Le Projet de séquençage de la biodiversité africaine, dénommé Africa BioGenome Project (AfricaBP) en anglais, a publié récemment dans la revue scientifique Nature, un article mettant en exergue les buts, les priorités, et le plan directeur pour le séquençage du génome des plantes, des animaux, des champignons, et protistes endémiques au continent Africain.
Après avoir été porté sur les fonts baptismaux en 2021, le projet réunit à présent, un panel de 109 chercheurs africains et 22 organisations africaines. Le projet est non seulement partenaire mais aussi fait partie intégrante des trois projets de même envergure, à l'échelle internationale que sont: le Projet de séquençage de 10.000 plantes (10KP), le Projet de séquençage de tous les vertébrés (VGP), et le Projet de séquençage de tout organisme vivant terrestre (Earth Biogenome Project).
Une meilleure gestion des ressources africaine
Depuis que le projet a été porté sur les fonds baptismaux, AfricaBP a établi des arguments solides en faveur de la nécessité de comprendre la biodiversité du continent africain grâce à la génomique et d'assurer une utilisation durable des plantes, animaux, champignons et protistes indigènes. À titre d’exemple, les ressources alimentaires culturellement pertinentes, telles que les cultures orphelines et d'autres aliments de base, essentiels à la sécurité alimentaire régionale, ne sont pas encore séquencées. L’information génétique issue du séquençage de ces ressources s'avère primordiale pour sauvegarder la biodiversité et améliorer leur résilience en réponse aux pressions environnementales telles que les changements climatiques.
Ainsi, la collecte, le séquençage et le stockage des informations génomiques sur le continent – par et pour les Africains – constituent une priorité fondamentale pour AfricaBP. En conséquence, les données serviront pour une meilleure gestion de nos ressources en matière de sélection variétale, la préservation de la biodiversité et la sécurité alimentaire. Ceci participe à l'atteinte des objectifs post-2020 établis par la Conférence des Nations unies sur la biodiversité (COP15), des Objectifs de développement durable (ODD), de même que le renforcement des efforts déjà entrepris par le Consortium africain sur l'hérédité et la santé (H3Africa).
Les principaux objectifs visés ne peuvent être atteints sans le soutien des gouvernements africains, de la Commission de l'Union africaine, des agences nationales et régionales et des partenaires et organisations internationales. Reconnaissant les erreurs du passé, AfricaBP s’engage dans un processus équitable pour le partage des bénéfices matérialisés de ses activités. Par exemple, le projet travaillera avec les décideurs politiques sur des recommandations de lois et de réglementations régissant l'accès aux ressources naturelles, tout en prenant en compte le Protocole de Nagoya. Il en sera de même pour ce qui concerne le partage des résultats du projet, dans le but d’une gestion inclusive et équitable.
En plus des nouvelles politiques pour soutenir AfricaBP, les gouvernements nationaux devront travailler en collaboration avec des partenaires régionaux et internationaux pour investir dans les infrastructures, afin de soutenir la génomique et la bioinformatique en Afrique. Le coût estimé du projet est de 1 milliard de dollars américains sur 10 ans. Bien que cela puisse sembler être une entreprise énorme, un tel investissement profite non seulement à la recherche, mais aussi au développement économique pour atteindre les Objectifs de Développement Durable (ODD).
Un hub de connaissances pour la génomique et la bioinformatique
Au-delà des bénéfices directs issus des nouvelles technologies et de la croissance économique garantie par les découvertes et les investissements dans la génomique et la bioinformatique en Afrique, AfricaBP prévoit également de développer un hub de connaissances pour la génomique et la bioinformatique. Un soutien continu des universités africaines offrira aux scientifiques africains des opportunités et des incitations pour rester en Afrique après avoir reçu des formations dans le cadre du projet. Il est aussi prévu de développer des bourses pour les chercheurs en début de carrière afin d'investir dans la prochaine génération de leaders scientifiques et de garantir la continuité de ce travail vital.
«AfricaBP n'est pas seulement un projet scientifique, mais un projet socio-scientifique à travers lequel nous espérons rapprocher les capacités en génomique et en bioinformatique des Africains», a déclaré ThankGod Echezona Ebenezer, fondateur et co-président de AfricaBP et aussi bioinformaticien au EMBL-EBI (Royaume-Uni).
Roksana Majewska, présidente du comité pilote de AfricaBP et chercheuse à l'Université Nord-Ouest, en Afrique du Sud, déclara : «AfricaBP est une entreprise énorme, audacieuse et potentiellement transformatrice, avec une réelle chance de soutenir de manière significative l'autonomie, la croissance durable et le bien-être des communautés africaines».
«AfricaBP veillera à ce que les technologies scientifiques de pointe qui ont été principalement accessibles dans les pays développés soient disponibles pour une utilisation sur le continent Africain», ajouta Anne Muigai, actuelle présidente de AfricaBP et professeure de génétique à l'Université d'agriculture et de technologie Jomo Kenyatta au Kenya.
Dans l'ensemble, AfricaBP s'est engagé à améliorer la sécurité alimentaire, la conservation des ressources naturelles et le partage de données générées d'une manière inclusive et équitable centrée sur les priorités des peuples africains. C'est un projet ambitieux et prometteur, prêt à conduire le continent vers la prochaine grande étape de la recherche et de l'innovation.