«Il n’y a pas de détenu politique au Maroc parmi les 65 mille prisonniers». Les propos ne remontent pas à l’époque des années de plomb mais juste à hier. Ils sont de Mustapha Ramid, le ministre de la Justice et des libertés, lors d’un entretien avec la chaine Al Mayadine, basée au Liban, la concurrente d’Al Jazeera. Le responsable gouvernemental a même affirmé que les prisons marocaines «ne comptent que des détenus de droit commun et non ceux d’opinion».
Ramid a également évoqué les mis en cause dans des affaires de terrorisme, précisant qu’il y a un travail pour les convaincre de réviser leurs positions initiales. Visiblement gêné par la question du journaliste qui est revenu à la charge, Mustapha Ramid a répliqué que «pour le moment aucun cas de détention politique ne me revient en mémoire». Mais qu’en est-il des membres du Mouvement du 20 février arrêtés lors des marches et autres manifestations ? Le trou de mémoire du ministre de la Justice et des Libertés est, apparemment, la raison de cet oubli.
L’AMDH contredit les propos du ministre
Justement, le même jour du passage de Ramid à la chaine Al Mayadine, l’AMDH vient de publier un rapport, non encore exhaustif, sur les violations des droits de l’Homme qu’auraient subi les militants du M20F. C’est le bilan de plus de quatorze mois de recherche et de travail, et ce, depuis l'émergence de ce mouvement sur la scène politico-sociale au Maroc.
Le document commence par énoncer le nombre de personnes tuées et la date de leurs décès, toutes sont victimes d’interventions des forces de l’ordre. Selon l'AMDH, elles seraient au nombre de onze : cinq à Al Hoceima, deux à Safi, et un respectivement à Sefrou, Berkane, Taza et Béni Bouyache.
Contrairement aux propos du ministre de la Justice et des Libertés assurant qu’ «il n’y a pas de détenus politique au Maroc», le rapport élaboré par les services de l’ONG présidée par Khadija Riyadi a cité les noms de 40 personnes classées dans cette catégorie. Un bilan qui ne mentionne pas les arrestations et les condamnations qui se sont produits après le 17 avril 2012.
Dans l’ensemble, le document énumère quelques 645 cas de violations des droits de l’Homme réparties entre «répression psychique et physique» qu’auraient subi les manifestants du M20 F dans plusieurs villes du royaume durant la période comprise entre le 20 février 2011 et le 17 avril dernier.