Le rapport de la Cour des comptes pour l'année 2010 vient de tomber. Contrairement aux précédentes éditions, celle de cette année est consacrée, essentiellement, aux agences publiques et aux cours régionales des comptes. Une partie du premier tome est réservée à l’audit des caisses de huit grands partis politiques (Istiqlal, PAM, RNI, PJD, MP, USFP, UC et PPS).
Les conclusions des experts du président Driss Jettou confirment une idée très répandue chez les Marocains : les structures partisanes tiennent à vivre dans l’opacité. Elles sont les premières à enfreindre les leçons de transparence qu’ils prêchent continuellement au commun des mortels.
28,5 millions dh de dépenses non-justifiées
En 2010, «les dépenses déclarées par les partis politiques précités se répartissent entre les dépenses d’exploitation qui ont représenté la plus grande proportion (80,48%) avec un montant de 72,1 millions de dirhams, suivies des acquisitions immobilières, du matériel de transport et du mobilier et matériel de bureau pour un montant de 17, 2 millions de dirhams, soit 19,23% des dépenses de ces partis», relève le document de la Cour des comptes.
Jusqu’au là tout est normal, sauf que «le montant des dépenses justifiées a atteint 61 millions de dirhams, alors que celui des dépenses non justifiées est de 28,5 millions de dirhams, soit respectivement 68% et 32% du total des dépenses déclarées», lit-on dans le texte.
Par rapport au cru 2009, il apparait que cette différence est inférieure au 56 millions dh de dépenses non-justifiés des partis. Il ne s’agit pas là d’un chiffre qui est la conséquence du respect des deniers publics de la part des formations politiques mais juste d’une simple réduction des comptes audités : En 2009, ils étaient 21 partis alors qu’en 2010, ils ne sont que huit.
Les vœux de la Cour des comptes
N’ayant pas le droit de saisine directe de la justice en cas de constatation de dilapidation de l’argent public, la CC se contente d’adresser des recommandations aux partis. Et rien de plus. En voici un échantillon : «La production, à la Cour, du compte annuel certifié par un expert-comptable enregistré dans la liste du corps des experts comptables ; la production d’un état détaillé appuyé de pièces justificatives des dépenses effectuées au titre du soutien étatique annuel en veillant à ce que ces dépenses soient réalisées dans le respect des lois et règlements en vigueur et la justification des dépenses au moyen de pièces justificatives réglementaires».
Et après ?
Il a fallu presque huit mois après la publication du rapport 2009 pour que le ministre de la Justice et des Libertés, Mustapha Ramid, soumette, il y a environ dix jours, onze dossiers de mauvaise gestions de l’argent public à l’examen de la justice. Avec les directions des partis politiques cette perspective n’est même pas envisageable. L’Etat a besoin d’elles sur plusieurs fronts, il ne peut les contrarier. Et les leaders en sont parfaitement conscients. C’est du donnant donnant.Une autre forme de rente qui passe inaperçue.