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Grand Angle

Montréal : Les deux journaux marocains du Canada interdits au Consulat

La consule générale du Maroc à Montréal a interdit les deux journaux marocains distribués au Canada. Ceux-ci auraient, d’après elle, «insulté» les membres de son équipe et publié des articles allant à l’encontre des intérêts du royaume. Des accusations que les directeurs de publication réfutent. Détails.

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Les deux journaux marocains du Canada, à savoir Maghreb Canada Express (MCE) et Atlas Montréal, sont interdits au Consulat du Maroc à Montréal. Le mot d’ordre a été donné par la consule en personne, Wassane Zailachi, apprend-t-on dans une vidéo publiée sur Youtube lundi 13 avril, par Abderrahman El Fouladi, directeur de publication de MCE.

L’enregistrement date de septembre 2014, lors d’une soirée organisée pour la communauté marocaine en présence du ministre en charge des MRE, Anis Birou. A cette occasion, la diplomate s’était expliquée sur les raisons qui l’ont poussée à interdire ces deux journaux. «J’ai constaté que dans certains journaux qui sont distribués au consulat, il y avait des articles qui insultaient le personnel du consulat, alors que j’ai une équipe formidable. Je ne peux pas me permettre de laisser entrer des articles qui insultent le consulat, les membres du consulat, ça ce n’est pas possible», argue-t-elle. «Vous êtes dans un pays démocratique, vous pouvez écrire ce que vous voulez, mais il faudrait les distribuer ailleurs», a-t-elle ajouté s’adressant au propriétaire de MCE.

La consule a poursuivi son intervention expliquant les raisons de l’interdiction d’Atlas Montréal. «J’ai trouvé que c’était très grave. Là, on rentre dans des considérations politiques. Je ne peux pas faire rentrer [au consulat, ndlr] un journal financé par un Etat avec lequel nous avons des tensions. [Ce serait] contre les intérêts de notre pays. Je suis désolée», a-t-elle déclaré. Des accusations que les directeurs de publications des deux journaux réfutent avec force.

Il ne fallait pas critiquer le consulat ?

«L’article dont parle Mme la consule date de juillet 2014 et critique les services consulaires mobiles, qu’elle avait présentés comme une solution miracle. Mais nous expliquons que loin d’être une solution miracle et pérenne, ce n’est qu’un symbole de l’engagement de la diplomatie marocaine à faciliter la tâche à ses ressortissants, parce que ce mode de gestion présente de nombreuses limites, surtout pour un vaste pays comme le Canada», défend M. Fouladi dans un entretien avec Yabiladi. Il admet que l’article était «un peu sarcastique, mais nous n’avons insulté personne».

C’est donc depuis cette date qu’il ne peut plus distribuer son journal au consulat. Ce qui l’interpelle davantage, c’est la méthode qu’aurait employé la consule. «Elle n’a donné aucune explication à l’interdiction de nos journaux. Elle a attendu l’événement de septembre qui a réuni 300 marocains venu des quatre coins du Canada pour en parler et en plus déformer la réalité», regrette ce docteur en Climatologie qui depuis 12 ans informe les Canadiens sur le Maroc.

Il souligne au passage que ce n’est pas la première fois que le consulat s’en prend à son mensuel. Le numéro de mars 2014 consacré à la tournée royale en Afrique avait également été interdit. «Le jour où je suis allé déposer des exemplaires au Consulat, le vigile m’a dit que c’était interdit. J’ai tenté de contacter un vice-consul sans succès pour avoir des explications. Le lendemain, j’ai trouvé les journaux dans la poubelle», raconte–t-il soulignant qu’il ne faisait que mettre en exergue l’offensive diplomatique du Maroc en Afrique dans ses articles.

Une affaire de drapeau algérien dans un numéro d’Atlas Montréal ?

Chez Atlas Montréal aussi, c'est l'incompréhension. Le journal avait fait l’erreur de couvrir la campagne présidentielle algérienne en publiant – dans son numéro de décembre 2013 - un article sur la candidature d’Ali Benflis illustré sur la version papier par sa photo et une image du drapeau algérien. «La consule nous a dit : ‘’Moi je ne peux pas accepter que le journal soit distribué ici au consulat avec le drapeau algérien‘’», se rappelle le directeur général du journal, Rachid Najahi. «Je lui ai dit que j’allais reprendre la distribution au consulat après les présidentielles», ajoute-t-il dans un entretien avec Yabiladi, soulignant toutefois que son journal n’est pas financé par les Algériens, mais par la publicité.

Mais au mois de juin, Atlas Montréal essuiera une nouvelle interdiction. «Elle a retiré le journal sous prétexte que les annonceurs qui font la publicité sur l’écran situé au sein du consulat se sont plaints de la concurrence de mon journal», relate M. Najahi. Il contacte de suite la société qui gère la publicité diffusée sur l’écran du consulat pour connaitre l’identité des annonceurs en question. «Le responsable m’a donné la liste de ses 8 clients dont 7 font la pub’ au sein du consulat et mon frère qui est courtier immobilier en fait partie», indique le chef d’entreprise ajoutant que «le consulat prend des commission sur cette pub». «Là c’est grave ! Elle privilégie les sociétés qui lui versent quelques sous plutôt que les journaux qui travaillent pour la communauté marocaine», regrette-t-il.

