Menu

Grand Angle

Diaspo #321 : Mehdi Bennani célèbre la culture marocaine à travers la scénographie à Hollywood

Mehdi Bennani fait partie des équipes de conception de décors pour des films et des publicités à Hollywood. Le natif de Casablanca souhaite contribuer à ce que les spectateurs marocains et arabo-musulmans se sentent représentés dans les films à travers sa passion, le production design.

Publié
Mehdi Bennani
Temps de lecture: 5'

C’est en étant animé par l’ambition de devenir architecte que Mehdi Bennani a posé pied aux Etats-Unis. Bachelier du lycée français Lyautey de Casablanca, il a rejoint son frère à Los Angeles pour continuer ses études, d’autant que ses parents valorisent le système éducatif américain pour l’enseignement supérieur de leurs enfants.

Une fois à Los Angeles, en 2011, Mehdi décide de rejoindre un programme de base au Santa Monica College, alors fréquenté par son frère. Au collège communautaire public de Californie, il a suivi un cursus préparatoire pour se lancer plus tard dans l’architecture.

Le natif de Casablanca rejoint ensuite l’Université de Californie du Sud (USC), où va naître son engouement pour l’industrie cinématographique. Mehdi s’est pour autant spécialisé en architecture, honorant la promesse faite à ses parents avant de quitter son pays d’origine, le Maroc.

«L’USC avait une très bonne école d’architecture. J’ai pu être transféré et j’ai fait deux ans de travail en studio, pendant lesquels on dessine et on travaille sur des programmes informatiques liés à l’architecture», a déclaré à Yabiladi Mehdi Bennani, basé désormais à Los Angeles.

Contrairement à ses propres attentes, il n’a pas trouvé sa passion dans le domaine. En quête d’un travail faisant appel davantage au processus créatif, au cours de ses deux premières années d’école d’architecture, il s’est rendu compte que son domaine d’étude ne le mènerait pas vers la voie qu’il souhaitait suivre.

De l’architecture au production design

Jeune étudiant, Mehdi a été particulièrement attiré par le cinéma. Il est intéressé surtout par le production design, une fusion d’art, d’architecture et de narration, exprimée à travers l’espace, les lignes, les formes, les couleurs et les motifs, pour créer un langage visuel puissant qui enrichit les histoires mises en image. Il s’agit de l’un des piliers de l’industrie cinématographique, aux côtés de la production, de l’écriture scénaristique et de la réalisation.

C’est ainsi que Mehdi a changé de programme d’architecture de cinq ans pour passer à un curricula de quatre ans. Il obtient un bachelor en architecture, au lieu de devenir architecte à part entière. «Ce diplôme me permettra de devenir professeur d’architecture, mais pas architecte. Pour cela, je devais terminer mes cinq ans, mais ce n’était pas ce que je voulais pas faire», a-t-il expliqué.

Ce à quoi Mehdi a réellement aspiré était d’en savoir plus sur ce nouveau domaine de la conception de production. «Je ne savais même pas que ça existait. Je savais encore moins que c’était un métier ou une carrière», se souvient-il. «Il n’y avait qu’une seule classe à l’USC qui proposait cette filière. Ayant toujours été passionné par le cinéma, j’ai eu le sentiment d’avoir trouvé quelque chose qui joignait à la fois ma passion pour le septième art et mes compétences acquises en architecture», nous confie-t-il fièrement.

Juste après avoir terminé son bachelor en architecture, Mehdi a commencé à chercher du travail dans le design de production. Pour en apprendre davantage sur le domaine et acquérir de l’expérience, il a commencé à faire de petits boulots. Il a notamment travaillé comme assistant de production pour les clips vidéo. Plus tard, il s’est vu confier le rôle de décorateur pour un film étudiant. Il devait concevoir un décor et comprendre à quoi le réalisateur souhaitait que les différents lieux de tournage ressemblent.

«Je n’avais aucune expérience et ils m’ont simplement confié le poste. Mais honnêtement, cela m’a vraiment donné envie d’en apprendre davantage et de m’améliorer. C’était une très belle aventure, j’étais tellement heureux de faire ce travail et je savais exactement que j’étais sur la bonne voie.»

