Espagne : La gestion de la mosquée-cathédrale de Cordoue fait débat

La mosquée-cathédrale de Cordoue, symbole des luttes historiques entre chrétiens et musulmans, fait actuellement beaucoup parler d’elle en Espagne. Et pour cause, la gestion de l’édifice, placée depuis des siècles sous le giron de l’Eglise catholique, fait polémique. D’un coté, une pétition réclame de rendre le monument à la ville de Cordoue.  De l’autre, la mairie de droite affirme n’avoir aucun problème dans son statut actuel, rapporte l’AFP ce mardi 25 février.

Plus de 91 000 signatures

La pétition en question, qui doit être remise ensuite à l’évêque diocésain de Cordoue, Demetrio Fernández González, ainsi qu’au maire Jose Antonio Nieto, a d’ores et déjà réuni plus de 91 000 signatures. Ses auteurs demandent que la mosquée-cathédrale puisse désormais être administrée par une organisation publique afin de garantir, entre autres, sa transparence. «Voilà trente ans que la mosquée cathédrale de Cordoue a été déclarée au patrimoine mondial par l’Unesco, non seulement grâce à son extraordinaire richesse et complexité mais aussi particulièrement car il s’agit d’un symbole universel d’entente entre les cultures», explique-t-on dans la pétition, publiée sur la plate-forme en ligne change.org.

«Son immense dimension culturelle, symbolique et son patrimoine doivent être administrés par une institution publique avec des critères correspondant à son caractère universel, garantissant la transparence dans tous les aspects de la gestion, y compris sa gestion économique et la diffusion d’informations historiques, artistiques et architecturales basées sur des règles strictement scientifiques», poursuit la pétition.

Selon les auteurs de la pétition, le monument rapporterait à lui seul quelques 8 millions d’euros à l’Eglise. La visite de la mosquée-cathédrale coûte, en effet, 8 euros par personne et selon eux, celle-ci reçoit chaque année plus d’un millions de visiteurs. Le chiffre n’a, toutefois, pas été confirmé par l’Eglise.

Les musulmans, pour un lieu de culte œcuménique

En attendant la récolte de signatures nécessaires, le gouvernement andalou (Junta de Andalucia), de gauche, a fait savoir vendredi dernier, qu’il était en train d’étudier la possibilité de réclamer sa gestion. La mairie de Cordoue, dirigée par Jose Antonio Nieto Ballesteros du Parti populaire, n’a toutefois pas l’intention de réclamer quoi que ce soit à l’Eglise. Selon l’AFP, le maire a affirmé ne voir «aucun problème» dans sa gestion.

La construction de la mosquée a commencé en 786 sous l’ère d’Abd al-Rahman Ier, fondateur omeyyade de l’émirat de Cordoue, en Andalousie. Ce n’est qu’en 1236, après la Reconquista, que celle-ci a été transformée en église, puis en cathédrale. Tout le centre historique de Cordoue est classé au patrimoine mondial de l’Unesco qui souligne que «la période glorieuse de Cordoue a commencé au VIIIe siècle quand elle a été conquise par les Maures et qu’ont été construits 300 mosquées et d’innombrables palais et édifices publics, rivalisant avec les splendeurs de Constantinople, Damas et Bagdad».

Aujourd’hui, des messes catholiques y sont souvent organisées. La pratique du culte musulman y, est, toutefois, interdite. En 2004, la Commission islamique d'Espagne, soutenue par le parti socialiste espagnol, avait officiellement réclamé au Vatican le droit pour les musulmans d’y prier aussi, en vain.

Deux ans plus tard, en 2006, l’archevêque de Cordoue estimait que «l'utilisation partagée de la cathédrale par les catholiques et par les musulmans ne contribuerait en rien à la coexistence pacifique des différentes confessions religieuses». La situation n’a connu aucun changement depuis. Pourtant, sur son site officiel, le site est présenté comme étant «un temple unique dans le monde islamique et chrétien».