«La consule m'a diffamé»

Nous avons tenté de joindre la consule pour obtenir de plus amples explications. Son assistance nous a demandé de la contacter par mail, ce que nous avons fait et attendons sa réponse. De leur côté, les deux patrons de journaux ne décolèrent pas. Mais pourquoi ont-ils attendu tout ce temps avant de révéler cette histoire ? «Nous avons évité au maximum la médiatisation de cette affaire. Nous en avons fait part au ministre des Affaires étrangères, ainsi qu’au ministre des MRE, mais depuis nous attendons toujours des réponses. Vu qu’elle tarde à venir, nous n’avons pas d’autre choix que de révéler ces choses», confient Abderrahman El Fouladi et Rachid Najahi.

Ce dernier estime même être victime de «diffamation» de la part de la consule. «Mon journal est commercial et financé par la publicité. Ça fait 20 ans que je vis au Canada. Atlas Montréal fait partie du groupe Atlas Media que j’ai moi-même créé en 2002. Je ne suis nullement soutenu par les Algériens», répète M. Najahi. «Ce que dit Mme la consule à mon sujet porte atteinte à ma réputation et mon activité. Depuis, mon équipe et moi recevons régulièrement des appels de clients qui demandent comment on est devenu pro-algérien. C’est de la diffamation. On ne peut pas laisser passer cela», martèle-t-il, soulignant que le rédacteur en chef et éditeur d’Atlas Montréal n’est autre que Abdelghani Dades, membre du conseil du CCME. «Je vois mal comment quelqu’un nommé par le roi pourrait recevoir de l’argent de l’Algérie, sachant le cabinet royal est le premier à savoir qui est pour le Maroc et qui ne l’est pas», dit-il, martelant que ce que dit la consule est «très grave».

Appel à Mezouar

Les deux patrons de presse disent avoir beaucoup d’autres informations sur les dessous du consulat, mais se refusent de les divulguer pour l’instant. «Nous demandons à M. Mezouar [le ministre des Affaires étrangères, ndlr] de déléguer un arbitre qui va écouter les deux parties. Nous ne tenons pas à laver le linge sale en public. Mais si on nous y pousse, on le fera», avertit M. Fouladi.

Démocratie et dictature
Auteur : Moujad
Date : le 19 avril 2015 à 05h12
Faire l'apologie de la censure revient à faire l'apologie de la dictature. Si Mme la consule à des arguments qu'elle demande un droit de réponse au lieu d'opter pour le bâillon.
Autre chose: Il serait préférable que la critique se fait dans le respect. Ceux qui utilisent l'insulte comme arme ne valent pas plus que eur cible.
Quelle affaire !
Auteur : Le barreur
Date : le 17 avril 2015 à 13h29
Il y a des odeurs de magouille dans cette histoire ! Un conflit d'intérets obscurs ?
Droit de réponse dans les deux journaux
Auteur : moirk
Date : le 16 avril 2015 à 13h52
A mon avis, Si la consule avait des problèmes sur les articles ou si elle a vu de la désinformation sur le consulat et ses employés, le moyen le plus civilisé est de demander la publication de ses positions dans les même jounaux. L´autre solution est de poursuivre les journaux en justice pour diffamation et laisser la justice decider.
C´est comme ca qu´on fait avancer les choses et non pas par interdiction.
S'agit-il d'une affaire de chantage ?
Auteur : charmeur de serpent
Date : le 16 avril 2015 à 12h55
Après avoir lu l'article, j'ai retenu ces quelques extraits qui veulent tout dire :

" Nous avons évité au maximum la médiatisation de cette affaire. Nous en avons fait part au ministre des Affaires étrangères, ainsi qu’au ministre des MRE, mais depuis nous attendons toujours des réponses. Vu qu’elle tarde à venir, nous n’avons pas d’autre choix que de révéler ces choses."

" Les deux patrons de presse disent avoir beaucoup d’autres informations sur les dessous du consulat, mais se refusent de les divulguer pour l’instant."

" Nous ne tenons pas à laver le linge sale en public. Mais si on nous y pousse, on le fera."

" Là c’est grave ! Elle privilégie les sociétés qui lui versent quelques sous plutôt que les journaux qui travaillent pour la communauté marocaine."



Donc, après avoir lu ces extraits, j'ai l'impression qu'il s'agit d'une affaire de chantage. Si Mme la consule ne laisse pas les responsables des deux journaux gérer leurs business journalistiques tranquillement, ils divulgueront des informations sur les dessous du consulat.

Pour des journaux qui prétendent travailler pour la communauté marocaine, ils sont prêts à renoncer à leur devoir de divulguer des informations sur les dessous du consulat en contrepartie de les laisser tourner leurs business tranquillement. Peut-on être crédible en agissant de la sorte ??? !!!
Journalistes renégats.
Auteur : taharo
Date : le 16 avril 2015 à 10h53
J'ai l'impression que les journalistes jouent un double jeu. Leur déclarations montrent clairement le chantage qu'ils exercent sur Mme la consule et sur le gouvernement marocain. S'ils ont des choses à révéler, il faudrait qu'ils le fassent le plus rapidement possible sans attendre des faveurs. Les journalistes renégats qui jouent un double rôle ne sont pas absents du paysage médiatique marocain dont le plus célèbre est Ali Lemrabet. Les marocains ne sont pas dupes et ils savent faire la différence entre ceux qui cherchent la célébrité chez les occidentaux en massacrant les leurs et ceux qui défendent les causes nationales avec justesse et bon sens. La magouille n'a plus de place ni d'un coté ni de l'autre.
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