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Samedi soir avec un guerrab
H
3 février 2006 17:05
Reportage. Samedi soir avec un guerrab


Après 22h, Adil, vendeur d'alcool à la sauvette dans un bidonville écoule sa marchandise. TelQuel lui a tenu compagnie et raconte son histoire, celle de ses clients... et celle des policiers qui passent récupérer leur dû, en “liquide”.


“Andak dem l'qard (tu as du sang de singe) ?” C’est loin d'être une réplique vue dans l'Armée des douze singes, King Kong ou autre film de science fiction tourné dans les pharaoniques studios d'Hollywood. Mais tout simplement une question banale adressée à Adil qui vient de prendre ses fonctions, dans une ruelle sombre et crasseuse d'un
bidonville casablancais. Il y exerce son art à lui : vendre de l'alcool à la sauvette. Dans l'argot populaire on appelle ça un guerrab (appellation empruntée au vendeur d'eau). “évoquer dem l'qard, c'est faire allusion au vin rouge”, explique Adil avant d'ajouter que “dans le milieu, ce genre de sous-entendus dénués de toute logique ne manque pas”. Il arrive même qu'on parle de knibilate (mini bombes), aïcha twila (Aïcha la longue) ou boulbwader (monsieur muscles) ou El Ferraka (en référence à une vieille bouteille très bon marché).
Il n'est pas plus de 22h lorsque Adil s'installe sur “son trottoir” avec oulad derb. Parmi eux, un dealer et l'éternel moul détail. Il suit ce rituel depuis maintenant deux ans, sept jours sur sept, presque tout le long de l'année. Durant le ramadan, il réoriente son activité en faisant dans la contrebande, notamment de cartouches de cigarettes. Et s'il n y avait pas eu le décès de son frère en 2003 dans un accident de circulation, il serait probablement sur les bancs de la fac. “Il me restait une année pour décrocher mon bac, mais le destin a voulu que je reprenne le business de mon frère pour subvenir aux besoins de notre famille”. Les clients ne sont toujours pas au rendez- vous mais cela ne semble pas pour autant inquiéter Adil. “En plus du fait qu'on est samedi soir, le dernier point de vente, en l'occurrence Métro, vient de fermer ses portes. Tu vas voir, dans derbna, ça va s'animer”.
Moins d'un quart d'heure plus tard, les phares d'un premier véhicule qui viendra s'arrêter à notre niveau, nous aveuglent. Ils appellent Adil par son prénom. Des habitués probablement. Entre-temps, un second véhicule s'engage dans notre rue et vient se garer pas trop loin de nous. Il ne faut pas plus de dix minutes pour que Adil prenne les deux commandes, se fasse payer - ici on paie d'avance et les prix ne sont pas négociables - et se dirige vers l'intérieur du bidonville. Au bout de deux cents ou trois cents mètres, il pousse une porte. A l'intérieur d'une baraque minuscule qu'il dit appartenir à son oncle, deux malabars se roulent des joints en face d'une mini-télé . Dans un coin, sont entreposés des dizaines de packs de bière, des bouteilles de vins, de vodka et de whisky… Il y a de quoi soûler tout un bidonville. Sur les instructions d’ Adil, les deux gardiens préparent les commandes. Dans un premier sachet noir, la légendaire mika kahla, 20 canettes de bières et dans l'autre, une dizaine et trois bouteilles de vin.
Une fois de retour sur son trottoir, après avoir servi ses premiers clients qui se disent réjouis de pouvoir poursuivre leur soirée, Adil se retrouve devant deux nouveaux véhicules et une mobylette qui attendent qu'on les serve. De jeunes cadres BCBG, invités à la dernière minute à se rendre à une soirée. “Arriver les mains vides ne se fait pas, heureusement que les guerraba existent” souligne l'un des deux conducteurs, pour briser la glace. Pour eux, ce sera donc une bouteille de vodka et quinze canettes. Pour ce qui est du gars à la mobylette, un concierge qui rend parfois service aux locataires de l'immeuble où il travaille, on l'a chargé de ramener de la bière.
