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Grand Angle  

Cinéma : Un documentaire en avant-première au cœur du camp d’Imider

Depuis 2016, le réalisateur Nadir Bouhmouch accompagne les habitants d’Imider dans leur mobilisation contre les dégâts causés par l’exploitation minière dans la région. «Amussu», film documentant cette lutte, sera projeté le 9 février en avant-première sur les lieux des protestations.

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Mobilisation de la population d'Imider contre les dégâts de l'exploitation minière d'argent dans la région. / Ph. Nadir Bouhmouch
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Dans le sud-est marocain, l’activité d’une mine d’argent située à Imider affecte la nappe phréatique et accélère la désertification dans la région depuis 1969, date du début de l'exploitation de ce gisement. Pour défendre ses oasis, sources principales de revenu stable, la population locale mène une fronde depuis 2011 en fermant le pipeline qui détourne l’eau en faveur de la mine.

Aujourd’hui et telle une alternative à la production de cette richesse aux dépens de la nature et de la survie de plusieurs familles rurales, ce camp de mobilisation est devenu en lui-même un petit village vivant de l’énergie solaire. Le réalisateur Nadir Bouhmouch y a déposé sa caméra depuis 2016 pour mener des ateliers d’écriture avec les habitants. Ce processus a donné lieu à «Amussu», un documentaire projeté en avant-première à Imider samedi prochain.

Son auteur décrit un environnement «protégé agressivement par différents services sécuritaires», où «la plus grande mine d’argent en Afrique s’est avérée être un adversaire / ennemi redoutable», nous confie le réalisateur marocain. En effet, lors des protestations lancées il y a huit ans, des dizaines d’habitants ont été arrêtés pour leur appartenance au «Mouvement sur la route 96» qui organise cette fronde. Ainsi, le documentaire laisse voir des chants, des assemblées hebdomadaires et des activités organisées par tous et immortalisées par la caméra de Nadir Bouhmouch, prônant l’unité des hommes, des femmes et des enfants autour de leur terre.

Le cinéma collaboratif, une troisième voie dans le septième art

Plus qu’un travail de documentation témoignant de cette mobilisation qui reste peu médiatisée, «Amussu» constitue pour son auteur une manière d’explorer «une nouvelle esthétique, un style et une forme basés sur les arts oraux, les paroles des régions marginalisées de ce pays», loin d’une démarche d’auteur ou de film commercial. «L’un de mes objectifs les plus ambitieux était de trouver un langage cinématographique enraciné dans la culture populaire nord-africaine, à l’opposé de la culture hégémonique imposée par le Makhzen et ses métropoles, ou celle des Etats et des institutions européennes qui se sont imposées violemment aux populations indigènes au cours des cinq derniers siècles», explique Nadir Bouhmouch.

«J’étais également déterminé à élaborer un travail basé sur un collectif de protagonistes par opposition à la vision du personnage individuel qui domine le récit cinématographique de nos jours.»

Nadir Bouhmouch, réalisateur

Tel «un troisième cinéma qui mobilise la culture et la mémoire populaire vers la conscience collective», ce film propose de bousculer les normes dans leur aspect symbolique autant que pratique, notamment «en traitant le spectateur comme un acteur» à part entière. «Rien de cela n’aurait été possible sans l’effort de collaboration de l’ensemble du Mouvement», reconnaît le réalisateur, qui a tourné son film sans autorisation, au moment où les dégâts écologiques de l’exploitation minière dans la région ne sont pratiquement pas mis en lumière auprès du large public.

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