Mehdi Bennani

Après avoir travaillé sur les décors de différents courts-métrages et films d’étudiants, Mehdi décide de se lancer dans une formation en scénographie. Il a postulé à l’American Film Institute et a ensuite poursuivi des études de maîtrise en conception de production. «La première année, pendant la crise sanitaire de Covid, tout était en ligne. J’ai appris davantage sur le métier, que faire et comment, dessiner et concevoir des plans», se rappelle-t-il.

Au cours de ce cursus, ses connaissances en architecture se sont avérées utiles. «Toutes les choses que j’ai apprises et toutes les compétences que j’avais acquises en architecture m’ont aidé. C’était agréable de pouvoir tout employer pour suivre ce cheminement de carrière», nous a-t-il déclaré.

La conception des décors à Hollywood

En 2022, Mehdi obtient son diplôme et commence à travailler sur différents projets en tant que décorateur et directeur artistique.

«Le chef décorateur est le chef du département artistique, qui est en charge de tout ce que l’on voit autour des acteurs, de tout ce qu’ils touchent. Par exemple, si vous filmez dans une maison, tout ce que vous voyez à l’intérieur est conçu par le département artistique», explique-t-il avec enthousiasme.

«Gladiateur», le film préféré de Mehdi, est un excellent exemple de ce qu’un département artistique, sous la direction d’un chef décorateur, peut faire. «Ils ont dû créer tout le décor à partir de zéro pour montrer que nous sommes à Rome, à l’époque de l’Empire romain, dans un Colisée. Le Colisée est très ancien et n’est pas entièrement restauré, il faut donc demander au département artistique de recréer et de construire un décor qui lui ressemble», a-t-il ajouté.

Quant au directeur artistique, il supervise en second lieu le département artistique. «Le chef décorateur donne des références et des images ou des croquis, que le département artistique peut faire recréer», le directeur artistique se charge ensuite de le communiquer la suite du procédé au reste de l’équipe du département.

Mehdi a travaillé comme décorateur pour un court-métrage intitulé «Au pays des merveilles». Le film, qui a été également son projet de mémoire, raconte l’histoire d’une petite fille mexicaine de huit ans, qui a traversé la frontière vers les Etats-Unis. Une fois au pays de l’Oncle Sam, son père décède et elle reste coincée dans une campagne.

Le film a été projeté dans plusieurs festivals locaux et a remporté des prix. «C’est une belle histoire sincère sur l’émigration à travers les yeux d’une petite fille. Pendant la présidence Trump, beaucoup d’enfants ont été séparés de leurs parents demandeurs d’asile. C’est quelque chose qui nous a poussé à montrer cette histoire et à mettre en avant la difficulté pour un enfant de vivre cette expérience», nous déclare Mehdi.

En plus des courts-métrages, Mehdi a travaillé sur plusieurs publicités. Il a assuré la direction artistique et l’habillage des décors. Il a notamment été appelé à transformer un bar irlandais en un bar australien, le tout étant tourné à Los Angeles.

Mieux représenter le Maroc

Actuellement, Mehdi travaille sur un autre court-métrage. L’histoire se déroule dans une mosquée d’une petite ville, qu’il doit concevoir et mettre en place entièrement. «Nous envisageons de louer un centre communautaire et de le transformer en mosquée de petite ville, avec tous les éléments que l’on peut trouver dans un tel lieu de culte», a-t-il expliqué.

A travers son travail de décorateur et de directeur artistique, Mehdi essaye désormais de contribuer à mieux représenter le Maroc, les ressortissants arabes et musulmans à Hollywood. En effet, il estime que concevoir et construire des décors pour des films peut contribuer à déconstruire les stéréotypes sur ces communautés et aider les personnes issues de différents horizons à se sentir représentées.

«C’est quelque chose pour lequel je me bats dans tous les projets sur lesquels je travaille», affirme Mehdi. «Il est désormais très important que toutes les cultures soient montrées telles qu’elles sont réellement, et pas seulement au cinéma. Les gens veulent se voir au cinéma et se sentir représentés», a insisté le jeune professionnel.

«Il est important de montrer l’aspect humain des personnes partout dans le monde», a déclaré Mehdi, qui espère travailler sur de plus grands projets et faire la différence dans son domaine.

Soyez le premier à donner votre avis...
Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com