Entre 23h et minuit, les clients affluent comme l'a prédit Adil. Une dizaine de véhicules, allant de la berline dernier cri à la Uno cabossée, accèdent à cette partie de la ville d'où, paradoxalement, chacun des habitants n'a qu'une seule envie : fuir. L'opération est toujours la même : commander, régler, se faire servir et partir. Donc rien de bien particulier à signaler si ce n'est que, plus d'une fois sur deux, les clients veulent négocier les prix. Mais en vain, Adil est intraitable là-dessus : “Celui qui veut acheter mrahba bih, sinon c'est pas la peine, je ne force personne”. A la vue des prix pratiqués par Adil et la plupart des guerraba, on a tendance à penser qu'ils roulent sur l'or. Surtout quand on sait qu'acheter de la bière chez lui coûte 15 DH au lieu de 8 dans les grandes surfaces, les vins près de 50 DH et les alcools forts entre 300 et 400 DH. Pour lui, “ce n'est pas aussi facile qu'on le croit, on ne fait pas autant d'argent que tu le penses”. Adil insiste sur le fait qu’il emploie trois personnes pour l'assister, doit arroser la police et faire plaisir aux voisins pour qu'ils le laissent œuvrer en paix. Alors combien peut bien gagner un guerrab ? Il reste très évasif : “ça dépend. Des mois, la moisson est de 2000 DH, d'autres 20 000, voire plus”. Il est minuit passé lorsqu'un jeune d'une quinzaine d'années, sorti de nulle part, annonce à Adil : “ils arriiivent !”. La très visible estafette blanche avec son rougeâtre “sûreté nationale” et à son bord deux moustachus, sillonne notre rue sans pour autant s'arrêter. “Y a rien à craindre, c'est tout à fait normal. Par leur passage, ils nous annoncent qu'ils passeront plus tard récupérer leur enveloppe”.
Minuit 25, un nouveau client vient se garer à hauteur d'Adil. Il semble un peu perdu. Ce sont des amis à lui qui lui ont indiqué où trouver le guerrab. “Tu es au bon endroit a jemmi”, lui dit Adil, pour le rassurer. Pour lui, ce sera une bouteille de vodka, et pour ses amis du whisky et une bonne vingtaine de bières. Minuit 45, une Renault familiale surgit de nulle part. A son bord, six personnes à moitié ivres. Au premier coup d'œil, Adil ne se montre pas très confiant. “ça nous arrive parfois de nous retrouver devant des clients complètement bourrés et qui peuvent s'emporter pour un rien du tout”. Adil fait un signe sur le champ à ses assistants, qui sont tous armés de couteaux et prêts à intervenir au cas où. “Une fois, un type armé d'une faucille m'a blessé au bras, depuis ce jour, je suis sur mes gardes”. Fausse alerte cette fois-ci. La demi-douzaine de clients éméchés veut seulement ses cinq bouteilles de rouge et rentrer à la maison les cuver. “On n'est jamais assez prudent”, répète Adil.
Entre une heure et trois heures, une bonne quinzaine de véhicules nous rendent visite. Il n'y aura pas de casse ce soir. Quelques clients un peu de trop bonne humeur qui veulent “se taper la discute”, mais sans plus. Le cadre ne s'y prête pas de toute façon. Sur le coup de 3h10, c'est un peu plus calme et, comme s'y attendait Adil, les policiers sont de retour. Sauf que, cette fois-ci, ils vont s'arrêter pour récupérer leur dû. La mika kahla tiendra lieu d'enveloppe. Ils vont même demander une prime supplémentaire : deux bouteilles de vodka. “Voilà comment marche ce pays, a khouya, mais bon, je ne leur en veux pas, vu les salaires minables qu'ils doivent toucher, tout le monde doit manger”.
à 3h30, Adil baisse le rideau. “D'habitude je reste jusqu'à 4h30 pour ceux qui sortent des boîtes mais là, j'ai tout vendu”. Il règle rapidement ses “employés” et file dans la baraque où il vit tout seul depuis qu'il a offert à sa mère et à ses cinq frères et sœurs, un appartement dans une des résidences économiques de la ville. “Et dire que je voulais devenir vétérinaire”, lâchera t-il avec un brin d'amertume dans la voix, avant de refermer sa porte.





