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Grand Angle

Avant le Polisario, l’Algérie préparait Tindouf pour accueillir les Sahraouis

En installant des milliers d’habitants du Sahara occidental dans les camps de Tindouf, l’Algérie n’a fait que concrétiser un projet qui date de 1967. Elle ambitionnait faire de la ville une capitale des Sahraouis.

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Des années avant la création du Polisario, officiellement en 1973, et le coup d’Etat de Kadhafi en Libye, le 1er septembre 1969, l’Algérie ne cachait pas ses visées sur le Sahara occidental, alors sous colonisation espagnole. Datée du 27 mai 1967, une lettre confidentielle de l’ambassadeur d’Espagne à Alger, José Luis los Arcos (1964-1970), adressée au ministre espagnol des Affaires étrangères, lève le voile sur cet intérêt.

La missive est un compte rendu des entretiens entre l’ambassadeur et Abdelaziz Bouteflika, alors chef de la diplomatie algérienne, ainsi que le directeur de la Direction des affaires juridiques du ministère des Affaires étrangères, portant sur ce sujet. La partie algérienne a notamment mis en garde l’ambassadeur espagnol de la menace marocaine pesante sur le Sahara occidental. Elle a avancé que le royaume préparait «une manœuvre» avec l’appui de la «tribu des Reguibate, installée à Tarfaya», pour s’emparer du territoire.

Convertir Tindouf «en capitale des Reguibates» de toute la région

L’Algérie a alerté l’Espagne d’«actes d’agression» contre les militaires espagnols stationnés à Laâyoune et Seguia El Hamra. Des opérations qui seraient menées par des groupes armés proches de Rabat, soulignant que «le Maroc est incapable de faire face aux armées espagnole et algérienne». Et de préciser au diplomate espagnol que l’Algérie «ne restera pas les bras croisés» face au projet régional de Rabat. 

Tout en admettant que ces interlocuteurs «cachaient leur véritable jeu», l’ambassadeur espagnol s’est félicité d’une «convergence d’intérêts» entre l’Espagne et l’Algérie sur ce sujet. Il a affirmé aussi à son supérieur hiérarchique que les Algériens ambitionnaient de convertir Tindouf, dans les années à venir, «en capitale des Reguibates de toute la région ; un lien entre les populations algériennes et des pays voisins». Un espace, qui selon la version algérienne, serait «le prélude à l’édification du Grand Maghreb».

Dix ans après la lettre de l’ambassadeur espagnol à Alger, le pouvoir algérien a réussi à concrétiser une partie de son projet. Avec l’appui du Polisario, contrôlé par des éléments appartenant à la tribu des Reguibates, des milliers d’habitants du Sahara ont quitté le territoire vers Tindouf. Des Mauritaniens, des Algériens et des Maliens s’y sont également installés. 

L’ambassadeur a rapporté aussi les «confidences amicales» d’un haut diplomate algérien sur l’enregistrement de Reguibates algériens par l’administration espagnole. Alger anticipait, ainsi, l’organisation d’un référendum dans la province.

Onze ans après la lettre de José Luis Los Arcos, datant du 27 mai 1967, un document de la CIA, en date de décembre 1977, a attribué le soutien de l’Algérie au Polisario à «sa rivalité historique avec le Maroc pour l’hégémonie en Afrique du Nord-Ouest». «L’objectif de l’Algérie est d’établir une république sahraouie indépendante, sur laquelle elle aura une influence totale», notait la CIA.

Article modifié le 02/01/2024 à 18h05

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