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Grand Angle

Diaspo #293 : El Mehdi Chokri, cycliste désavoué après avoir rejoint une équipe israélienne

Comptant plusieurs titres arabes et africains à son actif, le cycliste marocain El Mehdi Chokri s’est trouvé sur la touche, après avoir signé un contrat pour rejoindre un club israélien. Il s’est installé ensuite aux Etats-Unis, où il est devenu entraîneur en cyclisme à l’âge de 26 ans.

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Le cycliste professionnel marocain de 26 ans, El Mehdi Chokri, a quitté ses études en troisième année de collège, afin de subvenir aux besoins financiers de sa famille en situation de vulnérabilité. Cependant, il n’a jamais abandonné sa passion pour le vélo. En effet, le natif de Kénitra a décidé de suivre le chemin de son père, en rejoignant le club de cyclisme de sa ville, à l’âge de 11 ans.

En 2011, il a été choisi pour rejoindre la sélection nationale du Maroc. Tout juste un an plus tard, le jeune prodige a fait ses preuves en se distinguant de plusieurs professionnels des pays de la région, remportant ainsi la médaille d’or du premier championnat arabe de cyclisme, tenu dans la ville de Marrakech. Il a également été tenant du titre au championnat national.

Un an plus tard encore, El Mehdi Chokri s’est rendu à Bahreïn pour défendre son titre arabe, ce qui s’est réalisé sans grande surprise. En 2014, il a été choisi comme l’un des meilleurs cyclistes en Afrique, confirmant ainsi sa place au sein de la discipline professionnelle. L’année d’après, il remporte le Championnat africain de cyclisme organisé en Afrique du Sud. Son palmarès s’enrichit ensuite, grâce à plusieurs sacres arabes et africains.

«Nous avons des cyclistes qui ont de grandes capacités, leur permettant d’atteindre un haut niveau international. Mais ils ne sont ni encadrés correctement, ni accompagnés pour atteindre leurs objectifs», a-t-il confié à Yabiladi. En 2016, Chokri a remporté la 26e place aux Championnats du monde au Qatar. Il a participé parmi 210 meilleurs professionnels du monde, ce qui fait sa fierté, aujourd’hui encore, d’autant que «cette compétition n’est pas accessible à tous». «Pour y être admis, il faut avoir un bon niveau construit à travers des années de travail acharné», souligne-t-il.

Tenant à représenter le Maroc dans toutes les compétitions internationales, arabes et africaines, El Mehdi Chokri est repéré par le club sud-africain Dimension Data-Qhubeka. En 2017, ses grandes capacités lui permettent de rejoindre cette équipe mondialement connue. «Ce club est considéré comme l’un des meilleurs au monde, permettant de participer à des compétitions dans les quatre coins du globe», a-t-il indiqué.

Conséquences d’une décision non calculée

Début 2020, le jeune cycliste signe avec le club israélien Start Up Nation. Il confie à Yabiladi qu’au moment de la prise de sa décision, il n’a pas imaginé que ce transfert allait l’empêcher de réaliser ses ambitions et de continuer à remporter des titres, lui qui a visé les Jeux olympiques de Tokyo.

«J’ai été beaucoup critiqué, dans la mesure où certains ont remis en question ma religion et mon patriotisme. J’en ai été affecté. Ce club est essentiellement espagnol, basé à Gérone sous le nom de Katusha. Après avoir perdu tous ses sponsors, il a été racheté par Israël. Après avoir signé ce contrat, je n’allais donc pas en Israël, puisque le club est basé en Espagne et que nous participons même aux championnats d’Europe.»

El Mehdi Chokri

Lors d’un séjour de vacances en famille au Maroc, le cycliste se souvient s’être confronté à «plusieurs problèmes et pressions de la part des responsables de la fédération de cyclisme et de certaines personnes, pourtant proches». «J’ai été empêché de participer aux Jeux olympiques. Ma famille était mon principal soutien, puisqu’elle a confiance en moi et en mes principes», nous a-t-il confié. «Mon objectif, en signant avec le club israélien, était surtout de participer au Tour de France, qui est considéré comme l’une des meilleures compétitions au monde», a-t-il souligné.

A ce moment-là, le nom d’El Mehdi Chokri a fait la Une de certains journaux marocains de sites d’information arabes. La Fédération royale marocaine de cyclisme a écrit au ministère de la Jeunesse et des sports pour l’informer de la décision de Chokri, qui a ainsi été désavoué.

Une situation internationale difficile

Par la suite, le cycliste marocain s’est trouvé contraint de renoncer à rejoindre le club israélien, se retrouvant ainsi sans équipe et confronté au début de la crise sanitaire. «Tous les pays européens dans lesquels je participais à plusieurs compétitions ont décidé de suspendre les activités sportives et de fermer leurs frontières, ce qui m’a poussé, en octobre 2020, à me rendre aux Etats-Unis, qui n’avaient pas fermé leurs frontières», nous dit le sportif.

«Il n’était pas possible de s’entraîner ailleurs. J’ai donc décidé d’aller aux Etats-Unis afin de maintenir mon niveau et ma condition physique.»

El Mehdi Chokri

Vivant désormais à Washington, DC, le cycliste a signé un contrat en tant qu’entraîneur dans un club, parallèlement à son travail dans une enseigne où les cyclistes sont formés pour améliorer leurs performances.

La fin d’un parcours glorieux

Depuis la polémique sur son transfert, El Mehdi s’est trouvé sur la touche. «Je n’ai plus pas été convoqué à participer à des tournois au nom du Maroc, même si j’ai remporté toutes les compétitions dans lesquelles j’ai porté les couleurs du pays», nous a-t-il déclaré. «J’ai été appelé par des équipes, mais j’ai rejeté ces offres. C’étaient de petits clubs par rapport au niveau que j’avais atteint», a-t-il ajouté.

En 2022, sa passion l’a amené à se lancer dans l’expérience de créer une équipe cycliste aux Etats-Unis, sous le nom de Next Wave. Mais l’aventure n’a pas abouti, faute de financement. Il a confirmé qu’il n’abandonnerait cependant pas l’idée et qu’il prévoit même de créer une autre équipe.

Cela dit, El Mehdi Chokri confie qu’il garde encore beaucoup d’amertume après ce qui s’est passé depuis son transfert. Il regrette «un déni» de ses réalisations pour le cyclisme au Maroc. «En revanche, je n’ai jamais regretté un jour d’avoir représenté le drapeau marocain et je réponds à l’appel sans hésitation», a-t-il affirmé.

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