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Grand Angle

Maroc : La justice saisie sur les irrégularités du projet Taghazout Bay

Tout juste après l’annonce de démolitions visant des constructions du site touristique Taghazout Bay, près d’Agadir, le procureur général près la Cour d’appel de Marrakech a été saisi pour enquêter plus en détails sur les irrégularités ayant entaché le projet. Par ailleurs, la plainte déposée nomme les responsables qui devraient être entendu à ce sujet.

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Plusieurs démolitions ont été constatées sur le site touristique de Taghazout Bay, mitoyen à la ville d'Agadir / DR.
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Au lendemain de la destruction de bâtiments à Taghazout Bay pour non-conformité, l’Association marocaine pour la protection des biens publics (AMPB) a détaillé les bénéficiaires des parts de marché de ce projet, tout en épinglant les irrégularités qu’elle dit avoir établi. Il s’agit notamment de CDG Développement (45%), le Fonds marocain de développement touristique (25%), Sud Partners qui inclut Akwa Group (25%) et la Société marocaine d’ingénierie touristique (5%).

Sur la base de ces recoupements, l’ONG a annoncé saisir le parquet compétent en demandant une enquête approfondie sur l’ensemble des irrégularités constatées. Président de la section régionale de l’AMPB qui a déposé cette plainte, Safieddine Boudali déclare à Yabiladi ce jeudi que le dossier a été déposé auprès du parquet de Marrakech, puisque cette juridiction est dotée d’une chambre criminelle chargée des crimes financiers.

«Nous n’avons pas encore eu de nouvelles des suites de notre plainte puisqu’elle date de trois jours, mais nous savons qu’une enquête sera lancée et que les différents acteurs concernés seront entendus par la justice», affirme-t-il. En effet, cette plainte requiert que la police judiciaire soit saisie de l’affaire pour mieux clarifier les soupçons d’irrégularités, y compris les malversations et les fraudes financières.

Des élus locaux devraient être entendus

«Nous avons attiré l’attention du procureur sur le fait que des élus locaux, les responsables du projet et le représentant du bureau d’étude doivent être interrogés», explique Safieddine Boudali. Parmi eux, la plainte mentionne les présidents des communes de Taghazout et d’Aourir, le président du Conseil régional d’Agadir-Idaoutanane, le représentant légal de l’entreprise en charge du projet et celui du bureau d’études.

Cependant, cette liste reste succincte et d’autres responsables pourraient être entendus. Pour Safieddine Boudali, «les différents détenteurs de part de marché, via leurs représentants légaux, doivent tout autant être entendus par la justice car ils ont une responsabilité directe, lorsqu’on sait de surcroît que l’exécution du projet aurait connu des fraudes». Selon le militant, celles-ci incluent notamment «l’accaparement illégal des biens fonciers pour le projet, le non-respect des cahiers des charges, des exigences environnementales et de la conservation des espaces publics», entre autres.

Dans cette plainte, parvenue également à Yabiladi, l’association relève en effet un «non-respect des plans initiaux approuvées par les autorités compétentes et les actionnaires du projet, des accaparements de terres adjacentes frauduleux, un manquements aux normes ''COS'' relatives au coefficient d’exploitation du domaine public», y compris «les routes, les espaces verts et les parkings».

Une question de gestion des fonds publics

Par ailleurs et sur la même superficie du projet, l’AMPB relève «la construction sans permis de quatre villas de près de 160 m² chacune via l’usage des pouvoirs d’influence». Les établissements hôteliers du site ne sont pas en reste, puisque la plainte de l’association fait état de l’ajout de pièces sans permis, parmi celles donnant sur la façade sud de l’hôtel Hyatt.

Samedi 8 février lors d’un déplacement à Agadir, le roi Mohammed VI s’est rendu dans la station de Taghazout Bay pour une visite non programmée. Huit jours plus tard, les démolitions ont commencé pour non-conformité au Code de l’urbanisme et aux plans initiaux du projet. Plus qu’une question de respect des lois relatives à l’habitat, à l’urbanisation et à l’harmonisation du paysage urbanistique, Safieddine Boudali estime que «ce dossier soulève une question de gouvernance et de bonne gestion des fonds publics».

Maire de la ville d’Agadir jusqu'en 2015, Tariq Kabbaj avait critiqué le projet de Taghazout Bay pour les mêmes raisons, dénonçant par ailleurs qu’«un projet touristique régional ne doive pas se couper de la réalité de l’environnement où il est implanté et ses retombées socio-économiques doivent donc bénéficier, pas exclusivement mais aussi, aux habitants alentours». Au lendemain de l’annonce des démolitions, une vidéo où l’ancien responsable réagit à la question a émergé sur les réseaux sociaux.

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