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Grand Angle

Diaspo #342 : Lahoucine Tifert, du surf à Taghazout aux défis des vagues à travers le monde

Dès son plus jeune âge, Lahoucine Tifert a cultivé sa passion pour le surf. Aujourd’hui, il s’est fait un nom dans le milieu professionnel de ce sport, en tant que membre de l’équipe nationale marocaine. Mais en raison des horizons limités, il décide un jour de fuir le camp de ses coéquipiers, durant un séjour au Portugal. Il rejoint ensuite la Fédération espagnole de surf à Barcelone, du haut de ses dix-sept ans. Il aspire désormais à devenir champion du monde et à sortir sa famille de la pauvreté.

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Natif de Taghazout, Lahoucine Tifert suit attentivement les conditions météorologiques et le mouvement du vent, qui doivent être propices pour lui permettre d’affronter les vagues déferlantes. C’est son habitude depuis l’âge de neuf ans, lorsque sa passion pour le surf s’est développée dans cette région, entre les montagnes de l’Atlas et l’océan Atlantique. «J’aimais observer les touristes qui faisaient du surf. Au fil du temps, j’ai développé l’idée de me lancer dans l’aventure et de suivre leur exemple. Je suis issu d’une famille pauvre et à cette époque je n’avais pas d’argent pour le matériel nécessaire. J’allais dans certains magasins spécialisés dans la vente et la location d’accessoires pour ce sport et je demandais une planche», se souvient-il auprès de Yabiladi.

Au début, Lahoucine s’est limité à une pratique une à deux fois par semaine, en raison de ses obligations scolaires et craignant que sa famille le perde en mer. Mais rattrapé par sa passion, alors il a commencé de plus en plus à préférer la mer sur a classe. Il a déclaré : «Jour après jour, je ressentais que je gagnais de plus en plus de compétences et j’ai ressenti cela. Je suis allé voir un de mes frères plus âgé que moi et je lui ai demandé de venir me regarder surfer sur les vagues. Il a été immédiatement convaincu, puis il a décidé de m’acheter une planche et la combinaison requise», se rappelle-t-il.

Ce moment marque un tournant dans la carrière sportive de Lahoucine, puisqu’il passe du monde amateur au professionnel de compétitions. Il rejoint l’académie de Surf «Tadenga», à Taghazout, parallèlement à équipe spécialisée dans ce sport dans la région, affiliée à la Fédération royale marocaine de surf. Il commence à participer à des compétitions locales. «La première année, je me suis classé deuxième et ensuite, j’ai décroché la première place, puis la nouvelle est arrivée en 2022», se souvient encore le surfeur.

Tenter sa chance en Espagne

En contact avec le président du club, la fédération propose d’inclure l’athlète dans l’équipe nationale. «En effet, j’ai porté le maillot de l’équipe nationale et j’ai participé à un tournoi international à Casablanca, où je me suis classé 75ème mondial. En 2023 j’ai remporté le Championnat marocain de la jeunesse, et après nous avons rejoint un camp de préparation, pour participer à un tournoi international quand j’avais 17 ans», nous dit-il encore.

«Quand nous sommes arrivés au Portugal, j’ai décidé de fuir de la résidence de l’équipe marocaine. J’avais prévu à l'avance et de rester en Europe au su de ma famille, mais c’était après avoir participé à la compétition et atteint les quarts de finale du tournoi. J’ai réalisé que c’était le bon moment pour partir. Je savais que rester au Maroc ne m’aiderait pas à m’épanouir, d’autant que mes débuts dans ce sport n’avaient pas pour objectif d’atteindre un niveau mondial comme je l’espère maintenant.»

Lahoucine Tifert

Lahoucine se rend alors en Espagne, avec l’aide de l’un de ses amis qui l’attendait. Il s’est dirigé vers dans un centre d’accueil pour migrants mineurs à Barcelone, la ville où il réside encore aujourd’hui. Puis il a frappé à la porte de la fédération espagnole de surf (Fesurf Federación Española de Surf), qui l’a bien accueilli. «Ils m4ont fourni tout ce que je demandais et j’ai commencé à m’entraîner avec eux, j’ai assisté à toutes les formations et j’ai obtenu toutes les facilités et aides financières», nous confie le surfeur. A travers le consulat du Maroc, la fédération royale a quant à elle essayé de le renvoyer au Maroc, où les responsables sportifs lui ont proposé de l’aide.

«En Espagne, on a rapidement cru en mes capacités et en mon talent. Dans mon pays natal, le Maroc, nous vivions dans la marginalisation. Malgré cela, nous ne pouvons qu’aimer notre pays et nous efforcer de l’honorer, quelle que soit la situation dans laquelle nous nous trouvons. Les tournois auxquels j’ai participé au Maroc étaient entachés de népotisme et de clientélisme, et nous souffrions de discrimination.»

Lahoucine Tifert

L'intégration chez le voisin ibérique n’a pas été un obstacle pour Lahoucine. D’ailleurs, il n’a pas mis longtemps à apprendre la langue. «Au début, je parlais français et anglais en raison de mes contacts avec des étrangers qui visitaient souvent Taghazout pour apprendre», nous a-t-il dit. Le surfeur commence à participer aux compétitions officielles et l’année dernière, il a été au Championnat de Catalogne, dans lequel il a terminé cinquième.

«Nous avions l’habitude de nous rendre en France une fois tous les deux mois pour nous entraîner, vu la présence de vagues adaptées», nous dit le surfeur, qui se prépare à une autre compétition en août prochain.

En mars dernier, après que sa situation administrative ait été réglée, Lahoucine Tifert s’est rendu à son pays d’origine. Actuellement âgé de 19 ans, il raconte : «Les sentiments étaient mitigés lorsque j’ai rencontré mes amis, mais je n’ai pas regretté mon séjour. malgré mon amour pour la patrie. Dès mon plus jeune âge, je pensais contribuer à aider ma famille et mes frères et sœurs, d’autant plus que mon père est décédé à l’âge de 13 ans.

Parallèlement à sa passion pour le surf, Lahoucine Tifert est retourné aux études en Espagne, après les avoir abandonnées dans son pays dès la troisième année de collège. Il poursuit actuellement son cursus dans le domaine de l’électromécanique et travaille comme serveur dans un restaurant pendant son temps libre. «Mon rêve est de devenir champion du monde. J’aspire à rejoindre l’équipe nationale espagnole», a-t-il confié.

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