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Grand Angle  

Enfants des combattants marocains de Daech : Le drame se poursuit même en Turquie

Depuis trois ans, les consulats du Maroc en Turquie refusent de remettre des papiers prouvant l'identité d'enfants nés dans des foyers de tension en Syrie ou en Turquie, devant servir pour les rapatrier vers le Royaume, selon leurs mères qui dénoncent les conditions difficiles où elles vivent.

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Photo d'illustration. / DR
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Alors que 400 enfants marocains vivent encore en Irak et en Syrie avec leurs mères marocaines dans des conditions déplorables, fuir en Turquie voisine n’a pas permis à d’autres d’atteindre l’objectif tant escompté ; celui d’un rapatriement vers le Maroc. En effet, les consulats du Maroc en Turquie refusent, depuis trois ans, de remettre des papiers prouvant l'identité des enfants marocains bloqués en Turquie. Selon des Marocaines bloquées dans ce pays, les représentations consulaires du Royaume expliquent qu’elles attendent toujours l’aval du ministère marocain des Affaires étrangères.

Nombre de ces enfants sont nés dans les foyers de tension en Syrie, après que leurs pères ont décidé de se battre dans les rangs d'organisations terroristes, ou en Turquie après la fuite de leurs mères au lendemain de la défaite de ces organisations. Dans une déclaration à Yabiladi, Kaoutar raconte qu'elle vit avec ses trois enfants en Turquie, tandis que le père est en détention au Maroc. «Un de mes fils est né à Istanbul mais le consulat refuse de l’enregistrer pour que je puisse l'amener au Maroc. Son père a commis une erreur mais ils tiennent nos enfants pour responsables», dénonce-t-elle.

Des enfants «discriminés» et «sans-papiers»

Elle confirmé que ses enfants sont désormais «en âge scolarisation» mais qu’ils «ne vont pas à l'école, car ils n'ont pas de papiers prouvant leur identité». «Lorsque je me rends au consulat du Maroc, on me dit qu’ils attendent une réponse du ministère des Affaires étrangères pour me remettre les documents qui permettent à mes enfants de voyager au Maroc. J’entends cette même depuis trois ans maintenant», regrette-t-elle.

Kaoutar semble désespérée par le traitement à géométrie variable réservé à cet épineux dossier. Elle donne ainsi l’exemple des deux enfants qui ont été récemment rapatriés au Maroc. Leur père, Marocain, détenu par les Kurdes et leur mère de nationalité syrienne, ils ont été rapatriés par leurs grand-père, après que leur cas a été soulevé par Abdellatif Ouahbi, alors député parlementaire. «Au consulat, on nous dit : ‘si vous avez des connaissances pour aborder votre dossier au ministère des Affaires étrangères, vous rapatrierez vos enfants, mais si vous ne connaissez personne, vous resterez ici’», avance-t-elle.

«J'ai voyagé au Maroc et je suis allé au ministère des Affaires étrangères et à plusieurs départements, mais en vain. Ils nous disent que les enfants ne sont pas Marocains, bien que le père ou la mère soient Marocains. J’ai mandaté un avocat pour que les enfants puissent être inscrits à l'état civil et obtenir des certificats de naissance et voir après ça ce qui va se passer.Nous vivons une injustice.»

Kaoutar

Dans une déclaration similaire, Jihane, également mère de trois enfants bloqués en Turquie, décrit «la situation difficile» où elle vit. «Nous avons des enfants nés en Turquie et en Syrie. Mon mari et moi sommes allés à l'ambassade afin d'obtenir des papiers leur permettant de rentrer au Maroc mais ils ont refusé, en nous informons qu’ils attendent une décision du gouvernement», fait-elle savoir.

Seulement une centaine d’enfants nés au Maroc

«Nos conditions sont difficiles en Turquie, car nous vivons depuis des années sans papiers et nos enfants sont privés d'aller à l'école ou même d’être soignés dans un hôpital», dénonce-t-elle, en rappelant qu’elle peut aller au Maroc à tout moment, mais qu’elle ne peut pas laisser ses enfants en Turquie.

«Mon mari est prêt à rentrer au Maroc pour se présenter devant un juge», ajoute-t-elle, en dénonçant des «tergiversions administratives» pour renouveler ses documents de voyage pour rester en Turquie. «J’ai demandé récemment le renouvellement de nos passeports afin d'obtenir des papiers de résidence ici, mais les consulats tergiversent toujours», déclare-t-elle. «Ma fille devait être scolarisée cette année, mais ce n’est pas le cas à cause des papiers», conclut-elle.

Il est à noter qu’une mission parlementaire exploratoire temporaire sur les Marocains bloqués en Syrie et en Irak a rendu, en juillet dernier, sa copie en indiquant que «1 659 djihadistes marocains avaient quitté le pays pour rejoindre les différents mouvements terroristes dans la région syro-irakienne».

Le rapport a indiqué qu'«il y a 250 combattants en détention en Syrie et en Irak», contre «138 femmes toujours en vie et plus de 400 mineurs, dont seulement 153 nés au Maroc». Les autres ont vu le jour soit dans les zones de tension (Syrie et Irak) ou dans certains pays européens.

La mission a recommandé de «promulguer des loi et des textes qui établissent le cadre législatif pour faire face aux situations spéciales et exceptionnelles dans lesquelles les enfants et les femmes marocains sont bloqués dans ces foyers de tension, afin de faciliter le processus de leur rapatriement».

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