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Grand Angle

Dar Al Faraj à Marrakech ou le premier hôpital connu de l’Histoire du Maroc

Au XIIe siècle, le calife almohade Yacoub Al Mansour ordonne la construction de l'un des plus anciens hôpitaux du Maroc. Baptisé «Dar Al Faraj», le complexe de santé est un joyau architectural à Marrakech qui restera en service même après le déclin de la dynastie almohade.

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Photo d'illustration. / DR
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Il y a des siècles, le Maroc faisait ses premiers pas vers l'édification d'un système de santé. Au XIIe siècle, le royaume développait l'un de ses premiers établissements de santé. Des manuscrits et des récits historiques suggèrent que l'intérêt du royaume pour la médecine était plus important pendant le califat almohade.

Alors que les dynasties précédentes ont vu se multiplier des médecins pratiquants, qui visitaient le palais et des malades à la maison, les Almohades avaient excellé dans la mise en place d'installations appropriées pour ces professionnels. Le sultan Yacoub El Mansour, qui régnait sur le Maroc et la péninsule ibérique, a construit les premiers «bimaristans», le mot persan pour les hôpitaux à l'époque.

Dar Al Faraj, joyau de l’architecture au cœur de Marrakech

La première de ces installations avait vu le jour à Marrakech, introduit par le souverain almohade Yacoub El Mansour, écrivent A. Hiroual, N. Mansouri, T. Fikry dans «Les hôpitaux de Marrakech : depuis le Moyen âge jusqu'à l'ère contemporaine». Les habitants de Marrakech appelaient le bimaristan «Dar Al Faraj» (la maison de l'apaisement).

Plusieurs récits historiques suggèrent que ce bimaristan était situé entre la mosquée Koutoubia et la mosquée Al Mansour. La date exacte de sa construction reste un mystère mais les historiens pensent qu’il a été bâti sous le règne du sultan almohade, qui s'étendait entre 1184 et 1199.

L'historien marocain Abd al-Wahid al-Marrakushi, qui a vécu à l'époque almohade, a décrit le bimaristan comme un «joyau architectural». Selon lui, Dar Al Faraj, avait «quatre bassins, dont un en marbre blanc», des fleurs et des plantes disposées selon les ordres du calife.

L'installation était des mieux fournies. «A côté de l’eau courante, chaude et froide dont il était doté, il disposait de bains, de cuisines, de buanderies…» Le plan assurait la séparation des sexes et permettait la spécialisation des locaux.

L'hôpital n'était pas seulement un bâtiment pour les malades, mais un établissement bien décoré, avec un cachet artistique. «Architectes, maçons et artisans ont travaillé d’arrache-pied afin de faire de cet hôpital un joyau de l’architecture», a expliqué al-Marrakushi. De multiples gravures, sculptures pittoresques, tissus précieux, laine, lin et soie ont été réalisés et investis pour décorer le bimaristan.

Un établissement public, géré et subventionné par le Makhzen

Comme les institutions de santé modernes de nos jours, Dar Al Faraj disposait aussi d'un personnel compétent et d'une équipe de direction. Pour le bimaristan, seuls des médecins qualifiés ont été choisis pour le diriger, y compris le médecin privé d'Al Mansour, Abou Ihsak Addani et ses deux fils. 

«Une grande équipe pluridisciplinaire a travaillé sous ses ordres : le corps médical et infirmier, les apothicaires pour la préparation des sirops, des pommades, des onguents et alcools, le personnel chargé de la gestion et le financement, les cuisiniers, le personnel responsable de la buanderie, les jardiniers et le personnel responsable du ménage.»

Dar Al Faraj était considéré comme un établissement public, géré et subventionné par le Makhzen. Al Mansour avait alloué trente dinars par jour pour l'installation.

Outre sa mission médicale, le bimaristan était un pôle académique et social pour la ville et le royaume. «A côté de sa fonction d’hospitalisation et de soin des maladies organiques, l’hôpital avait pour vocation de traiter les maladies mentales. Il était également centre pharmacologique où on prépare les médicaments nécessaires aux malades hospitalisés», a ajouté la même source. Dar Al Faraj a également attiré des universitaires et des chercheurs qui venaient suivre notamment des cours de médecine.

On pense que le bimaristan de Marrakech a ouvert la voie à la création d'installations similaires dans le royaume et a continué à traiter les patients même après la chute de la dynastie almohade. Ainsi, des hôpitaux et des écoles de médecine seront édifiés à Fès, Salé, Rabat, Meknès et Safi sous les Mérinides qui succèderont aux Almohades dès 1269.

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