Que dit la loi ?
Du formel à l'informel

La licence est aujourd'hui le sésame qui permet de faire partie du cercle très fermé des exploitants d'alcool au Maroc. Si dans le passé, elle était attribuée arbitrairement aux affidés du régime, aujourd'hui il faut avoir le bras long pour en bénéficier et surtout “graisser la pâte”, d'après ce tenancier de bar. Vous n'y avez pas droit si vous exercez un emploi public ou privé, si vous êtes conjoint d'un magistrat, fonctionnaire…Vous n'avez pas le droit d'ouvrir près d'une mosquée, d'un cimetière, d'un hôpital… “Si c'est comme ça, alors tous les exploitants sont hors la loi” répond à cela le même tenancier. Une fois votre licence octroyée, le burlesque se poursuit : la loi vous interdit de servir de l'alcool aux musulmans, de vendre au détail…et vous pouvez même vous la faire retirer à tout moment par le directeur général de la sûreté nationale après avis d'une commission (comprenant des représentants des départements de la justice, de la santé, du commerce, du tourisme, de la gendarmerie et de la police). Une chose est sûre, vous avez intérêt à être gentil avec tout ce beau monde.

Telquel
k
3 février 2006 17:14
c la virity !

chaque darb a son guerrab! et il y'en a des droubas au maroc.
Z
3 février 2006 17:19
Salam,
Il y'a beaucoup d'alcooliques au Maroc...
Suffit de rouler a Casa le samedi soir ou encore de voir les echymoses sur le visage des femmes mariés...
La ou ca devient inquietant , c'est que meme les jeunes et les filles s'y mettent ...
$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$ Le texte que je viens de taper a porté plainte :S $$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$
s
3 février 2006 17:30
Encore Casablanca!!! Zackkkkkkkk angry smiley ...Allah ihdikoum ou safi, toute petite, je me souviens d'un voyage fait dans le sud du Maroc et la voiture nous avait lâché et un monsieur s'est proposé de nous chercher un garagiste(enfin quelqu'un qui s'y connait en voiture...) dans un village avoisinant, on avait longuement attendu en famille lorsqu'une voiture honda grinning smiley est venue et il n'y avait pas que le mister garagiste, il y avait aussi beaucoup de jeunes des ados mêmes et des moins jeunes dans la Houuuuuuuuunda, ils se sont installés, posés sur les briques du trottoir et commençaient à manger, des sandwichs au pain du souk et devinez avec quoi ils accompagnaient leurs sandwichs ????

Ces personnes ne vivent pas dans une grande ville!! ces personnes ne vivent pas dans la dite société moderne!!, ces personnes n'ont pas de guerrab et les flics ne guettent pas en ces lieux....Et pourtant!!

Il y a quelque chose de "Touch à l'interdit" chez nous, au Maroc, et c'en est ainsi, il en va de la nature humaine ou alors d'une sensibilité " (=faiblesse)evil de pas mal d'hommes à ces vices et puis c'est tout!!!
:) :) :) "pas d'insultes, pas d'attaques personnelles, et le forum ne s'en portera que mieux" :) :) :)
Z
3 février 2006 17:37
C'est clair la soif de l'interdit n'est pas pres de s'eteindre au Maroc sad smiley...
Le Haram attire beaucoup les marocains...c'est dommage...
Au lieu de s'instruire, de se cultiver, de s'investir dans le champ social, d'aider au developpemnt du pays...on prefere aller aux Bars, aux p , jouer aux courses...
On est pas sortis de l'aubegrge au bled confused smiley
$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$ Le texte que je viens de taper a porté plainte :S $$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$
b
3 février 2006 17:47
ou devenir islamiste.

