Près de trois semaines après le retrait par les autorités marocaines de l’accréditation presse à un journaliste de l’AFP, Human Rights Watch (HRW) revient à la charge. «Les autorités marocaines devraient rétablir l’accréditation du journaliste de l’Agence France-Presse (AFP) Omar Brouksy, et cesser leurs représailles contre des médias étrangers suite à des informations qu’ils rapportent», écrit l’organisation internationale de défense des droits de l’Homme, dans un communiqué rendu public ce lundi 22 octobre.
Le 4 octobre dernier, Omar Brouksy, journaliste de nationalité marocaine travaillant pour le compte de l’AFP, s’était, en effet, vu retirer son accréditation, et ce après avoir écrit un article traitant des élections partielles de Tanger. Dans sa dépêche, Omar Brouksy expliquait que le scrutin de Tanger opposait le Parti de la Justice et du Développement (PJD) à des «candidats proches du palais royal», faisant ainsi allusion au Parti de l’Authenticité et de la Modernité (PAM), fondé par Fouad Ali El Himma. L’article évoquait également une «lutte de pouvoir entre le gouvernement et le palais royal», précise l’ONG.
Aux yeux du gouvernement marocain, le journaliste est coupable d’avoir produit «une dépêche anti-professionnelle» et diffusé des allégations «infondées et irresponsables» qui «mêlent l'institution monarchique à cette compétition électorale». «Nous considérons qu'il s'agit d'une grave faute professionnelle (...) que d'impliquer faussement la monarchie dans une compétition électorale le jour même du vote», avait-on expliqué. Cependant, pour HRW cette sanction est loin d’être justifiée.
Sanction injustifiée pour HRW
«Un pays qui respecte la liberté d’expression ne devrait pas confisquer de carte de presse parce la monarchie a été mentionnée dans le ‘mauvais’ contexte, ni fermer certains bureaux de médias d’information parce qu’il n’apprécie pas leur couverture», déplore Sarah Leah Whitson, directrice de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch. «Même si le journaliste avait réellement mis en doute la neutralité du palais dans ces élections, cela ne pourrait pas justifier une sanction du gouvernement, et encore moins une sanction aussi lourde que le retrait de son accréditation», a-t-elle ajouté.
Dans son communiqué, Human Rights Watch relie la sanction infligée à Omar Brouksy, à la fermeture du bureau d’Al Jazeera à Rabat, le 29 octobre 2010. Les autorités marocaines avaient, là aussi, décidé de retirer l’accréditation de ses huit correspondants basés au Maroc. La chaine d’information avait, pour rappel, été accusé d’avoir «déformé gravement l'image du Maroc et nui manifestement à ses intérêts, plus particulièrement à son intégrité territoriale».
«Al Jazeera étant désormais autorisée à faire des reportages depuis la Tunisie et la Libye suite aux révolutions dans ces pays, le Maroc se retrouve dans le club réduit de gouvernements qui interdisent cette chaîne», conclut aujourd’hui Sarah Leah Whitson. Et de poursuivre : «Le Maroc devrait plutôt sortir de ce club et cesser de contrôler la façon dont les journalistes couvrent des sujets sensibles tels que la monarchie et le Sahara occidental».
Outre HRW, l’association Reporters Sans Frontières (RSF) avait également condamné ce retrait d’accréditation, estimant qu’il s’agissait d’une «décision politique».