C’est un règlement de comptes par communiqués de presse interposés qui secoue une fois encore le dédale judiciaire opposant la famille de Lahcen Jakhoukh, fondateur du groupe Satram décédé le 9 juin 2015, à Mustapha Aziz, qui murmurait autrefois à l’oreille du défunt et dirige aujourd’hui le groupe Drapor, filiale de Satram.
Le 2 février, Satram Marine, société de droit marocain, annonce dans un communiqué publié sur le site de Drapor avoir récemment appris «avec soulagement» l’arrestation à Libreville du Marocain Mohamed Ait Ben Ali, directeur général de la société de droit gabonais Satram EGCA.
Son arrestation intervient suite à l’émission, le 1er août 2014 par la justice marocaine, d’un mandat d’arrêt national et international contre l’homme d’affaires pour «abus de confiance et participation dans l’usage de mauvaise foi des fonds et créances de la société, sachant que la disposition s’oppose aux intérêts économiques de cette dernière, à des fins personnelles et donne la priorité à une autre société dans laquelle il a des intérêts directs et indirects en participant dans un fonds commun de mauvaise foi», précise le communiqué.
Des «détournements» chiffrés à 600 millions de dirhams et 150 millions d’euros
Mohamed Ait Ben Ali est également accusé de «gestion illégale et sans qualité de Satram EGCA, avec recours à des méthodes mafieuses, sous la protection complaisante de trois anciens ministres : Magloire Ngambia (ex-conseiller du président Ali Bongo Ondimba, ndlr), Etienne Ngoubou (au Pétrole) et Séraphin Moundounga (à la Justice)». Les deux premiers seraient actuellement incarcérés au Gabon pour détournements de deniers publics, tandis que le troisième aurait pris ses jambes à son cou en Europe.
«L’arrestation de l’inculpé Ait Ben Ali permettra, sans aucun doute, aux enquêteurs du Gabon et du Maroc, d’évaluer plus précisément l’étendue des détournements faramineux commis dans ces pays et qui dépasseraient 600 millions de dirhams au Maroc, et 150 millions d’euros au Gabon», lit-on à la fin du communiqué.
Deux groupes distincts
Cinq jours plus tard, Satram, dirigée par le clan Jakhoukh, tire à boulets rouges sur ces informations «dont la crédibilité reste à prouver». Dans un communiqué, le groupe explique que les familles Jakhoukh et Alj sont les détentrices exclusives et à parité de la totalité du capital de Satram EGCA, précisant que «les sociétés EGCA SA et Satram SA existent distinctement et ne sont pas constituées en groupe». «Il s’agit de deux entités séparées qui n’ont aucun lien juridique», insiste une source de Satram contactée par Yabiladi.
Par ailleurs, Satram souligne également que les familles Jakhoukh et Alj «n’ont décelé aucune braderie des biens de leur société ni initié aucune action à l’encontre de Monsieur Mohamed Ait Ben Ali, son directeur général dont le mandat, toujours en cours, ne souffre d’aucun vice légal». «Elles prennent acte de l’interpellation de Monsieur Mohamed Ait Ben Ali dans le cadre d’une enquête judiciaire dont les motifs leur sont inconnus et attendent de connaître les suites de l’affaire», poursuit le communiqué. «On devrait savoir aujourd’hui si son interpellation sera permanente. Il a été arrêté, c’est comme une garde à vue», défend maladroitement notre source.
Le clan Alj et Jakhoukh, «solidaires», soutiennent enfin qu’ils «ne peuvent passer sous silence l’abjecte propagande d’un certain ‘légataire universel’ se désignant prétentieusement comme ‘compagnon de mute’ de feu Lahcen Jakhoukh» (sic).
Malgré notre insistance, notre source n’a pas «pu» nous mettre en contact avec d’autres responsables plus loquaces, arguant qu’ils ne «pourraient probablement pas [nous] en dire davantage».