Citation
Zackmtl a écrit:
Au lieu de s'instruire, de se cultiver, de s'investir dans le champ social, d'aider au developpemnt du pays...on prefere aller aux Bars, aux p , jouer aux courses...
Z
3 février 2006 17:51
Citation
bikhir a écrit:
ou devenir islamiste.

Citation
Zackmtl a écrit:
Au lieu de s'instruire, de se cultiver, de s'investir dans le champ social, d'aider au developpemnt du pays...on prefere aller aux Bars, aux p , jouer aux courses...

LOL grinning smileygrinning smileygrinning smiley

ou devenir Laicard islamophobe tongue sticking out smiley grinning smiley

PS: Au fait ca avance ton poste a rabat , M le Larbin?



Modifié 1 fois. Dernière modification le 03/02/06 17:52 par Zackmtl.
$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$ Le texte que je viens de taper a porté plainte :S $$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$
Z
3 février 2006 18:00
Sinon Telquel joue toujours dans la provoc et le sensationalisme à 2 balles...
Journal qui souvent finit à la salle de bain pres du Trone d'ailleurs...
$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$ Le texte que je viens de taper a porté plainte :S $$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$
k
3 février 2006 18:47
Citation
Zackmtl a écrit:
Sinon Telquel joue toujours dans la provoc et le sensationalisme à 2 balles...
Journal qui souvent finit à la salle de bain pres du Trone d'ailleurs...


mais seulment il faut le dire! il n'y a pas de provocation dans le fais de parler d'une realité! de plus c'est un journal marocain et non pas un qui viendrait de l'etranger pour venir blamer notre pays.
Z
3 février 2006 18:50
Citation
biggie a écrit:
Citation
Zackmtl a écrit:
Sinon Telquel joue toujours dans la provoc et le sensationalisme à 2 balles...
Journal qui souvent finit à la salle de bain pres du Trone d'ailleurs...


mais seulment il faut le dire! il n'y a pas de provocation dans le fais de parler d'une realité! de plus c'est un journal marocain et non pas un qui viendrait de l'etranger pour venir blamer notre pays.

AU fait tu as raison Biggie ...
Telquel a au moins le merite de mettre le doigt la ou ca fait mal et on le sait c'est l'hypocrisie qui ronge notre pays...
$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$ Le texte que je viens de taper a porté plainte :S $$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$$
k
3 février 2006 18:54
juste pour info

le temoinage me rappel une histoire d'un guerrab d'essaouira dans le maleh al-kadim


un garab a accidentellement blessé une jeune femme avec un coteau au niveau du poignet qui devenu invalide! bref le type se ramasse une peine de prison! detention a agadir.
la releve pour le post du guerrab ne s'est pas faite attendre! le jeune frere du condamné a pris la releve a l'age de 20 ans...
k
3 février 2006 18:58
Citation
Zackmtl a écrit:
Citation
biggie a écrit:
Citation
Zackmtl a écrit:
Sinon Telquel joue toujours dans la provoc et le sensationalisme à 2 balles...
Journal qui souvent finit à la salle de bain pres du Trone d'ailleurs...


mais seulment il faut le dire! il n'y a pas de provocation dans le fais de parler d'une realité! de plus c'est un journal marocain et non pas un qui viendrait de l'etranger pour venir blamer notre pays.

AU fait tu as raison Biggie ...
Telquel a au moins le merite de mettre le doigt la ou ca fait mal et on le sait c'est l'hypocrisie qui ronge notre pays...

il y'a aussi les telefilms de plus en plus nombreux sur 2M qui parle de ces problemes de société.
mais ne je suis pas un fan de 2M que je considere comme poubelle de temps en temps grinning smiley
H
3 février 2006 20:28
Une chose que j'ai trouvé drole ce sont les flics qui passent d'abord pour prevenir qu'il faut leur garder et le leur part et ils savent a quelle heure passer plus tard smiling smiley
Il ne faut pas que ce soit trop tot pour donner au guerrab le temps de ramasser un peu de fric et il ne faut pas que ca soit trop tard non plus s'ils veulent que le guerrab soit encore la.
 
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