la zone de libre-échange. Il y a quand même douze ans qui se sont écoulées. Le Maroc avait le temps, mais apparemment, il ne s’est pas préparé. Le grand bénéfice de cette nouvelle configuration des échanges est que les Marocains vont davantage avoir accès aux produits européens», explique-t-il.