Depuis l’annonce de sa mort, de nombreuses voix de militants de droits de l’homme lui ont rendu hommage. Amine Abdelhamid, vice-président de l'Association marocaine des droits humains (AMDH), a confié à l’AFP, que Serfaty «était un militant qui avait consacré sa vie d'abord à la lutte anticoloniale (…)». C’était «un fervent défenseur de la cause des travailleurs et des droits de l'homme», a-t-il ajouté. D’après la même source, Amina Bouayach a indiqué avoir perdu «un ami et quelqu'un qui avait le courage de dire ses idées par rapport au changement de la politique et des institutions».
Né en 1926 à Casablanca dans une famille juive tangéroise, Abraham Serfaty a adhéré aux jeunesses communistes marocaines en 1944 puis au Parti communiste français (PCF) durant ses années d’études à l'Ecole des Mines à Paris, entre 1945 et 1949. Parallèlement, il s’est engagé dans la lutte d’indépendance de son pays. Ainsi il s’est mis à dos l’administration coloniale, qui l’a emprisonné en 1950, avant de le placer en résidence surveillée en 1956.
L’ingénieur des mines finira par prendre ses distances avec le PCM (actuellement Parti du progrès et du socialisme – PPS –) pour participer à la création en août 1970 d’Il Al-Amam (En avant, devenu depuis La Voie démocratique, Annahj Addimocrati), avec notamment le poète Abdellatif Laâbi. Les prises de positons de Serfaty dans cette organisation politique d'inspiration marxiste-léniniste, mais aussi ses opinions contre le régime en place lui ont valu d’être arrêté d’abord en 1972 puis en 1974. De cette seconde arrestation, il ne sortira libre de prison qu’en 1991. L’ex-détenu est déchu de sa nationalité marocaine et expulsé vers la France par le grand vizir Driss Basri au motif qu'il était, de par son grand-père, un «Brésilien».
Après l’accession de Mohammed VI au trône, le nouveau roi a autorisé le retour de Serfaty. C’était en septembre 1999. L’homme a retrouvé sa citoyenneté marocaine. Il sera même nommé une année plus tard par Mohammed VI, conseiller auprès de l'Office National des Recherches et Exploitations Pétrolières (ONAREP). L’âge avancé et la maladie n’avaient pas empêché Abraham Serfaty de continuer son combat politique. C’est cette même maladie qui a eu raison de lui jeudi 18 novembre. Qu'il repose en paix.
Interview d’Abraham Serfaty dans le magazine Grand Angle de 2M