Ironie du sort, le plus redoutable opposant de Abdelilah Benkirane n'est autre que Hamid Chabat, son allié au sein de la majorité. Samedi dans son fief électoral, l’homme fort au PI a profité d’une réunion de la Ligue des économistes istiqlialiens, présidée par Adil Douiri pour lancer des attaques directes ciblant surtout les ministres PJDistes. Usant de la surenchère, le secrétaire général de la Balance a estimé que ces derniers agissent à l’écart de la politique générale du gouvernement et du coup ils planifieraient «la création d’un Etat similaire à celui des Mamelouks» au Moyen-Orient.
Réforme de la caisse de compensation, nouvelle scène de conflit
A l’origine de cette nouvelle tension entre les «alliés», le projet de réforme de la Caisse de compensation, chapeauté unilatéralement par Najib Boulif. A la tête du département des Affaires générales du gouvernement et la gouvernance, il prépare un avant-projet, pour être exact, décrié et par l’opposition et par l’Istiqlal. Lors de la même rencontre de Fès, Adil Douiri, l’ancien ministre du tourisme sous l’équipe Jettou, a également critiqué les premières informations, délibérément révélées par le même Boulif, sur les mesures à même de sortir la CC de sa crise budgétaire. Sur ce sujet, force est de constater que la différence de divergences de vues entre le PJD et le PI est abyssale.
Chabat propose avant, d’entamer toute initiative, de procéder à un recensement général des pauvres au Maroc afin de s’assurer de leurs capacité à faire face aux augmentations des prix des produits subventionnés directement par la Caisse, une fois le projet est mis sur les rails. Mercredi dernier à Rabat, le ministre d’Etat sans portefeuille, Abdellah Baha, fidèle à son habitude, s’est voulu rassurant, estimant que la levée progressive des aides se traduirait, seulement, par une hausse de 43% des coûts de ces produits pour les ménages.
En revanche, des estimations avancent un scénario catastrophe aussi bien pour les démunis que la classe moyenne : plus du triple pour la grande et la petite bonbonne du gaz butane, presque le double pour le kg de sucre, trois dirhams pour le litre du gasoil et un dh pour l’essence. Quant aux factures de l’électricité, déjà salée, elles s’apprécieraient du triple.
Pas de retrait de l’Istiqlal du gouvernement Benkirane
En dépit de la poursuite de ses critiques, le patron de la Balance a indiqué, samedi à Fès, que son parti n’a pas l’intention de se retirer du gouvernement que dirige le secrétaire général du PJD, afin d’éviter que le Maroc ne sombre dans le chaos comme l’Egypte et la Tunisie.
C’est la première fois que Chabat fait une telle annonce, d’habitude il maintient un certain degré de suspens autour de cette question avant de trancher, renvoyant à la prochaine session du conseil national du PI, prévue en avril prochain. Mais, il s'avère que les développements dans la région ont infléchi la position de Chabat.