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Grand Angle

La santé mentale positive, un outil médical et pédagogique pour accompagner la rentrée

Rassemblées dans un webinaire sur la rentrée scolaire et son traitement du point de vue psychique chez les enfants, des sociétés de médecine, de pédiatrie et de protection de l’enfance ont recommandé un accompagnement transversal des élèves après le confinement. Ils appellent à une synergie entre les professionnels de la santé, les écoles et les familles.

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Photo d'illustration / Ph. La Presse.ca
Temps de lecture: 3'

Cheffe du service de pédopsychiatrie au CHU Ibn Rochd à Casablanca, Dr. Ghizlane Benjelloun a plaidé, ce vendredi, pour un maintien des enfants dans les écoles autant que possible, durant la rentrée qui vient de démarrer. A partir de son expérience en milieu hospitalier, elle confirme la recrudescence de manifestations cliniques accrues, liées au stress chez les enfants, ce à quoi structures sanitaires mais aussi scolaires devront faire face.

Dr. Ghizlane Benjelloun a exposé quelques chiffres, dans le cadre d’un webinaire de la Société marocaine des sciences médicales (SMSM), avec la participation de la Société marocaine de pédiatrie (SMP) et de la Société marocaine de pédopsychiatrie et professions associées (SMPPA), entre autres.

Traiter les traumatismes liés au confinement

La cheffe du service de pédopsychiatrie au CHU Ibn Rochd à Casablanca décrit une situation inquiétante : «Le confinement et l’épidémie ont renforcé l’angoisse de la mort chez les enfants, l’isolement, le sentiment de solitude, la violence intrafamilliale, la perte de routine, l’ennui et l’irritabilité.»

En effet, elle estime que «la fermeture des écoles, associée au confinement, a eu de lourdes conséquences sur le physique et le psychique des enfants». «Durant le déconfinement, nous avons donc eu une flambée de consultations d’enfants extrêmement stressés et angoissés», affirme la praticienne.

Selon elle, «les plus jeunes s’exprimaient plus avec de l’agressivité et de la colère, les petits enfants ont régressé en termes d’apprentissage et ont développé des signes significatifs et durables d’irritabilité, en plus de la perte d’intérêt, ce qui a eu un effet sur le décrochage scolaire et le sommeil».

Les effets de violence entre les parents se sont également répercutés sur les enfants par des traumatismes, un sentiment d’insécurité dans le foyer et la perturbation des liens d’attachement. «L’OMS prévient d’ailleurs des maltraitances des enfants qui résulteraient de la crise sanitaire», alerte Dr. Benjelloun.

Parmi les effets sur le long terme, la médecin prévient d’ores et déjà que 30% des enfants montrant des signes d’isolement répondent aux critères cliniques d’un trouble de stress post-traumatique, ce qui les expose à «un risque plus élevé de développer des troubles d’humeur, psychotiques et une augmentation de la suicidalité à l’âge adulte».

Au niveau du service ambulatoire, la période du début de confinement s’est accompagnée d’un triplement de patients ayant fait des tentatives de suicide, ceux souffrant des effets de la violence ont également triplé, de même que ceux montrant des troubles de comportement ou ayant fait des fugues.

«Après le confinement, les adolescents entre 12 et 18 ans ont compté trois fois plus de cas suicidaires graves ayant nécessité une hospitalisation, le chiffre a doublé chez les enfants de 6 à 12 ans et le nombre global des hospitalisations pour tentative de suicide s’est multiplié par sept.»

Dr. Ghizlane Benjelloun

Promouvoir la santé mentale positive dans le milieu scolaire

Présidente de la Société marocaine de pédopsychiatrie, Dr. Nawal Idrissi Khamlichi a appelé pour sa part à un renforcement des liens entre médecins, parents et personnel pédagogique, pour assurer aux enfants une transition entre la période de confinement et le retour à la scolarité, qui s’accompagne par un changement de rythme.

Elle recommande notamment une formation des enseignants, pour repérer les signes de souffrance psychologique chez les enfants et permettre leur accompagnement précoce. Elle a appelé en retour à mettre en place aussi un accompagnement psychique pour les enseignants eux-mêmes, ou encore la création de groupes de paroles avec les parents.

Pour la médecin, il reste primordial d’impliquer les enfants dans la lutte contre la pandémie et de les faire participer à la création de supports d’information. Elle a plaidé aussi pour un accès aux soins psychiques à travers le médecin scolaire, la mise en place et le renforcement des services d’écoute et des groupes de parole pour les enfants, ou encore les équipes mobiles et de télémédecine pour les enfants dans les régions éloignées, tout en intervenant auprès de ceux en décrochage scolaire.

Afin d’adapter les cours présentiels à la crise sanitaire, la pédopsychiatre propose par ailleurs d’alléger les programmes et le travail scolaires. Elle rappelle l’importance d’évaluer les acquis des élèves, dès le début de l’année, parallèlement à la promotion de la santé mentale positive, avec des programmes en classe et des interventions éducatives, dans le cadre d’une stratégie nationale en collaboration avec les professionnels de la médecine, de la pédagogie, de la jeunesse et des sports.

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